Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

Session 3 187
à sa seule personne. Les changements politiques n'étaient guère le fruit des élections,
ils résultaient de coups de force, de coups d'État, de révolutions de palais, sans aucune
conséquence sur le fonctionnement autoritaire du pouvoir, voire sur la longévité politique
des dirigeants. Je vous renvoie à un certain nombre de pays, les uns sur un mode
caricatural – le cas du Togo –, d’autres sur un mode plutôt anecdotique – le cas du
Gabon.
La contestation du début des années quatre-vingt-dix a eu pour effet d'ébranler les
systèmes en place, sinon de les abattre. Et les changements ont suivi, qu'ils aient emprunté
la voie radicale des conférences nationales ou celle plus consensuelle des réformes
politiques prenant parfois la forme de concessions ou d'une simple application
des constitutions. Il ne faut pas oublier qu'au Cameroun ou en Côte-d’Ivoire, les constitutions
de l'Indépendance prévoyaient le multipartisme, sauf qu'aucun texte n’avait été
écrit pour régler précisément la question des partis politiques. Aucune loi n’ayant été
prévue, le parti unique était donc de fait constitutionnalisé.
Des réformes ont mis l'accent sur les moyens d'ouvrir la voie à la démocratie et à
son corollaire, le principe de l'alternance démocratique. Si l'on s'en tient aux conférences
nationales les plus significatives, celles du Bénin de 1990, du Mali et du Niger,
les questions institutionnelles autour du statut du Président de la République, de la réhabilitation
du suffrage universel comme mode de régulation, ont donné lieu aux plus
vifs débats. Les discussions ont porté ici ou là sur la nature du régime politique à mettre
en place : présidentiel, semi-présidentiel, voire même au Sénégal, les débats autour
de l'instauration d'une vice-présidence en 1992 et 1993, à la veille notamment des élections
générales de 1993.
L'une des principales préoccupations était de donner tout son sens au suffrage universel,
de mettre en place un régime politique qui serait plus respectueux des principes
de séparation et d'égalité des pouvoirs, d'instaurer des contre-pouvoirs, par un jeu de
contrôle, en particulier par le pouvoir judiciaire, et d'éviter ainsi tout retour à ce qu'on
appelait le présidentialisme, et à une concentration des pouvoirs entre les mains d'un
seul homme, chef de l'État et chef de parti. Dans le sillage de ces préoccupations, de la
contestation et d'un renouveau du constitutionnalisme ont été emportés des régimes qui
tentaient pour certains d'entre eux de se confondre avec le peuple. Sékou Touré affirmait
que le Parti démocratique de Guinée (PDG) était le parti de tout le peuple. Or,
il a fallu une simple déclaration d'un capitaine à Radio Conakry pour que le PDG disparaisse
complètement et qu'il n'y ait plus de parti unique.
Ainsi se sont produites certaines alternances démocratiques. Si elles ont, dans un
premier temps, concerné des pays qui ont connu des modes de transition radicaux,
elles se sont également étendues à d'autres États qui ont soit renoué avec le pluralisme
partisan, soit entrepris des réformes institutionnelles et surtout modifié les modes d'organisation
des processus électoraux.
Ce dernier point est capital tant l'Afrique a été le théâtre de mascarades électorales.
Au début, des progrès ont été enregistrés en matière de régularité des scrutins et les