Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris

en re len
Tansu Ciller
"LE REJET DES DOUZE ACCROIT
L'INTEGRISME EN TURQUIE"
L'Union ne veut pas entendre sa demande d'adhésion? Le Premier ministre turc passe
aux menaces. "Si je ne convainc pas, ce sera la défaite de l'Europe" et "mes
compatriotes vont se tourner vers l'opposition intégriste". La croisade continue.
'Adeux pas des Champs-Elysées, ce
jeudi 7 juillet dans la matinée,
l'hôtel George- V était gardé
comme une forteresse. En visite
privée à Paris, le Premier ministre turc, Tansu
Ciller, recevait dans sa suite le Premier
ministre israélien, Itzhak Rabin, accompagné
du ministre des Affaires étrangères Shimon
Peres, tous deux succédant au chef de l'OLP
Yasser Arafat. "It's a hot day", murmurent
les gardes du corps en poste dans le couloir
qui mène à la suite de Tansu Ciller. Pour un
jour, Paris était devenue une capitale méditerranéenne.
"l;e Premier ministre se rendra
en Israël en septembre, mais attendra la tenue
d'élections libres pour aller en Palestine; les
Israéliens viennent très nombreux en Turquie,
explique déjà, avant l'entretien, son
directeur de cabinet ; il faut dire que les
menaces terroristes leur font moins peur qu'à
d'autres."
De nouveau à Paris depuis le jeudi 21 juillet,
cette fois-ci invitée officielle du gouvernement
d'Edouard Balladur, Tansu Ciller
plaide encore et toujours pour l'entrée de son
pays dans le cercle européen. Depuis sept ans,
la Turquie frappe à la petite porte, sans succès.
Il s'agit cette fois-ci de faire monter les
enchères: "Si, aujourd'hui, je ne convainc pas,
ce n'est pas seulement moi qui échouerai,
c'est l'Europe entière qui sera perdante, ce
sera la défaite de l'Europe", tranche le Premier
ministre turc dans un excellent anglais
appris à l'université Yale.
Blonde, vêtue d'un très élégant tailleur blanc,
sa couleur préférée, cette nouvelle croisée a
bien étudié l'argumentaire: "Le défi de la
prochaine décennie sera la montée de l'intégrisme
musulman et sa confrontation avec
l'intégrisme chrétien", affirme Tansu Ciller
qui, cet hiver à Sarajevo, dénonçait l'indifférence
occidentale face aux Musulmans de
Bosnie. Aujourd'hui, seule cette héritière
d'Ataturk, le président fondateur, en 1923,
d'une république turque laïque et moderne
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dont elle revendique l'enseignement, représenterait
la voie de la conciliation: "Vous,les
Européens, vous ne pouvez pas rejeter indéfiniment
notre candidature alors que nous
sommes laïcs, démocratiques, anti-intégristes,
économiquement ouverts, libéraux." Et
d'enfoncer le clou: "Je vois bien qu'il y a un
rejet de la part de nos amis occidentaux, qui
se cristallise sur le sujet des droits de
l'homme. Tout cela accroît l'intégrisme en
Turquie. Mes compatriotes se retournent vers
moi et ils me disent: vous vous battez pour
vous intégrer à l'Europe et pour instaurer la
démocratie, et ils continuent de vous rejeter,
alors autant se tourner vers l'opposition intégriste."
Les atteintes aux droits
de l'homme au
Kurdistan? Cette dame
de fer balaie la question
d'un revers de main.
"Leurs étudiants viennent à Ankara et nous
leur faisons apprendre l'alphabet latin."
La France serait devenue aujourd'hui "le
meilleur soutien du gouvernement turc", dans
une bonne langue de bois diplomatique. En
raison peut-être des origines ottomanes
d'Edouard Balladur, citoyen d'honneur de la
ville d'Izmir, berceau de sa famille? Prudente,
le Premier ministre turc sourit, sans
acquiescer, et enchaîne: "Les investisseurs
français sont venus en précurseurs, ils sont
très bien placés dans le secteur des télécommunications."
Et d'ajouter, moins convaincante:
"Nous avons aussi beaucoup de sites
touristiques qui sont très intéressants ... "
Dans sa croisade pro-europénne, Tansu Ciller
fait feu de tout bois. Candidats eux aussi à
l'entrée dans l'Union, les pays de l'Est agacent
prodigieusement notre Premier
ministre: "L'économie turque est beaucoup
plus compétitive que celle des pays du bloc de
l'Est, nous sommes entrés bien avant eux - il
Y a plus de dix ans - dans l'économie de marché.
Nous sommes en train de privatiser nos
télécommunications et beaucoup de nos
sources d'énergie."
L'Europe du Sud n'est pas plus épargnée par
cette battante, dont les arguments sont aussi
carrés que les gardes qui veiÎlent sur elle:
Pour elle, rejeter hors de l'Europe la Turquie "Nous possédons de bien meilleures infraserait
aussi rejeter les anciennes républiques structures que le Portugal, l'~spagne, ou la
musulmanes qui émergent de l'ex-Union Grèce." Ah, la Grèce! Voilà !bien où le bât
soviétique. Les liens tissés par ces pays avec blesse. A l'évocation de l'enne~ni héréditaire,
Istanbul sont solides: "Nous sommes très le visage aimable de Tansu Cil~erse durcit, le
proches d'eux en termes d'économie et de débit s'accélère. Sur le contentieux autour de
ressources naturelles, nous parlons souvent Chypre: "Nous avons tout laccepté, rien
les mêmes langues." La Turquie serait le, rejeté; cela a dû être un choc ~u côté grec."
meilleur des cicérones pour arrimer à l'Occi- Sur le tourisme: "Les Grecs propagent une
dent ces pays en gestation: "L'alternative de \ vraie désinformation à PropOS/del'insécurité
ces Etats, c'est la Turquie ou l'Iran. Or nous \ en Turquie, ce sont des concurrents
voulons coopérer avec nos amis sur des pro- \déloyaux." Sur la situation ,espective des
jets concrets et les amener vers la commu- \deux pays: "Les Grecs ont 0 )tenu des milnauté
européenne." Preuve de sa bonne liards et des milliards de dolla 'Sd'aides, sans
volonté pro-occidentale, cette bonne ambas- Barler des protocoles financielrs. Nous, nous
sadrice des républiques musulmanes ajoute: a,vons franchi, sans aide aucJtne, toutes les
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~~ENOUVEL E-~~;;~( 955-22io7/94
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