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d'aujourd'hui. Deux étangs se trouvaient ainsi formés, l'un au nord, l'autre au sud de la Clape, réunis par un bras de mer qui passait devant la colline où s'est élevée Narbonne. Les alluvions de l'Aude ont resserré peu à peu et réduit à rien cette communication ; elles ont à peu près comblé L’étang septentrional et commencé le colmatage de l’étang méridional ; mais où en était ce double travail à l'époque de la conquête romaine ? Les quelques données que nous pouvons grouper ne suffisent pas pour imposer une solution. Nous allons les présenter telles quelles. L'Aude coule aujourd'hui au nord de la Clape, et près de son embouchure se trouve le petit étang de Vendres, entouré d'une large zone d'alluvions récentes, qui ne remonte pas au delà du XVIIe siècle. Avant cette époque, L’étang de Vendres, séparé de la mer par un simple cordon littoral comme ceux des étangs voisins, avait une forme triangulaire, et sa pointe occidentale pénétrait jusqu'au défilé, large de 4 500 mètres environ, par lequel l'Aude est obligé de passer entre la Clape et les collines qui le séparent de l'Orb. Il semble que ce défilé a dû recueillir de bonne heure les sédiments et s'ensabler ; cependant un certain nombre de cartes des XVIe et XVIIe siècles (elles ne sont pas toutes d'accord) nous montrent l'étang de Vendres en communication avec celui de Capestang, qui se trouve en amont du défilé, et n'a été desséché que tout récemment. M. Duponchel, dans son Cours d’hydraulique et géologie agricoles, cite une charte datée du règne de saint Louis, relative à la concession du dessèchement de l'étang de Montady, et qui mentionne dés salines en activité sur le bord de l'étang de Capestang. Une communication existait donc entre ce dernier et la mer au XIIIe siècle. D'autre part, il est difficile de penser que les atterrissements n'ont pas commencé par lui, et surtout par l'espèce de détroit qui le rattachait à l’étang de Vendres. Un plan de Narbonne, que M. Lenthéric reproduit dans Les Villes mortes du golfe de Lyon, peut nous renseigner. Il est très regrettable que l’origine de cet étrange document n'ait pas été indiquée ; mais il serait trop simple de l'écarter purement et simplement pour ce motif. En l'examinant avec soin, on reconnaît qu'il est mal orienté : la forme hexagonale de la ville y est nettement prononcée et permet de rétablir la direction du Nord, qui doit se trouver vers l'angle supérieur droit. On remarquera, en outre, que la ville même est dessinée à une assez grande échelle, mais que les environs sont réduits dans une proportion fabuleuse. Il ne s'agit évidemment que d'indiquer au lecteur, par des signes plus frappants qu'un nom et une flèche, la direction des principales localités. On reconnaît facilement, au Sud et au Sud-Est, l'étang de Sijean et l’île de Sainte-Lucie (Insula Lici) ; l'étang de Gruissan ou de Narbonne (lacus Narbonensis) à l'est du chenal de l'Aude, aujourd'hui canal de Robine ; à l'Est et au Nord-Est, et même jusqu'au Nord, s'étend une nappe d'eau appelée lacus Rubrensis, qui se relie forcément aux étangs de Vendres et de Capestang. Au Nord et au Nord-Ouest, on voit le cours de FAude arrêté par un barrage et ramené sur Narbonne par un détour, facilement reconnaissable sur la carte d'état-major ; il passe dans le voisinage des Prata liguriæ, dont le nom survit peut-être dans celui de Livières.

