Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

Session 3 215
tution fait de ce dernier une personnalité inamovible, le président de la République a
procédé à son remplacement par décret.
Cette juridiction malmenée, bafouée, se trouve dans l’incapacité de dire le droit. Les
saisines pour violations des procédures légales et constitutionnelles sont déboutées. Les
membres de la chambre administrative de cette Cour s’évertuent à trouver des arguments
de forme souvent ridicules pour s’abstenir de se prononcer sur le fond, laissant
perpétrer des actes gouvernementaux illégaux.
LA MANIPULATION DES PROCESSUS ÉLECTORAUX
Les structures chargées d’organiser le recensement électoral sont entièrement aux
mains du pouvoir. L’appareil gouvernemental est largement représenté : au niveau central,
pas moins de six ministres dirigent les institutions qui le régissent. Pour fausser la
représentation de la société civile, on crée des organisations telles que la CASSIDHO
pour le volet droits de l’homme, ou la CLTT pour l’aspect syndical, avec pour seule raison
d’être le soutien aux initiatives présidentielles. Au niveau décentralisé, ce sont les
gouverneurs, préfets, sous-préfets, maires, chefs de canton, chefs de quartier et chefs de
village qui encadrent.
Pour une population d’environ 9 millions d’habitants, la Commission électorale
nationale indépendante annonce plus de 5,6 millions d’électeurs, alors que les statistiques
indiquent que la tranche d’âge de dix-huit ans et plus représente moins de 45 %
de la population totale, soit au maximum 4 millions.
Les électeurs sont répartis par bureaux de vote de façon très hétérogène. Environ un
tiers sont ainsi affectés dans des bureaux situés à 20 km et plus de leur lieu de résidence
ou de recensement. Cela suffit à les empêcher de voter et réduit le nombre de votants
effectifs.
La composition de l’organe de gestion des élections, la Commission électorale nationale
indépendante, est totalement inique, puisqu’elle ne prend pas en compte les
parties en lice, ni la parité pouvoir/opposition.
Dès lors que le gouvernement, dans toutes ses composantes et structures, est aux
mains du président de la République, tous ses représentants à la CENI sont ipso facto
représentants du président de la République. Concrètement, en octroyant de treize à
quinze membres au gouvernement, sans compter le siège attribué à son parti, le président
de la République s’attribue quasi la majorité des trente et un membres. Si l’on
ajoute les partis satellites qu’il propulse à l’Assemblée nationale, il peut compter sur la
complicité de l’écrasante majorité de l’organe de gestion des élections : vingt-cinq membres
sur trente et un, par exemple, pour les CENI chargées du référendum de modification
de la Constitution et de la présidentielle du 3 mai 2006.
Sa mission assignée étant clairement d’assurer la victoire du ou des candidats du
pouvoir, la CENI se livre à la falsification des résultats. Elle recourt pour cela à plusieurs
techniques.
- L’incorporation d’électeurs fictifs. Des bureaux fictifs sont tout simplement ajoutés
aux réels. Il leur est affecté des électeurs jusqu’à concurrence du surplus annoncé.
Les intitulés des localités (cantons, villages, quartiers, ferricks…) sont
transformés en bureaux.
- Le relèvement du taux de participation. Le taux réel de participation, très faible,