Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

Session 1 - Deuxième partie 97
Si elles ont été les plus durement frappées par la crise socio-économique, elles sont
de plus en plus nombreuses, en milieu urbain, à se retrouver, par exemple, chef de ménage.
Cette expérience de l’autonomie qui, paradoxalement, met en évidence la déconnexion
de leur rôle et de leur statut va aider à l’émergence d’un discours citoyen et
d'actions politiques qui ont eu pour cadre moins les partis politiques (que les secrétaires
généraux de partis m’excusent) que les associations et organisations de femmes.
De ce point de vue, la contemporanéité de la crise économique et de la libéralisation
politique, l’impact des différentes conférences des Nations unies relatives à la femme,
bien qu’impulsant de nouvelles stratégies de promotion pour cette dernière, n’ont pas
pu réellement initier la clôture du processus de marginalisation.
Cela dit, et c’est important, les conditions d’un discours articulé par les femmes et
pour leurs propres objectifs sont rendues plus favorables. Cette combinaison de facteurs
endogènes et exogènes va, profitant de la libéralisation politique avec l’ouverture
démocratique, rendre plus visible la femme africaine. On inaugure une phase où la
femme cherche à se penser, en dehors de tout lien d’assujettissement, à s’ériger en citoyenne,
surtout à user de sa capacité citoyenne. La femme africaine continue certes,
et tant mieux, d’évoluer dans des cadres classiques, comme les partis, les syndicats, mais
elle initie aussi, et c’est peut-être une nouvelle donne, espaces propres et autonomes
qui permettent la formulation de ses exigences tant par rapport à l’État, aux partis politiques
que par rapport à la société.
Ainsi, l’inclusion dans le développement par la citoyenneté et le genre va, de manière
fondamentale, s’articuler d’une part autour de la question de la représentation
politique, en convoquant les principes de justice et d’équité et, d’autre part, autour de
celle du droit. La problématique de la modernité nous intéresse parce qu'elle pose de
manière impérative la déconstruction du paradigme politique fondé sur l’exclusion,
notamment par le genre. Pour les femmes, il s’est agi, convoquant la démocratie, de
montrer que cette dernière repose à la fois sur la liberté et l’égalité.
Très souvent, en raison d’enjeux de pouvoir, la revendication a plus porté sur les différentes
modalités de la liberté – liberté d’expression, de manifester, d’organisation,
d’accès aux médias publics – en laissant de côté celles liées à l’égalité – devant la fiscalité,
dans les responsabilités par rapport aux enfants, dans l’espace public, dans l'accès
aux charges publiques, aux opportunités économiques, etc. Le silence par rapport à ces
questions d’égalité n’est pas fortuit. Elles interpellent, en effet, les fondements de la société
et, à travers eux, les rapports de genre qu’on a vite fait de rapporter à la tradition
ou à la culture, occultant leur soubassement économico-politique. Et le discours des
femmes a consisté essentiellement à démontrer qu’il ne pouvait y avoir de démocratie
et, partant, de développement durable, si on n’opérait pas une rupture avec ce qu’on a
bien voulu confondre avec de la tradition.
Stratégiquement, pour les femmes, la solution, ou en tout cas une partie de la solution,
ne pouvait se trouver que dans une présence dans les instances de décision, autrement
dit là où se formulent des politiques qui peuvent permettre un plein accès à la
citoyenneté. L’inclusion par le genre à ce niveau est loin d’être satisfaisante dans notre
sous-région si on observe simplement le nombre des femmes présentes dans les parle-