On sait qu'en 1320, ce grand barrage a été emporté et que le fleuve, quittant brusquement le lit que lui avaient imposé les Romains, s'est rejeté vers l'étang de Vendres. Les atterrissements ont donc été interrompus de ce côté pendant dix ou douze siècles. Le dernier renseignement que nous possédions nous est fourni par la voie romaine, dont le tracé est facile à reconstituer entre Narbonne et Béziers. Au lieu de suivre la ligne droite, comme le fait à peu près la route moderne, la Via Domitia se détournait vers le Nord-Ouest, allait passer à l'emplacement même où les eaux de l'étang de Capestang ont persisté le plus longtemps. Là se trouve, au septième mille à partir de Narbonne, un pont romain qui a gardé le nom de pont Serme (Pons Septimus ?) et à partir duquel la voie subsiste en grande partie jusqu'à Béziers. De nos jours, cette voie romaine donne le singulier spectacle d'un chemin évitant la terre ferme pour aller passer dans l'eau. Il est nécessaire de supposer une situation inverse dans l'antiquité, c'est-à-dire d'admettre, non pas que l'étang de Capestang fût tout à fait desséché, mais que précisément cette partie qui est restée inondée jusqu'à nos jours était la plus étroite de toute la nappe d'eau à l'époque où la voie fut construite. Nous croyons vraisemblable que le Rubresus stagnus existait alors depuis Capestang jusqu'à la mer, sinon à l'état de lagune, du moins comme marais, et qu'il avait, sur la ligne droite de Narbonne à Béziers, une largeur plus grande que dans les environs du pont Serme. Le modelé du terrain achève de nous préciser les contours de cet étang. M. Lenthéric ayant exprimé la conviction que l’Aude coulait primitivement vers l’étang de Vendres et en avait été détourné par les Romains, on lui a opposé l'expression de Ptolémée : Αταγος ποταµοΰ έµβολάς, les embouchures de l'Aude, pour soutenir que ce fleuve avait toujours eu deux bras ; mais E. Desjardins, en produisant cet argument, n'a pas réfléchi que Ptolémée employait toujours les mots έµβολαί et έκβολαί au pluriel, et cela pour les fleuves dont l'estuaire est le plus net et le plus indivisible. Nous demeurons donc convaincu qu'à l'époque d'Annibal, l'Aude ne passait pas à Narbonne et se jetait dans le lacus Rubresus, au nord de la Clape. La région qui s étend de Narbonne à Salses n’a pas pu changer beaucoup depuis l'origine des temps historiques : le cordon littoral existait déjà, et le rivage intérieur des étangs côtoie encore les hauteurs où finissent les monts Corbières. La plaine du Roussillon, depuis Salses jusqu'aux Pyrénées, est d'une topographie assez simple, avec ses petits fleuves qui courent parallèlement vers la mer. Elle est cependant l'objet de théories excessives et que, à plupart du temps, un examen plus minutieux de la carte aurait fait écarter. On voudrait, en général, faire admettre que ces quelques ruisseaux, l’Agly, la Tet, le Réart, le Tech, la Massanne ont comblé, avec leurs alluvions, des espaces plus considérables que l'Aude, l'Orb, l'Hérault et le Rhône lui-même. Mais si l'on veut bien jeter les yeux sur la carte de l'état-major, on verra que les territoires prétendus modernes atteignent souvent des hauteurs de 8, 10, 12, 15 mètres au-dessus de la mer, d'une manière continue, ce qui doit écarter l'hypothèse d'une formation tout à fait récente par le colmatage. E. Desjardins, par exemple, pense que les alluvions de l'Agly ont comblé une partie de l'étang de Salses ; mais, s'il en était ainsi, c'est du moins à des temps préhistoriques qu'il faudrait reporter ce travail des eaux : la voie romaine allait

On sait qu'<strong>en</strong> 1320, ce grand barrage a été emporté <strong>et</strong> que le fleuve, quittant<br />

brusquem<strong>en</strong>t le lit que lui avai<strong>en</strong>t imposé les Romains, s'est rej<strong>et</strong>é vers l'étang<br />

<strong>de</strong> V<strong>en</strong>dres. Les atterrissem<strong>en</strong>ts ont donc été interrompus <strong>de</strong> ce côté p<strong>en</strong>dant dix<br />

ou douze siècles.<br />

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<strong>de</strong> suivre <strong>la</strong> ligne droite, comme le fait à peu près <strong>la</strong> route mo<strong>de</strong>rne, <strong>la</strong> Via<br />

Domitia se détournait vers le Nord-Ouest, al<strong>la</strong>it passer à l'emp<strong>la</strong>cem<strong>en</strong>t même où<br />

les eaux <strong>de</strong> l'étang <strong>de</strong> Capestang ont persisté le plus longtemps. Là se trouve, au<br />

septième mille à partir <strong>de</strong> Narbonne, un pont romain qui a gardé le nom <strong>de</strong> pont<br />

Serme (Pons Septimus ?) <strong>et</strong> à partir duquel <strong>la</strong> voie subsiste <strong>en</strong> gran<strong>de</strong> partie<br />

jusqu'à Béziers.<br />

De nos jours, c<strong>et</strong>te voie romaine donne le singulier spectacle d'un chemin évitant<br />

<strong>la</strong> terre ferme pour aller passer dans l'eau. Il est nécessaire <strong>de</strong> supposer une<br />

situation inverse dans l'antiquité, c'est-à-dire d'adm<strong>et</strong>tre, non pas que l'étang <strong>de</strong><br />

