Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Afrique et Europe : néocolonialisme ou partenariat ?<br />
concepts de démocratie, de société civile, d'élections multipartites, d'État de droit, de<br />
bonne gouvernance, etc.<br />
Si ces concepts sont, d’une façon ou d’une autre, en rapport direct avec l’idée de citoyenneté,<br />
en quoi tra<strong>du</strong>isent-ils une nouvelle appréhension de la relation de l’indivi<strong>du</strong><br />
à la communauté en termes de droits et de devoirs, vus à travers le prisme de<br />
l’égalité ? Cette citoyenneté émergente interpelle-t-elle les relations de pouvoir au sein<br />
de la société ? En passant sous silence la dimension sexo-spécifique de la citoyenneté,<br />
procède-t-on à une remise en cause de l’exclusion dont les femmes ont été principalement<br />
les victimes ? Bien enten<strong>du</strong>, les approches théoriques et cadres d’analyse de la<br />
place de la femme dans le développement, de son intégration mettant en exergue la<br />
question de l’inégalité et de l’exclusion montrent que la relation de la citoyenneté au<br />
genre ne peut pas ne pas prendre quelques distances critiques par rapport à l’indivi<strong>du</strong>alisme<br />
abstrait de l’idéologie des Lumières.<br />
Alors comment prendre en charge le contexte social et le vécu des femmes dans les<br />
relations sociales par rapport à une telle problématique ? Il s’agit d’éviter le piège d’une<br />
« technocratisation » <strong>du</strong> genre en étant attentif à la culture, à l’articulation <strong>du</strong> privé et<br />
<strong>du</strong> public. Et si le développement donne naissance et légitimité aux discours <strong>du</strong> politique,<br />
on peut dire que ce dernier cherche aujourd’hui ses repères dans son aptitude à<br />
mettre en place une stratégie de ré<strong>du</strong>ction de la pauvreté. On dira que c'est une bien<br />
mince ambition, surtout dans un contexte de mondialisation caractérisé par une volonté<br />
hégémonique <strong>du</strong> néo-libéralisme ou plus exactement, d'un libéralisme à « géométrie variable<br />
». Cette nouvelle séquence historique est celle de la démocratie, de la féminisation<br />
de la pauvreté mais aussi, paradoxalement, et c’est intéressant, celle de l’implication<br />
très dynamique des femmes dans la revendication citoyenne de leurs droits, dans leur<br />
accès aux instances de décision pour remettre en cause les relations qui les assujettissent.<br />
Cette généralisation ne doit pas passer sous silence la situation de conflit que certaines<br />
zones de notre région connaissent. Il s’agira donc pour nous de voir que l’échec<br />
<strong>du</strong> contrat social post-colonial, qui a cherché à faire valoir un développement sans prise<br />
en compte de la citoyenneté et <strong>du</strong> genre, con<strong>du</strong>it aujourd’hui à la recherche d'une citoyenneté<br />
se déclinant au masculin mais aussi au féminin pour une participation plus<br />
équitable, au niveau politique comme au niveau économique. Et ici nous voudrions<br />
juste rappeler le fait que le développement qu’on a voulu obtenir par la modernisation<br />
n’a pas pro<strong>du</strong>it de la modernité en raison de l’exclusion dont il est porteur. Cette modernité<br />
sera-t-elle le fait d’une inclusion par la citoyenneté et le genre dans le développement<br />
? Le nouveau contexte dans lequel nous nous trouvons nous y aide-t-il ? C'est<br />
pourquoi je veux aborder maintenant un premier point : en quoi l'écroulement <strong>du</strong><br />
contrat social postcolonial a été exclusif de la citoyenneté et <strong>du</strong> genre.<br />
Nombre d’analystes de la réalité africaine ont souvent affirmé que la crise de<br />
l’Afrique est aussi une crise de la pensée sur l’Afrique. Ce constat a en effet pu être étayé<br />
par la question <strong>du</strong> développement qui n’a pas donné lieu, de la part des nationalistes,<br />
à un paradigme de rupture, pro<strong>du</strong>cteur d’une pensée endogène. En entérinant simplement<br />
le paradigme euro-centrique de développement, basé sur la croissance économique,<br />
l’attention de l’effort politique comme économique a plutôt été marquée par un<br />
défi de mimétisme, faisant abstraction des conditions particulières des populations afri-