Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Session 1 - Troisième partie 131<br />
d’une politique étrangère commune qui permette de gérer ensemble une diplomatie et<br />
une défense autonomes. L’UE reste avant tout un marché très bien organisé. Elle risque<br />
de le demeurer d’autant plus que les pays issus de l’ex-bloc soviétique sont attachés au<br />
maintien <strong>du</strong> lien transatlantique.<br />
Si l’UE a réussi à valoriser les solidarités économiques afin de proposer un destin<br />
commun aux peuples européens, les Africains, en revanche, ont privilégié un autre versant,<br />
le politique, pour bâtir une solidarité sans cesse plus étroite entre leurs peuples.<br />
LES SOLIDARITÉS POLITIQUES AU CŒUR DE L’INTÉGRATION<br />
AFRICAINE<br />
À l’occasion de la première Conférence des peuples noirs tenue à Accra en 1958,<br />
Kwane Nkrumah, premier ministre <strong>du</strong> Ghana, prêcha l’unité immédiate <strong>du</strong> continent<br />
africain. Il allait proposer la mise en place d’un gouvernement central africain, avec<br />
pour objectif de mettre fin aux frontières héritées de la colonisation. Il affirmait que les<br />
différences ethniques, de culture, et de langue n’étaient pas fondamentales 6 . Soutenu par<br />
les représentants <strong>du</strong> Maroc, de la Tunisie, de l’Égypte, de la Libye, <strong>du</strong> Soudan-Khartoum<br />
et de l’Éthiopie, le Ghana entendait engager une politique africaine commune.<br />
À Casablanca, <strong>du</strong> 3 au 7 janvier 1961, ce groupe de pays progressistes et maximalistes<br />
dans leur vision <strong>du</strong> devenir <strong>du</strong> continent, alimenté par la Guinée-Conakry, le Mali et<br />
le gouvernement provisoire de la République algérienne, élabora une charte politique.<br />
À Monrovia, <strong>du</strong> 8 au 12 mai 1961, quelque vingt États modérés ne tardèrent pas à réagir<br />
en préférant une simple coopération interétatique à une intégration continentale immédiate.<br />
À ces deux visions de l’intégration continentale le président Barthélemy Boganda<br />
de la République centrafricaine et l’abbé Fulbert Youlou <strong>du</strong> Congo opposèrent leurs<br />
propres conceptions : une intégration passant par les regroupements sous-régionaux. