Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Enjeux ruraux et agraires en Afrique -<br />
<strong>Les</strong> responsabilités de l’Europe<br />
Synthèse<br />
Session 2 147<br />
Depuis les années 1960-1970, l’agriculture mondiale a connu des évolutions dont<br />
les conséquences socio-économiques, humaines, environnementales, bien qu’analysées,<br />
n’ont pas été considérées à leur juste mesure. La population africaine, encore à 70 %<br />
rurale, est touchée de plein fouet par une pauvreté endémique (60 à 70 % de la population<br />
en moyenne) qui s’explique par l’incapacité de tirer des revenus décents <strong>du</strong> travail<br />
agricole. Par conséquent, le nombre de personnes souffrant de la faim y croît plus<br />
rapidement qu’ailleurs. L’issue n’est-elle pas alors pour les Africains d’exporter clandestinement<br />
leur force de travail ?<br />
Le développement de l’agriculture intensive dans les pays riches, puis émergents, a<br />
creusé les écarts de pro<strong>du</strong>ctivité. <strong>Les</strong> plans d’ajustement structurel imposés par la<br />
Banque mondiale et le FMI ont démantelé les secteurs agricoles, encouragés le développement,<br />
déjà impulsé par la colonisation, des monocultures pour l’exportation. <strong>Les</strong><br />
mouvements de libéralisation des échanges ont apporté sur les marchés des pays en développement,<br />
des pro<strong>du</strong>its de première nécessité subventionnés, à bas prix, ne donnant<br />
aucune chance au maintien des cultures vivrières. L’aide publique au développement et<br />
les bailleurs de fonds ont affronté de nombreux revers (les projets étaient trop directement<br />
inspirés des agricultures européennes ou nord-américaines), puis ils se sont désengagés<br />
de l’agriculture.<br />
L’agriculture paysanne, ainsi que tout le monde rural et l’environnement sont désormais<br />
fragilisés, rendant l’autosuffisance alimentaire hors d’atteinte pour des pays africains<br />
devenus des importateurs nets de pro<strong>du</strong>its de première nécessité.<br />
La conjonction des crises climatiques, financières, énergétiques – les cours <strong>du</strong> pétrole<br />
continueront leur ascension, qui se répercute sur tous les secteurs économiques –,<br />
oblige à repenser fondamentalement l’économie des pays africains et à remettre au cœur<br />
des politiques publiques la ruralité et l’exploitation familiale paysanne pour sortir de la<br />
crise alimentaire, agraire et rurale. La Banque mondiale a en effet reconnu l’agriculture<br />
comme levier pour la ré<strong>du</strong>ction de la pauvreté dans son rapport 2007.<br />
<strong>Les</strong> risques politiques de conflit, de mouvements de population, engendrés par une<br />
urbanisation spontanée et l’expansion de l’habitat insalubre sont explosifs. La hausse des<br />
prix internationaux des pro<strong>du</strong>its agroalimentaires (36 % en 2007, selon la FAO) a provoqué<br />
des manifestations à Dakar. <strong>Les</strong> pays importateurs qui n’ont pas protégé leur<br />
agriculture vivrière par des droits de douane vont souffrir de graves pénuries. Il est illusoire<br />
de compter sur l’aide alimentaire car les puissances céréalières écouleront leur<br />
surplus pour profiter des prix élevés.<br />
Ce renchérissement des denrées a des causes conjoncturelles et structurelles. Par<br />
ailleurs, une proportion toujours plus importante des céréales et des oléagineux est destinée<br />
à nourrir des animaux et à abreuver des voitures. Ces prix pourraient baisser<br />
lorsque les exploitants agricoles <strong>du</strong> « Nouveau Monde » (Brésil, Argentine, Australie,<br />
Etats-Unis) auront élargi leurs surfaces cultivées. L’urgence sera alors de libérer les pay-