Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Afrique et Europe : néocolonialisme ou partenariat ?<br />
La démocratie au Tchad : un exercice impossible<br />
Ibni Oumar Mahamat Saleh<br />
Secrétaire général <strong>du</strong> Parti pour les libertés et le développement (PLD).<br />
Le processus électoral au Tchad est malheureusement totalement verrouillé par<br />
les gouvernants, assurant ainsi à Idriss Déby une présidence à vie. Tout observateur<br />
avisé parviendrait à cette conclusion : l’alternance y est impossible en raison de<br />
l’institutionnalisation de la fraude.<br />
PRÔNER LA DÉMOCRATIE ET INSTAURER UN RÉGIME<br />
AUTOCRATIQUE<br />
L’institutionnalisation de la fraude électorale tire ses racines dans la non-acceptation<br />
de la démocratie en tant que système de gestion de l’État et <strong>du</strong> pays. Le concept est<br />
perçu comme une exigence de la communauté internationale et des bailleurs de fonds<br />
pour des convenances idéologiques de pure forme. Le pouvoir de N’Djamena n’y adhère<br />
en apparence que pour satisfaire cette attente.<br />
<strong>Les</strong> élections sont considérées comme un vernis donnant une onction démocratique<br />
au pouvoir, pour ne pas être mis au ban de la communauté internationale. Ce n’est<br />
rien d’autre qu’un signe lancé à l’adresse de l’extérieur pour montrer qu’il est fréquentable.<br />
De ce fait, tous les organes de l’État sont instrumentalisés au service des intérêts exclusifs<br />
<strong>du</strong> chef. Il s’agit pour le président de la République d’instituer, sans le proclamer,<br />
un régime autocratique de type parti-État. L’accession aux postes de responsabilité est<br />
subordonnée à l’allégeance au président de la République ou à son parti, le MPS, les dirigeants<br />
<strong>du</strong> parti étant eux-mêmes désignés sous le contrôle <strong>du</strong> président. C’est le cas<br />
pour le premier ministre, les ministres, toute la hiérarchie des ministères jusqu’aux chefs<br />
de service, les gouverneurs, préfets, sous-préfets, maires et chefs de canton.<br />
<strong>Les</strong> services financiers (douanes, impôts et taxes, Directions <strong>du</strong> budget, ordonnancement,<br />
dépenses, trésoriers, caissiers, contrôle a priori et a posteriori) sont aux mains<br />
des très proches <strong>du</strong> président de la République, des obligés, ou mieux, des membres de<br />
son cercle familial. Il en va de même pour les grandes entreprises et les secteurs porteurs<br />
tels que les banques, les assurances, le coton, le pétrole, les travaux publics…<br />
En usant alternativement ou conjointement de la manipulation, de la corruption<br />
et de l’intimidation, le président de la République peut tout contrôler, au point de vider<br />
à l’envi lois et règlements de leur pertinence. Le déroulement <strong>du</strong> processus électoral se<br />
trouve ainsi vicié et perverti.<br />
LE CONTRÔLE DE L’ARSENAL JURIDIQUE<br />
Afin de se prémunir d’éventuelles contestations de la régularité et de la légalité de<br />
ses <strong>actes</strong>, le président de la République a veillé à s’assurer la maîtrise de la Cour suprême,<br />
la plus haute instance judiciaire <strong>du</strong> pays.<br />
Non seulement ses membres sont choisis par ses soins, <strong>du</strong> fait de sa mainmise sur<br />
les institutions, et ce quel que soit le mode de désignation prévu par la Constitution,<br />
mais il ne s’embarrasse même pas des dispositions constitutionnelles pour les installer<br />
ou les limoger, y compris le président de la Cour suprême. Ainsi, alors que la Consti-