Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

Session 1 - Deuxième partie 87
L'INDEPENDANCE
Nombreux sont les travailleurs africains, que ce soit au Nigéria, au Ghana, au Soudan,
en Tanzanie, en Guinée, au Mali, en Afrique du Sud, qui ont joué un rôle fondamental
dans les luttes pour l'indépendance. C'est le cas au Ghana, où les organisations
ouvrières et autres groupes nationalistes, conjointement avec le Convention People’s Party
dirigé par le Dr Kwame Nkrumah, ont joué un rôle prépondérant dans l'obtention de
l'indépendance de leur pays en mars 1957. Citons également le Nigéria et M. A.
O. Imoudu Président de ce qui s'appelait alors le Trade Union Congress of Nigeria
(TUCN), membre de la délégation du National Council of Nigeria and Cameroon
(NCNC) qui s'est rendu à Londres pour manifester contre les articles de la Constitution
Richards, et dont les projets de loi ont propulsé les organisations ouvrières à l'avantgarde
des luttes indépendantistes. En Zambie, la conquête de l'indépendance a été
menée par un vieux routier de la lutte syndicaliste, Kenneth K. Kaunda, qui a dû se battre
notamment contre le racisme de la suprématie blanche du gouvernement de la Fédération
de Rhodésie et du Nyassaland (actuellement le Malawi, la Zambie et le
Zimbabwe). On pourrait multiplier de tels exemples. La manière tout à fait remarquable
dont les syndicats ont dénoncé l'injustice sociale a permis d'améliorer la situation.
LES ANNEES QUI ONT SUIVI L'INDEPENDANCE
Cette époque se caractérise également par des défis importants. Les leaders syndicaux,
devenus membres du gouvernement, ont dû se conformer à la situation pour ne
pas être mis en difficulté. À cette époque, malgré l'interdiction des partis et autres associations
politiques, les syndicats ont survécu.
Après l'indépendance, conformément au dicton selon lequel « le mouvement syndicaliste
est le meilleur tremplin pour la fonction publique », les mouvements syndicalistes
africains ont perdu plusieurs de leurs leaders syndicaux, propulsés à temps plein
dans la politique et qui sont devenus chefs d'état, ministres, ambassadeurs, pour ne
mentionner que ces fonctions. Ils avaient fait la preuve, au cours des luttes pour l'indépendance,
de leur aptitude à être des dirigeants efficaces, les responsables politiques
ne pouvaient donc que se les attacher. La plupart d'entre eux sont devenus des artisans
du changement dans leurs secteurs de compétence respectifs.
L'époque postcoloniale en Afrique et dans d'autres pays du tiers-monde a ouvert la
voie à une modification fondamentale des relations de travail via la nationalisation des
industries et des services. Sur le plan du développement et de l'idéologie politique, plusieurs
pays ont estimé que le socialisme offrait plus de perspectives que le capitalisme
occidental qui les avait asservis pendant des années. C'est à cette époque que les mouvements
syndicalistes africains se sont trouvés confrontés aux idéologies des blocs capitaliste
et socialiste, qui formaient des travailleurs dans leurs écoles et leur attribuaient
des bourses, ainsi qu'aux membres des syndicats.
À peu près à la même période, plusieurs pays nouvellement indépendants ont
adhéré au pacte de non-alignement, sans rallier le bloc capitaliste ou le bloc socialiste,
mais en choisissant une troisième voie avec la Yougoslavie pour chef de file, option qui
a instauré des relations de travail permettant aux travailleurs d'adopter un modèle d'autogestion
à l'origine de la croissance économique des années soixante, source d'inspi-