Table des matières Allard, Michel Mika Page 1 Beaudet-Bélanger ...
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Philip Courchesne<br />
Momification<br />
<strong>Page</strong> 52<br />
La mort était partout. Dans son être, dans sa tête ainsi que dans son corps. Seule son âme était intacte. Le<br />
médecin lui avait annoncé la semaine dernière que la mort évoluait à l’intérieur de lui, qu’un virus inconnu<br />
était né dans son organisme, qu’il ne lui restait pas plus qu’un an à vivre.<br />
Depuis, il n’existait plus. Martin était seul et isolé. Dans son appartement qui ressemblait de plus en plus à<br />
un taudis, l’odeur infecte <strong>des</strong> bouteilles de bière vi<strong>des</strong> et de son manque d’hygiène se faisaient sentir. Il n’y<br />
avait aucun son mis à part les ronflements de se dernier lorsqu’il s’endormait ivre mort. Même ses voisins<br />
d’étage dans l’édifice où il habitait étaient silencieux comme un fantôme, trop silencieux.<br />
Depuis un mois, trente jours, qu’il ne sortait plus. Ses réserves d’alcool et de nourriture étaient à sec. Il ne<br />
voulait pas mettre le nez à l’extérieur, consommer et s’apitoyer sur son sort était une tâche beaucoup plus<br />
facile, mais il devait sortir. Il attendit le soir, Martin prit son vieux manteau et sortit. Dehors l’air était frais,<br />
la lune était pleine et les rues tranquilles. Son objectif : aller au dépanneur le plus près. La route à pied fut<br />
plus longue que prévu, l’alcool ingéré ne l’aida en rien. Ses pas étaient lents, il était quelque peu désorienté,<br />
mais il se rendit tout de même à <strong>des</strong>tination.<br />
Martin poussa les portes en vitre et entra. Il y avait trois personnes à l’intérieur incluant le commis. Les gens<br />
se mirent à le fixer dès ses premiers pas. Il continua à avancer d’une démarche décisive et se dite que ça<br />
devait être l’odeur qu’il dégageait, car après tout il ne s’était pas lavé depuis longtemps. L’un <strong>des</strong><br />
consommateurs partit, décida de ne rien acheter, l’autre resta sur place muet comme une tombe. Martin prit<br />
de quoi manger, une caisse de bières et marcha vers le caissier. Il semblait apeuré, le caissier tremblait de<br />
tout son être, son visage est devenu pâle à la vue de Martin. Le mort sur pattes paya et sortit hâtivement.<br />
Soudain, le son du tonnerre se fit entendre et il se mit à pleuvoir violemment, Martin s’abrita sous un petit<br />
toit dans la ruelle la plus proche.<br />
Non loin de lui, une crevasse se remplissait d’eau. À l’intérieur se trouvait une pièce de monnaie brillante à<br />
la lumière de la lune. Martin s’approcha pour la prendre quand il vit dans l’eau le reflet d’un être putride. Ses<br />
yeux exorbités étaient remplis de sang, plusieurs lambeaux de peau pendaient de son visage cadavérique et<br />
ses dents étaient noires comme la nuit. Pris de panique il s’enfuit, il courut le plus vite possible malgré cette<br />
pluie battante et ses rafales de vent. Finalement à bout de souffle, il rentra chez lui.<br />
Son habitat devint son tombeau, bien vite il ne sentirait plus la faim ni la soif. Il prit les draps blancs de son<br />
lit, les coupa en bandelettes et se couvrit de la tête aux pieds. Le temps passa, le tissu et sa chair ne faisaient<br />
plus qu’un. Martin était mort, mais son âme demeurait intacte.