annibal en gaule - L'Histoire antique des pays et des hommes de la ...

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ils pensent que ce qu'ils pourraient ajouter de frayeur à l'état de cette colonne suffirait pour la perdre. Ils parcourent en gens très exercés les endroits les plus impraticables le long des rochers à pic. Les Carthaginois avaient à lutter à la fois contre l'ennemi et contre le terrain, et ils combattaient plus entre eux que contre l'ennemi, chacun cherchant à se dérober au danger le plus vite possible. C'était surtout les chevaux qui jetaient le désordre dans la colonne et qui piétinaient, épouvantés par les cris discordants que les bois et les rochers répercutaient en les augmentant ; s'ils étaient frappés ou blessés, ils prenaient peur à tel point, qu'ils écrasaient une foule d'hommes et d'objets de toute espèce, et ce trouble précipita un grand nombre de victimes d'une hauteur immense, car ce défilé était escarpé et à pic de chaque c6té ; il y tomba beaucoup d'hommes en armes, mais surtout des animaux avec leurs charges. Malgré ce que ce spectacle avait de pénible, Annibal sut pourtant se contenir et garder son détachement immobile pour ne pas augmenter le désordre et la confusion. Mais voyant que sa colonne était coupée, et qu'il y avait à craindre que l'armée, privée de convoi, ne pût plus continuer sa route en bon état, il dévala des endroits élevés, et son attaque, culbutant l'ennemi, augmenta aussi quelque peu le désordre dans sa troupe ; mais ce tumulte cessa dès que le chemin fut dégagé par la fuite des montagnards ; bientôt tout le monde reprit sa marche, non seulement en toute tranquillité, mais presque en silence. Annibal prend ensuite l'oppidum, qui était la capitale de cette région, ainsi que les villages voisins, et il nourrit son armée pendant trois jours avec les troupeaux des captifs : n’étant plus gêné, ni par les montagnards, écrasés du premier coup, ni par le terrain, il fit pas mal de chemin dans ces trois jours. 34. — On arriva ensuite chez un peuple très nombreux pour un pays de montagnes ; là il ne fut pas attaqué ouvertement, mais faillit être pris par ses propres armes, la ruse et le mensonge, et dans des embuscades. Les chefs les plus âgés de leurs villes se rendent auprès de lui et lui disent : le malheur des autres leur a été un exemple utile ; et leur a montré qu'il valait mieux accueillir les Carthaginois avec amitié qu'avec violence ; ils feront docilement ce qu'il commandera. Qu'il accepte des vivres, des guides pour sa marche, et des otages pour garants de leurs promesses. Annibal ne les croyait pas trop légèrement, et ne voulait pas les repousser, de crainte de s'en faire des ennemis déclarés. Il leur répondit avec bienveillance qu'il acceptait les otages proposés ; il profita des vivres qu'ils avaient rassemblés eux

