Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Session 1 - Première partie 57<br />
LEÇONS CHINOISES<br />
Mais, au final, sa présence accrue en Afrique tra<strong>du</strong>it sa formidable renaissance, un<br />
exemple rare de réussite dans le monde en développement. À ce titre, la nouvelle donne<br />
chinoise est une source d’inspiration pour le continent.<br />
Elle lui permet de reprendre à son compte la manière dont la Chine a su utiliser son<br />
nationalisme comme un levier de libération nationale, puis de construction de l’une des<br />
économies les plus dynamiques <strong>du</strong> monde.<br />
Tour à tour, le Dr Sun Yat-Sen en 1911, puis Mao à partir de 1935, Deng,<br />
entre 1977 et 1997, et enfin les dirigeants actuels ont décliné diverses variantes <strong>du</strong> nationalisme<br />
chinois. La dernière version, celle de Hu Jintao et de ses collègues <strong>du</strong> bureau<br />
politique chinois où ne siègent désormais que de hauts cadres, est technocratique.<br />
La revitalisation de son nationalisme est directement liée à l’impératif de fermer la<br />
page de l’humiliation vécue par la Chine et qui s’était tra<strong>du</strong>ite, entre 1842 et 1945, par<br />
les traités inégaux qui lui furent imposés par les puissances étrangères.<br />
En s’extirpant de ce joug, en se stabilisant au prix d’un autoritarisme politique, en<br />
définissant les étapes de sa modernisation économique, à commencer par la décollectivisation<br />
de l’agriculture, l’adoption de mesures destinées à libéraliser les prix, et, enfin,<br />
en intégrant l’OMC, la Chine a avancé à son propre rythme. Elle prouve que le développement<br />
reste un phénomène endogène.<br />
La Chine actuelle a aussi réussi parce qu’elle a su mettre en place un mécanisme de<br />
sélection de dirigeants aptes et dotés d’une expérience de gestion concrète dans de<br />
grandes villes et provinces.<br />
Parmi les dirigeants chinois à qui attribuer ces succès, celui qui vient à l’esprit immédiatement<br />
est incontestablement Deng Xiaoping. Probablement le plus grand dirigeant<br />
de l’histoire contemporaine, n’eût été la tache laissée sur son parcours par la<br />
tragédie de Tiananmen, Deng est l’architecte des réformes en Chine. Bâtisseur hors<br />
pair, il a surtout été un homme capable de sacerdoce : au soir de sa vie en 1997, il n’était<br />
plus que le simple président de l’Association des joueurs de bridge. Le mécanisme de<br />
sélection des dirigeants qu’il a instauré permet, comme dans les grandes entreprises, de<br />
choisir des hommes et des femmes ayant fait leurs preuves dans la gestion de provinces<br />
ou de villes aussi peuplées que des pays, et de s’assurer par une limitation des mandats,<br />
avant que ce concept ne devienne populaire ailleurs, de ce que les dirigeants respectifs<br />
jouent leur part <strong>du</strong> théâtre, pour reprendre la formule de Shakespeare, et s’effacent au<br />
profit d’autres. Le temps des deus ex machina est révolu en Chine, mais les hommes et<br />
les femmes qui composent le bureau politique et les instances dirigeantes de l’État sont<br />
de première qualité. <strong>Les</strong> neuf membres <strong>du</strong> dernier bureau politique partiellement renouvelé<br />
en octobre dernier étaient tous ingénieurs, à commencer par Hu Jintao.<br />
La donne chinoise prend un relief encore plus net, rapportée au modèle démocratique<br />
occidental désormais en crise sur le continent, où il ne fait plus rêver en raison<br />
des manipulations constitutionnelles successives et des fraudes électorales à n’en plus<br />
finir qui émaillent sa mise en œuvre.<br />
Ses succès économiques restent cependant la plus forte source de légitimité <strong>du</strong> modèle<br />
chinois. Voici en effet un pays qui a refusé de suivre les prescriptions libérales des<br />
gourous <strong>du</strong> monde occidental, qui n’avait pas plus de deux personnes dans le bureau