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Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

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Session 1 - Deuxième partie 95<br />

caines et <strong>du</strong> contexte socio-économique dans lequel elles évoluaient. Et l’action politique<br />

et économique s’est trouvée encadrée par une vision simpliste, entre tradition et<br />

modernité, dont rend compte toute une pro<strong>du</strong>ction littéraire et romanesque, en particulier<br />

africaine.<br />

Il s’est donc agi, pour l’élite politique et intellectuelle, de river la question <strong>du</strong> développement<br />

à un objectif de modernisation dont l’acteur principal devait être l’État,<br />

soutenu par tout un arsenal d’institutions, de ressources financières et humaines, de<br />

techniques de gouvernance importées <strong>du</strong> dehors et nourries à la sève de ce que l’on a<br />

appelé « les paradigmes dominants ». En érigeant la nation – ou sa fiction – comme<br />

principal destinataire, ce développement portait en creux les germes de son échec dès<br />

lors qu’il se privait, dans son principe même, de la formulation d’un certain nombre de<br />

questions politiques, parmi lesquelles développement par qui, pour qui, comment, en<br />

vue de quoi ? Et ces questions ne sont pas sans en rappeler un certain nombre d'autres :<br />

où va notre Afrique ? Où allons-nous ? Où devons-nous et où pouvons-nous aller ?<br />

Qui sommes-nous dans le monde d’aujourd’hui ? Pour moi ces questions sont encore<br />

d’actualité.<br />

Je voudrais aussi signaler, puisque j'ai parlé de crise de la pensée, que l’absence de<br />

ce questionnement principal explique sans doute le silence de chercheurs africains en<br />

sciences sociales sur la différence entre théorie de la modernisation et idéologie de la<br />

mission civilisatrice, justificatrice <strong>du</strong> colonialisme.<br />

En tout état de cause, l’entreprise de modernisation s’est finalement muée en une<br />

procé<strong>du</strong>re d’extension de la sphère d’influence de l’État avec, comme mode opératoire,<br />

un système d’allégeance politique des populations à l’État qui, en retour, se devait de satisfaire<br />

les besoins de ces dernières. Ainsi donc, la garantie des droits économiques et sociaux<br />

se faisait en contrepartie de la soumission politique. Ce pacte social n’est pas fondé<br />

sur les principes de l’égalité politique et de la représentation caractéristique de la modernité<br />

dont, pourtant, se réclament les États postcoloniaux. Ce pacte, en effet, a dépossédé<br />

les populations africaines de leur citoyenneté si l’on accepte de définir celle-ci comme<br />

l’appartenance à une communauté à laquelle des droits et des devoirs sont attachés.<br />

Il n’est pas besoin, en effet, de revenir sur la substitution des partis uniques et de<br />

l’autoritarisme politique à l’État mis en place dans nombre de pays de la sous-région (et<br />

même de la région), dans les premières années d’indépendance. Il faut croire que le<br />

double impératif de stabilisation des jeunes nations à l’intérieur de frontières artificielles<br />

héritées de la colonisation, et de réussite <strong>du</strong> développement économique a légitimé<br />

l’hypothèque sur certains droits liés à la citoyenneté politique, j’entends la liberté<br />

d’expression, de manifester, etc., etc. Il en est résulté une étatisation de l’espace public,<br />

avec un contrôle très strict des populations. L’Etat s’est désigné comme seul acteur politique<br />

et seul promoteur économique pour formuler les besoins des populations et décliner<br />

les moyens de leur satisfaction. Je ne reviendrai pas, pour étayer cet argument,<br />

sur des analyses très intéressantes sur la fonction <strong>du</strong> salaire, qui permettent de comprendre<br />

que si l’homme a été exclu comme citoyen, la femme l’a été doublement <strong>du</strong> fait<br />

d’un soubassement culturel qui a été entériné.<br />

On peut dire, en effet, que malgré l’implication massive des femmes dans la politique,<br />

malgré la création de ministères de la femme ou de secrétariats d’État à la femme,<br />

il n’y a pas eu de véritable remise en cause <strong>du</strong> rôle et de la position de la femme dans la

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