Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Session 3 249<br />
marades n’échapperaient pas à la sentence. Voilà pourquoi ils ont pris l’initiative et ont déclaré<br />
à la classe politique, qu'ils ont réunie, « nous n’avons pas la légitimité à régler tous les<br />
problèmes ». Ils se sont attaqués simplement aux aspects démocratiques de la transition mais<br />
ont négligé les aspects essentiels, à savoir l’unité nationale et les problèmes des droits de<br />
l’homme, qui sont à l’origine <strong>du</strong> départ de Maaouiya Ould Taya. Il faut noter, ici, la complicité<br />
de la classe politique d’opposition dans cette affaire. Ces militaires alliés au pouvoir<br />
étaient contestés par l’Union africaine, l’Union européenne, la francophonie et l’ensemble des<br />
organisations internationales, qui condamnaient le coup de force. La classe politique avait<br />
compris que l'action de la seule opposition politique ne pouvait faire sauter le « goulet d’étranglement<br />
» Maaouiya Ould Taya et que cette action militaire était nécessaire. Mais nous ne<br />
sommes pas allés à l’essentiel. Il fallait imposer à ces militaires le règlement des vrais problèmes.<br />
Ils ne pouvaient s'y soustraire si l’opposition était déterminée à le leur imposer. Seulement,<br />
sur cette question essentielle que j’ai appelée la question nationale, l'opposition était<br />
divisée. C’est le fond <strong>du</strong> problème en Mauritanie.<br />
Pour terminer, j’ai oublié de me présenter. Je suis écrivain, journaliste de formation, j’ai été<br />
député à l’Assemblée nationale et candidat à la présidence de la République, où j'ai obtenu 8 %<br />
des voix. C'est un début ! Aujourd’hui je suis secrétaire général de l’Institution de l’opposition démocratique.<br />
Je ne voulais pas aller aux élections, c’est Albert Bourgi qui m’a dit en octobre : « il<br />
faut quand même essayer d’accompagner ce processus ». Mais le résultat est là, aujourd’hui on<br />
revient à la case départ. Le parti-État est en train de se reconstruire et la question de la garantie<br />
militaire de la transition n’est pas réglée en Afrique. Je l’ai dit récemment à Ouagadougou et<br />
personne n'en a tenu compte. Tant qu’on n’arrivera pas à régler la question de la garantie militaire,<br />
on ne réglera pas les problèmes de transition démocratique. <strong>Les</strong> militaires détiennent encore<br />
les leviers de commande et ils imposent ce qu’ils veulent. Ils ne sont pas disposés à appliquer<br />
un programme qui n’est pas le leur. »<br />
Jacqueline Mondeina (Tchad) : « On ne peut pas évoquer un débat juridique sur la<br />
Constitution et sur la Convention contre la torture, quand il y a une loi sénégalaise qui a<br />
incorporé les notions de crime de guerre, crime de génocide et crime contre l’humanité dans<br />
la législation nationale.<br />
Il n’y a pas lieu de revenir là-dessus, car c'est faire la part belle aux avocats de Hissène<br />
Habré, qui se saisiront de l’occasion pour évoquer la non-rétroactivité de la loi pénale. Dans<br />
notre cas, il n’est pas question d’évoquer cette non-rétroactivité. Sinon on n’aurait pas eu le<br />
procès de Nuremberg, on n’aurait pas eu le procès sur le Rwanda. Je crois qu’il ne faut pas<br />
évoquer l’amendement à la Constitution. Il faut, simplement, commencer l’instruction de<br />
l’affaire Hissène Habré parce que rien n'y fait obstacle. Tout le reste n'est que manœuvres dilatoires<br />
pour empêcher que ce dossier voie le jour.<br />
Je prends l’exemple <strong>du</strong> Tchad où nous avons choisi de mener notre combat sur deux fronts.<br />
Le front international, avec les plaintes contre la seule personne de Hissène Habré et, au Tchad,<br />
les plaintes contre ses sbires devant les juridictions <strong>du</strong> pays. Puisque le Tchad ne voulait pas juger<br />
Hissène Habré, il fallait nous opposer une loi relative à la création d’une cour chargée de le juger<br />
ainsi que ses complices. Une telle cour n’existe pas, mais on nous a quand même opposé cette<br />
loi pour déclarer l’incompétence des juridictions nationales tchadiennes. Nous avons démontré<br />
la non-existence de cette cour. Un huissier s'est ren<strong>du</strong> sur le terrain. Il m'a dit : « Madame,<br />
je n'ai pas constaté l'existence d'une telle cour ». J’ai rétorqué : « si il y a une loi qui l’a créée,