Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Afrique et Europe : néocolonialisme ou partenariat ?<br />
comptabilisées dans l’APD, ont représenté jusqu’au quart <strong>du</strong> total de l’aide européenne<br />
en 2006 3 .<br />
Nous ne pouvons également passer sous silence que la France profite de sa coopération<br />
pour assurer des marchés à ses entreprises, dont une partie des investissements<br />
se retrouvent alors comptabilisée dans l’aide publique. L’aide per<strong>du</strong>re ainsi sous des<br />
formes nouvelles, et ces pratiques n’encouragent évidemment pas un développement endogène<br />
<strong>du</strong> continent et des pays africains.<br />
Artificiellement calculée, l’aide publique au développement est en outre de plus en<br />
plus utilisée comme une aide compensatoire servant à panser les conséquences de politiques<br />
commerciales destructrices. L’augmentation <strong>du</strong> FED (Fonds européen de développement),<br />
par exemple, doit en partie financer le volet développement des accords<br />
de partenariat économique, c’est-à-dire les coûts d’ajustement des réformes libérales<br />
imposées aux pays d’Afrique, Caraïbes et Pacifique (ACP) dans le cadre de la renégociation<br />
des accords de Cotonou !<br />
Au contraire de cette logique, il faut revoir fondamentalement les relations économiques<br />
et commerciales que l’Europe entretient avec l’Afrique. <strong>Les</strong> pays ACP n’ont pas<br />
tiré pleinement profit des accords de Cotonou, certains ont même été freinés dans leur<br />
développement. Mais les accords de partenariat économique proposés par l’UE pour<br />
remplacer le système de préférences commerciales initiales, non conforme aux règles de<br />
l’OMC, auraient des conséquences terribles pour les pays ACP : chute des recettes<br />
douanières, impossibilité de protéger leurs marchés, destruction des activités pro<strong>du</strong>ctives,<br />
principalement agricoles. <strong>Les</strong> APE incluent également la déréglementation des<br />
échanges dans les services, l’investissement, le crédit, l’assurance. Autant dire que cela<br />
ouvre des marchés prometteurs aux entreprises européennes, mais ré<strong>du</strong>it à néant la<br />
constitution d’entreprises, de banques, d’assurances, dynamiques en Afrique et susceptibles<br />
de soutenir les activités génératrices de revenus.<br />
En majorité, et à tous les niveaux de la société, les Africains ont rejeté la méthode<br />
même de négociation de ces accords, particulièrement déséquilibrée. Notre <strong>colloque</strong><br />
sera d’ailleurs l’occasion de faire le point sur la politique commerciale à instaurer entre<br />
l’Afrique et l’Europe.<br />
Car la question n'est pas seulement d’augmenter les échanges entre deux continents qui<br />
ont des niveaux de compétitivité si éloignés. Elle est d’abord de donner le droit aux pays africains<br />
de faire ce que les Européens ont fait eux-mêmes avec succès : protéger leur marché<br />
dans le cadre de marchés communs régionaux par le biais de droits de douanes conséquents.<br />
L’Europe doit apporter la garantie aux pays africains de pouvoir choisir leur propre mode de<br />
développement. Elle peut lui proposer plusieurs choix stratégiques qui servent le développement<br />
de l’Afrique.<br />
Dans la hiérarchie des priorités stratégiques, la valorisation <strong>du</strong> capital humain occupe la première<br />
place. Le premier objectif <strong>du</strong> millénaire pour le développement est d'éliminer l'extrême pauvreté et<br />
la faim dans le monde. En Afrique subsaharienne, 50 % de la population vit avec moins d'un dollar<br />
par jour. Comment combattre la pauvreté autrement qu’en permettant aux populations de vivre<br />
dignement d'un travail décent ? Il s'agit donc de leur assurer une activité qui génère des revenus.<br />
3 Voir la carte « Allègement de la dette des PPTE », Atelier de cartographie de Sciences Po, p. 145.