Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Session 3 191<br />
de l'État en place depuis 1982 soit rééligible en 2011. Il vaut mieux s'y prendre à<br />
l'avance, surtout pour essayer de déminer le terrain à l'intérieur même <strong>du</strong> parti au<br />
pouvoir !<br />
De telles pratiques se sont généralisées et con<strong>du</strong>isent à dévoyer l'esprit de changement,<br />
notamment lorsqu'elles sont conjuguées avec la modification des lois électorales<br />
et l’adoption de modes de scrutin à un tour. Ces dérives rendent impossibles, ou très<br />
difficiles, les alternances au pouvoir, que les refontes ou les simples révisions constitutionnelles<br />
<strong>du</strong> début des années quatre-vingt-dix étaient censées faciliter. Dans un<br />
contexte où la prestidigitation constitutionnelle est de plus en plus fréquente, rares sont<br />
les pays qui font exception, et qui interdisent toute révision concernant la clause de<br />
limitation <strong>du</strong> nombre de mandats. On peut citer le cas de la Mauritanie, où la constitution<br />
de 2006 prévoit que le président jure sur le Coran devant Allah qu'il ne touchera<br />
pas à la disposition concernant le nombre de mandats et la <strong>du</strong>rée <strong>du</strong> mandat.<br />
Le tropisme présidentialiste puise sa force dans la faiblesse des moyens d'action des<br />
principaux acteurs <strong>du</strong> jeu démocratique et l'inexistence de véritables contre-pouvoirs<br />
qui constituent l'essence <strong>du</strong> pluralisme. Le risque de pérennisation des régimes en place,<br />
de non-fonctionnement et de non-viabilité <strong>du</strong> mécanisme d'alternance démocratique<br />
s’accentue avec un multipartisme dévoyé pour ne pas dire parfois de façade, et la<br />
persistance <strong>du</strong> réflexe de parti unique dont les méfaits sont amplifiés lorsque le chef de<br />
l'État cumule ses fonctions exécutives avec celles de chef <strong>du</strong> parti au pouvoir.<br />
La problématique des partis politiques est ainsi clairement posée. Elle surgit chaque<br />
fois qu'une crise politique éclate dans un pays et que nombre d'observateurs tentent<br />
d'en expliquer les raisons par les dysfonctionnements <strong>du</strong> multipartisme et l'échec <strong>du</strong><br />
système des partis. <strong>Les</strong> analyses se dispensent très souvent de mentionner la responsabilité<br />
<strong>du</strong> pouvoir en place, de pointer aussi les pratiques clientélistes, d’achat de<br />
conscience, de débauchage, bien éloignées des valeurs les plus minimalistes et de la<br />
notion même de la démocratie. Et si je n'adhère pas aux critiques portant sur le nombre<br />
trop important de partis politiques, je considère néanmoins que le caractère<br />
ethnique régionaliste pris comme facteur d’explication n’est pas pertinent.<br />
Il n'en demeure pas moins que les partis politiques en général, notamment ceux<br />
d'opposition, ont leur part de responsabilité dans les dérives actuelles, et ceux-ci pêchent<br />
tout d'abord par l'incohérence et l'absence de visibilité de leurs stratégies. Le système<br />
<strong>du</strong> parti dans son ensemble souffre de la pratique de l'entrisme gouvernemental :<br />
majorité élargie, majorité présidentielle, gouvernement d'union nationale. Celui-ci,<br />
concocté le plus souvent par les états-majors de parti, n'est pas de nature à clarifier les<br />
choix politiques des électeurs, et con<strong>du</strong>it à une désaffection à l'égard <strong>du</strong> politique que<br />
tra<strong>du</strong>it le faible taux de participation électorale au Sénégal pour les élections législatives,<br />
et au Mali de manière constante. Dans le prolongement de cette première<br />
explication, les partis politiques souffrent aussi d'un manque de cohésion sur le plan<br />
doctrinal et éprouvent généralement des difficultés à passer <strong>du</strong> stade de la contestation<br />
à celui des propositions. Si certains d'entre eux gagnent la bataille de la rue, ils ne réus-