Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

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210 Afrique et Europe : néocolonialisme ou partenariat ? fonction les responsables de campagne venus pour battre campagne dans leurs ressorts territoriaux. Les votes multiples et les « charters » de fraudeurs Les dernières élections législatives ont eu lieu le 6 mai 2007 avec toutes les fraudes permises par les insuffisances signalées précédemment. Ainsi, malgré l’encre « indélébile », certains ont pu voter plusieurs fois. Les bénéficiaires de cartes « achetées », ou des cartes de personnes décédées, ont eux aussi pu voter plusieurs fois. Des bus entiers (« charters ») de votants frauduleux ont circulé de ville en ville, ou se sont répartis dans les bureaux d’une même ville pour voter. Certains de ces « votants » titulaires de cartes soustraites ont même été débusqués dans certains bureaux de vote, puis confiés aux autorités chargées de la sécurité, lesquelles n’ont donné aucune suite à ces « flagrants délits ». Le refus d’inscrire les observations relatives aux irrégularités constatées Dans les bureaux de vote, certains partis étaient représentés par deux délégués au lieu d’un. Les présidents de bureaux de vote ont refusé systématiquement aux candidats de laisser inscrire sur les procès-verbaux les observations des candidats ou des superviseurs des partis ayant constaté des irrégularités. Les observations devaient être rédigées sur une feuille volante, et ils s’arrogeaient seuls la possibilité de les transcrire, ce qu’ils évitaient évidemment de faire par la suite. L’encre prétendument indélébile L’encre était prétendument indélébile. Mais beaucoup connaissaient les procédés pour en faire rapidement disparaître les traces sur les doigts. Dans certains bureaux de vote même, l’encre avait une consistance différente. Ceux qui voulaient opérer des votes multiples se sont ainsi bien moqués de « l’encre indélébile ». Les différences des décomptes d’un même bureau de vote par la CECI et par la CEPI Enfin, dans certains cas lors des élections législatives de 2007 (villes de Bobo-Dioulasso et de Banfora), des différences ont été constatées entre les décomptes des CECI et des CEPI pour les mêmes bureaux de vote ! Les autres pratiques frauduleuses du CDP Alors que la campagne électorale était close le 4 mai 2007 à minuit, on a noté que dans certaines localités, des activistes du CDP continuaient de faire campagne ouvertement le 5 mai. Dans la nuit du 5 au 6 mai, ils ont parcouru les concessions, distribuant du sel et des billets de banque aux familles afin d’acheter leurs voix. Le 6 mai au matin, ils se positionnaient sur certains chemins pour rappeler aux électeurs le logo
Session 3 211 qu’ils devaient voter. Certains disposaient même du bulletin de vote « pré-voté » en faveur du CDP, et même déjà « paraphés », qu’ils remettaient par avance aux électeurs pour éviter toute erreur et toute surprise. La cécité organisée des observateurs nationaux ou internationaux Depuis 1991, les observateurs internationaux, mais aussi nationaux, sont invités à observer « la régularité des élections ». Mais que peuvent voir des observateurs qui n’ont rien suivi, de toute la fraude préparée lors de l’établissement des listes et par la distribution de cartes d’électeurs peu fiables ? Arrivés souvent la veille du scrutin, généreusement invités ou pris en main par des «amis»qui sont tout simplement des hommes du régime, prisonniers pour certains des règles protocolaires ou diplomatiques, ne visitant au mieux que 0,5 % des 13 000 bureaux de votes, en passant moins d’une heure dans chacun d’eux, les observateurs internationaux sont la caution facile pour le « certificat de régularité » complaisamment accordé aux responsables de la fraude électorale. Quant aux observateurs nationaux, beaucoup dépendent pour le financement de leur mission, du bon vouloir de l’Etat ou de partenaires étrangers. Ainsi, en dépit de la bonne volonté et de l’honnêteté de certains observateurs nationaux et internationaux, le pouvoir arrive toujours à tripatouiller les suffrages parce que ses hommes de main s’y sont savamment préparés depuis de nombreux mois. LES PARTIS D’OPPOSITION ET LES ELECTIONS AU BURKINA FASO Sévèrement humiliée par le parti majoritaire, victime impuissante de ses fraudes et de sa mainmise totale sur l’administration, et sur l’organisation des élections, l’opposition répartie entre 1991 et 1997 dans une quinzaine de partis, va connaître son premier sursaut véritable après les élections législatives de mai 1997. Tous les partis, sauf celui du CDP, qui avaient espéré avoir des résultats honorables, en étaient revenus avec des scores minables : au total la dizaine des partis d’opposition qui avait participé au scrutin n’avait obtenu que quatorze (14) élus dont 4 pour le RDA, 6 pour le PDP (Parti pour la démocratie et le progrès) et 4 pour l’ADF (Alliance pour la démocratie et la fédération). À l’issue de discussions étalées sur six mois, les partis d’opposition, d’obédiences idéologiques et politiques diverses, s’entendirent pour créer un regroupement pour poursuivre les objectifs suivants : 1- l’instauration d’une véritable démocratie par la lutte pour des réformes institutionnelles (institution d’une CENI véritablement indépendante, réforme du Code électoral, indépendance de la justice, etc.) en vue d’obtenir des élections transparentes ; 2- la restauration des règles, méthodes et principes républicains dans la gestion de l’État ; 3- la fin de l’impunité qui favorise la mauvaise gestion, les détournements et les agissements criminels ; 4- le respect intégral des droits humains par tous ceux qui détiennent une parcelle du pouvoir.
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