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Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

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Session 3 183<br />

portent pas les garanties nécessaires. <strong>Les</strong> listes électorales ne sont pas fiables car les populations<br />

n’ont pas de carte d’identité ou bien celles-ci sont distribuées de façon aléatoire. <strong>Les</strong><br />

gouvernements n’appellent pas la population à s’inscrire sur les listes. Élaborées dans la précipitation,<br />

elles ne sont jamais affichées avant le scrutin comme le prescrit la loi. L’argent est<br />

devenu le principal argument <strong>du</strong> débat politique. <strong>Les</strong> candidats sont souvent en quête d’immunité<br />

parlementaire. <strong>Les</strong> agents locaux sont mal formés. <strong>Les</strong> documents électoraux – on<br />

trouve même des bulletins pré-votés déjà paraphés – sont distribués contre de l’argent à des<br />

responsables de partis. <strong>Les</strong> représentants des partis d’opposition signent contre rémunération<br />

des procès-verbaux de dépouillement vierges. <strong>Les</strong> recours auprès des cours constitutionnelle<br />

ou suprême sont impossibles car elles ne sont pas indépendantes. L’armée est<br />

chargée de ramasser les urnes.<br />

<strong>Les</strong> campagnes électorales sont biaisées. <strong>Les</strong> gouvernements procèdent à des inaugurations<br />

ou à des lancements de diverses infrastructures et chantiers avec une large couverture<br />

médiatique. <strong>Les</strong> partis présidentiels et les autres, parfois financés par le pouvoir, distribuent<br />

des tee-shirts, des pagnes, des ballons, des engins, de l’argent ou organisent de grands banquets.<br />

Il faut y ajouter les formations politiques constituées par des inconnus dans le but de<br />

capter la subvention d’État.<br />

<strong>Les</strong> observateurs internationaux très souvent encadrés par le pouvoir n’assistent pas à<br />

toutes ces étapes de la fraude qui se déroulent en amont <strong>du</strong> vote.<br />

La problématique des partis politiques et de leur inégalité est posée, avec pour corollaire<br />

la question <strong>du</strong> financement public de la vie politique. <strong>Les</strong> organisations civiles indépendantes<br />

<strong>du</strong> pouvoir sont frileuses à l’égard des partis d’opposition discrédités et ne veulent pas<br />

intervenir dans le champ politique, sauf en Guinée où les syndicats ont organisé la contestation,<br />

mais les résultats sont faibles, car ils n’ont pas vocation à assumer la responsabilité de<br />

l’organisation de toute la vie publique.<br />

Ce dévoiement de la démocratie structure deux États contradictoires comme au Tchad.<br />

Vis-à-vis de l’extérieur et des bailleurs, le gouvernement fait tout pour répondre aux normes<br />

exigées par les partenaires financiers étrangers, alors qu’à l’intérieur aucun principe ne guide<br />

ses actions. Le but inavoué y est de bâtir un Etat informel relevant <strong>du</strong> tribalisme où règne<br />

l’impunité.<br />

Au Mali, le consensus politique et la démocratie multipartiste y sont jugés exemplaires.<br />

Mais le gouvernement par une logique de captation des fonds sur le plan international alimente<br />

un clan d’affairistes, de politiciens, d’opérateurs économiques, qui bradent l’économie<br />

<strong>du</strong> pays (secteur minier, transport ferroviaire, foncier) aux dépens des populations dont<br />

le niveau de pauvreté ne baisse pas.<br />

<strong>Les</strong> progrès ne doivent pas être balayés d’un revers de la main. La Mauritanie est parvenue<br />

à sortir <strong>du</strong> cycle des putschs électoraux depuis 2005 ; mais des éléments de continuité<br />

per<strong>du</strong>rent et font émerger le risque d’un retour au parti-Etat sous le patronage <strong>du</strong> président<br />

de la République.<br />

<strong>Les</strong> sociétés africaines dans leur rapport au pouvoir à l’État s’approprient les ressorts de<br />

la démocratie, mais les règles d’équilibres font défaut. Pour fonder le vivre ensemble a-t-on<br />

besoin de « cousins plaisants » ou de citoyens ? Un gouvernement doit avoir en face de lui<br />

une assemblée exerçant le pouvoir législatif et un pouvoir judiciaire fort. Le continent gagne<br />

sa dignité en jugeant ses tortionnaires et les détourneurs de deniers publics. Mais au fond,<br />

la démocratie peut-elle advenir avec tant de pauvreté et d’inégalités ?

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