Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Afrique et Europe : néocolonialisme ou partenariat ?<br />
La globalisation est aussi financière. Elle met fin au cloisonnement des systèmes<br />
financiers nationaux dominés par des banques organisées en monopoles. Désormais,<br />
une concurrence mondiale se met en place, qui concerne à la fois les États, les institutions<br />
financières et les entreprises qui peuvent intervenir directement sur les marchés<br />
financiers. Le transfert de risques est pris en charge grâce au développement des marchés<br />
dérivés où s’échangent des instruments financiers de plus en plus sophistiqués,<br />
notamment à travers la titrisation, en fait des risques de prix. La libre circulation des<br />
capitaux ouvre la possibilité qu’une épargne constituée dans une monnaie donnée puisse<br />
être placée en achats de titres dans une autre monnaie. Ainsi s’organise un marché des<br />
changes dominé par les banques.<br />
Autrement dit, nous avons cherché à mettre en évidence deux phénomènes dialectiquement<br />
liés. D’une part, la globalisation qui s’appuie sur la baisse des coûts de transport<br />
des marchandises et la tendance au développement <strong>du</strong> commerce international<br />
depuis la Seconde Guerre mondiale et, à partir des années 1990, sur la révolution numérique<br />
qui baisse les coûts de transmission de l’information. D’autre part, les gouvernements<br />
des pays riches (surtout celui des États-Unis) et les classes qui les soutiennent<br />
ont pris conscience que l’internationalisation de l’économie représentait la seule issue<br />
à la crise économique ouverte dans les années 1970 par l’épuisement des gains de pro<strong>du</strong>ctivité<br />
de la dynamique fordiste, le rattrapage des États-Unis par l’Europe et le Japon,<br />
et l’ouverture croissante des économies sur l’extérieur. D’où des politiques économiques<br />
spécifiques qui ont lancé la globalisation financière (en favorisant l’épargne et son placement)<br />
en levant les restrictions aux échanges de capitaux, de devises, aux stratégies et<br />
aux comportements des entreprises, des banques et des institutionnels. J’appelle cette<br />
prise de conscience « mondialisation ». Elle a renforcé la globalisation commerciale par<br />
la mise en place de l’OMC et la globalisation financière à travers le développement des<br />
marchés dérivés. La constitution de zones de libre-échange, et plus particulièrement de<br />
l’Europe monétaire, participe de cette prise de conscience.<br />
La globalisation résulte de la poussée de la compétition à l’échelle mondiale. C’est<br />
le phénomène que Karl Marx avait dé<strong>du</strong>it de son analyse <strong>du</strong> mode de pro<strong>du</strong>ction capitaliste<br />
et que Lénine identifiait comme le stade suprême <strong>du</strong> capitalisme.<br />
Dans le Manifeste <strong>du</strong> Parti communiste, Marx écrit que « la bourgeoisie ne peut exister<br />
sans révolutionner constamment les instruments de pro<strong>du</strong>ction : ce qui veut dire aussi les<br />
conditions de pro<strong>du</strong>ction, c’est-à-dire aussi tous les rapports sociaux. Ce constant ébranlement<br />
de tout le système social, cette agitation et cette insécurité perpétuelle distinguent l’époque<br />
bourgeoise de toutes les précédentes. Tous les rapports sociaux, traditionnels et figés, avec leur<br />
cortège de conceptions et d’idées antiques et vénérables, se dissolvent ; ceux qui les remplacent<br />
vieillissent avant d’avoir pu s’ossifier. Tout ce qui avait solidité et permanence s’en va<br />
en fumée. Et la libre concurrence abat toutes les frontières. Le bon marché de ses pro<strong>du</strong>its est<br />
la grosse artillerie qui bat en brèche toutes les murailles de Chine et fait capituler les barbares<br />
les plus opiniâtrement hostiles aux étrangers. Elle entraîne la migration rurale vers les<br />
villes, ce qui constitue un formidable progrès, car, par là, elle a préservé une grande partie<br />
de la population de l’idiotisme de la vie des champs. […]. Par l’exploitation <strong>du</strong> marché<br />
mondial, la bourgeoise a donné un caractère cosmopolite à la pro<strong>du</strong>ction et à la consommation<br />
de tous les pays. À la place des anciens besoins satisfaits par les pro<strong>du</strong>its nationaux naissent<br />
de nouveaux besoins réclamant pour leur satisfaction les pro<strong>du</strong>its des pays et des climats