Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

Session 1 - Troisième partie 141
la Banque mondiale, ni de l’OMC. Et quelque soit le jugement que l’on porte sur la Corée
du Nord, le fait est que si elle dispose d’une capacité de résistance et de négociation face aux
États-Unis, c’est parce qu’elle est passée par une phase d’autarcie. On pourrait multiplier les
exemples, à l’image de l’Amérique latine et de Cuba. Prolongeons la réflexion en observant
ce qui se passe au niveau local, dans nos villages. Cela relève parfois de l’instinct de survie,
mais il y a des villages, notamment maliens, qui se protègent du système mondial, et même
de leurs États. Il nous faut étudier ces cas ; le passage à l’autarcie semble obligé quand on veut
se développer. »
Magatte Thiam (Sénégal) : « L’importance de la science et de la technologie dans le développement
humain est aujourd’hui acquise. La question pour nous est maintenant : comment
la réaliser ? J’aimerais que le professeur Mary Teuw Niane revienne sur les projets à
mettre en œuvre à cette fin. Leur présentation même semble poser problème, puisque les politiques
n’ont absolument pas pour ambition de résoudre les problèmes des populations. Que
font en ce sens nos syndicats, nos professeurs ? Ils disposent pourtant d’instruments adéquats
pour diffuser ces idées ! Aujourd’hui dans nos universités, tous les étudiants veulent faire des
masters tournés vers la finance. La communauté doit assumer sa responsabilité dans l’orientation
de l’éducation de sa jeunesse et de la recherche. Il existe par exemple des mathématiques
appliquées à la communication parlée, elles ne sont pas nécessairement destinées à la
finance.
En ce qui concerne l’UA, je ne peux m’empêcher de constater effectivement qu’au-delà du
contenu de classe de l’UE d’ailleurs sanctionné par les peuples, elle dispose d’un institut d’histoire
de sa construction. Cet aspect n’est pas laissé à la discrétion des gouvernements ou à de
grands programmes ; il y a une action intellectuelle et populaire dessus. M. Mairal parlait tout
à l’heure des territoires. Il faut souligner la formidable action, particulièrement en France, des
populations et des politiques pour articuler toutes les ressources en faveur de leur aménagement,
de l’éducation avec les Technologies de l'Information et de la Communication pour l'Education
(TICE), en s’appuyant sur les ressources de l’UE. Cela doit nous inspirer. »
Atebi Williams (Côte d’Ivoire) : « J’aimerais intervenir à propos de la pauvreté. Cessons
effectivement de lutter contre elle et battons-nous plutôt pour la croissance et la richesse
de nos populations. Les documents stratégiques de lutte contre la pauvreté forment à mon avis
une littérature d’acceptation psychologique, intériorisée, de cette pauvreté. Je demandais tout
à l’heure à mon voisin à quelle zone monétaire appartenait le Congo ; il s’agit du franc CFA
d’Afrique centrale. La Côte d’Ivoire, mon pays, relève, elle, du CFA d’Afrique de l’ouest. On
sait quelle est l’importance de la monnaie dans une économie. Avant-hier, un intellectuel camerounais
expliquait le rapport entre le CFA et l’euro. À mon grand étonnement, j’ai appris
que trois personnes, le général de Gaulle, son ministre des Finances M. Pleven, et celui
des colonies, M. Soustelle, s’étaient réunis pour décider, le 25 décembre 1945 de la création
du CFA. Rendez-vous compte ! Le parlement n’a même pas été consulté pour la création
d’une monnaie ! C’est également à ce moment qu’a été fixée sa parité. Alors quand aujourd’hui
on parle de croissance, de création d’emplois, il faut savoir par exemple que quand
un industriel sénégalais contracte un emprunt dans une banque pour développer son affaire,
le taux s’élève à 17 % ! En France, il n’est que de 4 %. Le Sénégalais ne peut jamais être compétitif
! Les banques centrales africaines ne font pourtant rien d’autre que d’acheter de la