12.07.2013 Views

Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Session 3 189<br />

années quatre-vingt-dix – c'est ce qui se passe encore aujourd'hui –, tout à la fois à des<br />

politiques qui ne répondaient pas aux attentes sociales de plus en plus pressantes, et aux<br />

tentations de restauration de l'ordre politique ancien, auquel succombaient les partis au<br />

pouvoir et ceux qui les incarnaient – et qui continuent à les incarner – à la tête des<br />

États.<br />

Sans pour autant prendre la forme de remise en cause radicale, ces dérives d'une ampleur<br />

inégale selon les pays, ont eu pour effet de saper les fondements des reconstructions<br />

politiques et institutionnelles <strong>du</strong> début des années quatre-vingt-dix, et surtout, de<br />

jeter le discrédit sur la sincérité des changements suivis par les pouvoirs en place, après<br />

le choc de la contestation postélectorale. Dès lors, la démocratie constitutionnelle<br />

prévue par les textes s’est de plus en plus identifiée à des artifices qui se confondent<br />

avec des élections où l'on se préoccupe d’abord de voir si le candidat officiel au pouvoir<br />

doit être élu au premier tour et se dispenser d'un second tour toujours périlleux.<br />

Ces artifices prenaient et prennent encore aujourd’hui la forme d'une manipulation<br />

des constitutions, notamment des dispositions relatives aux prérogatives <strong>du</strong> chef de<br />

l'État éten<strong>du</strong>es jusqu'à l'infini et parfois jusqu'à l'absurde, avec une ré<strong>du</strong>ction<br />

drastique de la fonction de premier ministre et des autres institutions de la République.<br />

Dans ce registre, il me semble que plutôt que de s'interroger sur le bilan des alternances,<br />

sur leur gestion issue des transitions démocratiques, et sur le respect des engagements<br />

électoraux, il est plus utile de réfléchir sur les pratiques politiques et<br />

constitutionnelles des pouvoirs en place, sur l'usage qui a été fait des règles qui ont permis<br />

à l'expression démocratique de s'épanouir, ainsi que sur les actions aujourd'hui<br />

déployées pour enraciner davantage le pluralisme. En réalité, quel que soit le bilan que<br />

l'on peut dresser de l'exercice <strong>du</strong> pouvoir, l'essentiel est de savoir si les conditions ont<br />

été préservées, et si elles sont toujours réunies, pour permettre au peuple souverain de<br />

se prononcer librement lors des échéances électorales et, le cas échéant, de sanctionner<br />

les dirigeants en place, eux-mêmes issus <strong>du</strong> suffrage universel. Il s'agit moins de mettre<br />

en doute la perception que les sociétés africaines ont de la démocratie – c’est le<br />

fameux relativisme culturel –, que d'établir la part de responsabilité des acteurs <strong>du</strong> jeu<br />

démocratique à l'épreuve <strong>du</strong> pouvoir.<br />

Gardons à l'esprit l’exemple <strong>du</strong> Bénin et <strong>du</strong> scrutin de 1996, où le chef de l'État<br />

sortant, Nicéphore Soglo, a été sanctionné par le suffrage universel, moins pour son<br />

bilan considéré comme bon sur le plan politique, économique et social, que pour son<br />

comportement suffisant. L'arrogance est sanctionnée par les méfaits de l'intrusion de<br />

sa famille dans le jeu politique. Et aux yeux des Béninois, ce premier président de l'ère<br />

démocratique n'avait tout simplement pas respecté le pacte moral et éthique qui avait<br />

été scellé lors de la conférence des forces vives de la nation en février 1990.<br />

En 2006, la maturité <strong>du</strong> citoyen béninois a permis quand même de déjouer les<br />

pièges ten<strong>du</strong>s par Mathieu Kérékou qui, manifestement, ne voulait pas partir. Au<br />

Sénégal également, en mai 2000, l'alternance a été davantage la conséquence <strong>du</strong><br />

phénomène classique de l'usure <strong>du</strong> pouvoir. Cela rappelle le fameux slogan de 1968 en

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!