Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

Session 1 - Deuxième partie 79
animé et géré par une direction politique triée sur le volet est constituée de gens formés
au rôle de fidéicommis rémunérés par une infime partie des revenus générés par
l’exploitation des sources de richesses des pays concernés.
Choisie principalement pour ne pas assurer le développement endogène et auto-entretenu
de leur pays, mais plutôt pour préserver et promouvoir les intérêts étrangers,
cette direction politique peu clairvoyante et peu efficace reçoit tout, idées et produits,
de l’étranger. L’organisation des pouvoirs publics et de l’administration générale, l’action
gouvernementale et législative sont des pâles imitations de ce qui s’y fait et de ce
qu’il veut.
Plus grave, cet État postcolonial institué au profit des forces et puissances étrangères
et sans la prise en considération des enjeux géopolitiques mondiaux et des défis de la
modernisation industrielle, est soutenu contre vents et marées de l’extérieur dans le but
de maintenir les populations dans l’ignorance, voire de les abrutir pour qu’elles soient
taillables et corvéables à merci.
Cette situation se caractérise par l’appauvrissement généralisé des pays africains et
le déclin de leurs sociétés dans les domaines politique, économique, social et culturel.
Devant la faillite de l’État post-colonial qui laisse les pays africains, espace et populations,
sans défense et à la merci de vastes forces et puissances ploutocratiques, la problématique
de la politique en Afrique soulève une terrible interrogation : est-il possible
de démocratiser et développer des sociétés dominées de l’extérieur comme le sont les sociétés
africaines d’aujourd’hui ?
Néanmoins, du moment que les Africains sont condamnés à se battre pour se réaliser,
s’imposent la conception et la construction d’un véritable État africain fort, et à
orientation démocratique avérée. Il servira comme instrument de sauvegarde des Africains,
de la protection de leurs indépendance et souveraineté, et surtout de moteur
pour leur mutation en sociétés industrielles modernes et prospères.
Il s’agit d’abord d’inculquer aux élites dirigeantes africaines le noble et véritable
objet de l’action publique ou de la politique, à savoir assurer le développement et réduire
les inégalités.
Ces élites, à l’heure actuelle, sont rares, extrêmement rares, à nourrir un dessein
collectif pour leurs peuples, préférant généralement se hisser au pouvoir uniquement
dans le but de jouir de ses délices en matière d’honneurs et de richesses.
À ce titre, elles se retrouvent intellectuellement incapables de penser l’Etat susceptible
de conduire le développement des sociétés africaines face aux nouveaux enjeux
géopolitiques mondiaux.
Le nouvel État africain ne saurait s’identifier entièrement à l’État de la démocratie
libérale tel qu’il existe aujourd’hui.
En effet, bien que fruit d’une longue évolution historique et d’âpres luttes des
couches populaires, l’État libéral s’attache à construire une société ploutocratique et
inégalitaire.
À l’inverse, comme instrument de modernisation et de développement des sociétés
africaines à l’ère de la mondialisation, l’État fort à orientation démocratique avérée
devra se donner comme fondements les dogmes et principes fondateurs de la république
et de la démocratie : la séparation des pouvoirs, la soumission des forces armées