35. — Le lendemain, les barbares attaquaient déjà plus mollement ; les troupes se rejoignirent, et sortirent des gorges non sans pertes, mais en perdant plutôt des bêtes de somme que des soldats. Alors les montagnards, devenus moins nombreux, attaquent plutôt en brigands qu'en combattants, tantôt sur la tête, tantôt sur la queue de la colonne, suivant que le terrain s’y prêtait, ou que des traînards leur en donnaient l’occasion. Les éléphants, ouvrant la marche et conduits très lentement dans ce chemin étroit, procuraient une entière sécurité à la colonne aux points où ils passaient, car les montagnards n'osaient s'approcher de ces bêtes inconnues1. Le neuvième jour, on atteignit la crête des Alpes après s'être fourvoyé plusieurs fois dans des impasses, et s'être égaré, soit à cause de la mauvaise foi des guides, soit au contraire qu'on s'en méfiât et qu'on s'engageât d'autorité dans des vallons où l'on se croyait sur la bonne voie. On s'arrêta deux jours sur le col, et un repos fut donné aux soldats fatigués par les travaux et les combats ; quelques animaux, qui s'étaient échappés dans les rochers, parvinrent au camp en suivant les traces de la colonne. La neige se mit à tomber, car les Pléiades en étaient déjà à leur coucher, et elle vint ajouter de grandes craintes à l'épuisement dont les hommes étaient accablés après tant de maux. C'est sur un sol tout couvert de neige que, la colonne ayant rompu au point du jour, avança lentement ; la nonchalance et le découragement se peignaient sur tous les visages. Alors Annibal, devançant les enseignes, se porte sur un certain promontoire dont la vue s'étendait au loin et largement, y fait arrêter la troupe et lui montre l'Italie et les plaines du Pô s'étalant au pied des Alpes : ce n'était pas seulement les murailles de l'Italie, mais celles de Home même qu'ils franchissaient ; il n'y aurait plus que des plaines faciles à parcourir ; encore un combat, deux au plus, et ils tiendraient dans leurs mains, en leur puissance, la citadelle de l'Italie ! La colonne se remit en marche ; les ennemis ne l'inquiétaient plus que par des coups de main insignifiants, quand ils en trouvaient l’occasion. Au reste, la descente fut beaucoup plus difficile que n’avait été l'ascension, car le versant italien des Alpes est le plus court, et par suite le plus escarpé. Presque tout le chemin était raide, étroit, glissant : on ne pouvait éviter une chute, et si l'on chancelait tant soit peu, impossible de rester sur ses pieds ; bêtes et gens tombaient les uns sur les autres. 36. — On trouva ensuite à un rocher qui resserrait beaucoup le chemin et tellement lisse que c’est à peine si un soldat légèrement armé qui essaierait d'y descendre, y parviendrait en s’accrochant aux broussailles et aux arbustes qui en jaillissent. L'endroit était déjà naturellement escarpé, mais un récent éboulement 1 Elephanti, sicut prœcipites per aretas vias magna mora agebantur, ita tutum ab hostibus quacumque incederent (quia insuelis adenudi propius melus erat) agmen prœbebant. Nous avons traduit prœcipites par ouvrant la marche, bien que ce sens ne soit admis nulle part ; mais il nous parait qu'il est le seul admissible : 1° parce que prœcipites traduit le ύπάρχοι de Polybe ; 2° parce que le sicut... ita... indique une relation de cause à effet, et que, si les éléphants assurent le libre passage à la colonne, c'est qu'ils sont en tête. Il faut donc, ou bien que prœcipites agebantur ait le sens de étaient poussés en avant, ou bien que prœcipites ait été copié par erreur pour prœcipientes, prœcipui, ou tout autre mot ayant le sens que nous indiquons ; 3° il s'agit ici d'une troupe qui monte ; il n'est pas possible qu'on applique aux chemins l'épithète de prœcipites qui indique une descente rapide, comme l'a fait par exemple, M. Gaucher dans sa traduction de Tite-Live.

ils p<strong>en</strong>s<strong>en</strong>t que ce qu'ils pourrai<strong>en</strong>t ajouter <strong>de</strong> frayeur à l'état <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te colonne<br />

suffirait pour <strong>la</strong> perdre. Ils parcour<strong>en</strong>t <strong>en</strong> g<strong>en</strong>s très exercés les <strong>en</strong>droits les plus<br />

impraticables le long <strong><strong>de</strong>s</strong> rochers à pic. Les Carthaginois avai<strong>en</strong>t à lutter à <strong>la</strong> fois<br />

contre l'<strong>en</strong>nemi <strong>et</strong> contre le terrain, <strong>et</strong> ils combattai<strong>en</strong>t plus <strong>en</strong>tre eux que contre<br />

l'<strong>en</strong>nemi, chacun cherchant à se dérober au danger le plus vite possible. C'était<br />

surtout les chevaux qui j<strong>et</strong>ai<strong>en</strong>t le désordre dans <strong>la</strong> colonne <strong>et</strong> qui piétinai<strong>en</strong>t,<br />