Capestang fût tout à fait <strong><strong>de</strong>s</strong>séché, mais que précisém<strong>en</strong>t c<strong>et</strong>te partie qui est<br />

restée inondée jusqu'à nos jours était <strong>la</strong> plus étroite <strong>de</strong> toute <strong>la</strong> nappe d'eau à<br />

l'époque où <strong>la</strong> voie fut construite. Nous croyons vraisemb<strong>la</strong>ble que le Rubresus<br />

stagnus existait alors <strong>de</strong>puis Capestang jusqu'à <strong>la</strong> mer, sinon à l'état <strong>de</strong> <strong>la</strong>gune,<br />

du moins comme marais, <strong>et</strong> qu'il avait, sur <strong>la</strong> ligne droite <strong>de</strong> Narbonne à Béziers,<br />

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Le mo<strong>de</strong>lé du terrain achève <strong>de</strong> nous préciser les contours <strong>de</strong> c<strong>et</strong> étang. M.<br />

L<strong>en</strong>théric ayant exprimé <strong>la</strong> conviction que l’Au<strong>de</strong> cou<strong>la</strong>it primitivem<strong>en</strong>t vers<br />

l’étang <strong>de</strong> V<strong>en</strong>dres <strong>et</strong> <strong>en</strong> avait été détourné par les Romains, on lui a opposé<br />

l'expression <strong>de</strong> Ptolémée : Αταγος ποταµοΰ έµβολάς, les embouchures <strong>de</strong> l'Au<strong>de</strong>,<br />

pour sout<strong>en</strong>ir que ce fleuve avait toujours eu <strong>de</strong>ux bras ; mais E. Desjardins, <strong>en</strong><br />

produisant c<strong>et</strong> argum<strong>en</strong>t, n'a pas réfléchi que Ptolémée employait toujours les<br />

mots έµβολαί <strong>et</strong> έκβολαί au pluriel, <strong>et</strong> ce<strong>la</strong> pour les fleuves dont l'estuaire est le<br />

plus n<strong>et</strong> <strong>et</strong> le plus indivisible. Nous <strong>de</strong>meurons donc convaincu qu'à l'époque<br />

d'Annibal, l'Au<strong>de</strong> ne passait pas à Narbonne <strong>et</strong> se j<strong>et</strong>ait dans le <strong>la</strong>cus Rubresus,<br />

au nord <strong>de</strong> <strong>la</strong> C<strong>la</strong>pe.<br />

La région qui s ét<strong>en</strong>d <strong>de</strong> Narbonne à Salses n’a pas pu changer beaucoup <strong>de</strong>puis<br />

l'origine <strong><strong>de</strong>s</strong> temps historiques : le cordon littoral existait déjà, <strong>et</strong> le rivage<br />

intérieur <strong><strong>de</strong>s</strong> étangs côtoie <strong>en</strong>core les hauteurs où finiss<strong>en</strong>t les monts Corbières.<br />

La p<strong>la</strong>ine du Roussillon, <strong>de</strong>puis Salses jusqu'aux Pyrénées, est d'une topographie<br />

assez simple, avec ses p<strong>et</strong>its fleuves qui cour<strong>en</strong>t parallèlem<strong>en</strong>t vers <strong>la</strong> mer. Elle<br />

est cep<strong>en</strong>dant l'obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> théories excessives <strong>et</strong> que, à plupart du temps, un<br />

exam<strong>en</strong> plus minutieux <strong>de</strong> <strong>la</strong> carte aurait fait écarter.<br />

On voudrait, <strong>en</strong> général, faire adm<strong>et</strong>tre que ces quelques ruisseaux, l’Agly, <strong>la</strong><br />

T<strong>et</strong>, le Réart, le Tech, <strong>la</strong> Massanne ont comblé, avec leurs alluvions, <strong><strong>de</strong>s</strong> espaces<br />

plus considérables que l'Au<strong>de</strong>, l'Orb, l'Hérault <strong>et</strong> le Rhône lui-même. Mais si l'on<br />

veut bi<strong>en</strong> j<strong>et</strong>er les yeux sur <strong>la</strong> carte <strong>de</strong> l'état-major, on verra que les territoires<br />

prét<strong>en</strong>dus mo<strong>de</strong>rnes atteign<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t <strong><strong>de</strong>s</strong> hauteurs <strong>de</strong> 8, 10, 12, 15 mètres<br />

au-<strong><strong>de</strong>s</strong>sus <strong>de</strong> <strong>la</strong> mer, d'une manière continue, ce qui doit écarter l'hypothèse<br />

d'une formation tout à fait réc<strong>en</strong>te par le colmatage.<br />

E. Desjardins, par exemple, p<strong>en</strong>se que les alluvions <strong>de</strong> l'Agly ont comblé une<br />

partie <strong>de</strong> l'étang <strong>de</strong> Salses ; mais, s'il <strong>en</strong> était ainsi, c'est du moins à <strong><strong>de</strong>s</strong> temps<br />

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