épouvantés par les cris discordants que les bois <strong>et</strong> les rochers répercutai<strong>en</strong>t <strong>en</strong><br />

les augm<strong>en</strong>tant ; s'ils étai<strong>en</strong>t frappés ou blessés, ils pr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t peur à tel point,<br />

qu'ils écrasai<strong>en</strong>t une foule d'<strong>hommes</strong> <strong>et</strong> d'obj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> toute espèce, <strong>et</strong> ce trouble<br />

précipita un grand nombre <strong>de</strong> victimes d'une hauteur imm<strong>en</strong>se, car ce défilé était<br />

escarpé <strong>et</strong> à pic <strong>de</strong> chaque c6té ; il y tomba beaucoup d'<strong>hommes</strong> <strong>en</strong> armes, mais<br />

surtout <strong><strong>de</strong>s</strong> animaux avec leurs charges. Malgré ce que ce spectacle avait <strong>de</strong><br />

pénible, Annibal sut pourtant se cont<strong>en</strong>ir <strong>et</strong> gar<strong>de</strong>r son détachem<strong>en</strong>t immobile<br />

pour ne pas augm<strong>en</strong>ter le désordre <strong>et</strong> <strong>la</strong> confusion. Mais voyant que sa colonne<br />

était coupée, <strong>et</strong> qu'il y avait à craindre que l'armée, privée <strong>de</strong> convoi, ne pût plus<br />

continuer sa route <strong>en</strong> bon état, il déva<strong>la</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>en</strong>droits élevés, <strong>et</strong> son attaque,<br />

culbutant l'<strong>en</strong>nemi, augm<strong>en</strong>ta aussi quelque peu le désordre dans sa troupe ;<br />

mais ce tumulte cessa dès que le chemin fut dégagé par <strong>la</strong> fuite <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

montagnards ; bi<strong>en</strong>tôt tout le mon<strong>de</strong> reprit sa marche, non seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> toute<br />

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Annibal pr<strong>en</strong>d <strong>en</strong>suite l'oppidum, qui était <strong>la</strong> capitale <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te région, ainsi que<br />

les vil<strong>la</strong>ges voisins, <strong>et</strong> il nourrit son armée p<strong>en</strong>dant trois jours avec les troupeaux<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> captifs : n’étant plus gêné, ni par les montagnards, écrasés du premier coup,<br />

ni par le terrain, il fit pas mal <strong>de</strong> chemin dans ces trois jours.<br />

34. — On arriva <strong>en</strong>suite chez un peuple très nombreux pour un <strong>pays</strong> <strong>de</strong><br />

montagnes ; là il ne fut pas attaqué ouvertem<strong>en</strong>t, mais faillit être pris par ses<br />

propres armes, <strong>la</strong> ruse <strong>et</strong> le m<strong>en</strong>songe, <strong>et</strong> dans <strong><strong>de</strong>s</strong> embusca<strong><strong>de</strong>s</strong>. Les chefs les<br />

plus âgés <strong>de</strong> leurs villes se r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t auprès <strong>de</strong> lui <strong>et</strong> lui dis<strong>en</strong>t : le malheur <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

autres leur a été un exemple utile ; <strong>et</strong> leur a montré qu'il va<strong>la</strong>it mieux accueillir<br />

les Carthaginois avec amitié qu'avec viol<strong>en</strong>ce ; ils feront docilem<strong>en</strong>t ce qu'il<br />

comman<strong>de</strong>ra. Qu'il accepte <strong><strong>de</strong>s</strong> vivres, <strong><strong>de</strong>s</strong> gui<strong><strong>de</strong>s</strong> pour sa marche, <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> otages<br />

pour garants <strong>de</strong> leurs promesses. Annibal ne les croyait pas trop légèrem<strong>en</strong>t, <strong>et</strong><br />

ne vou<strong>la</strong>it pas les repousser, <strong>de</strong> crainte <strong>de</strong> s'<strong>en</strong> faire <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>en</strong>nemis déc<strong>la</strong>rés. Il leur<br />

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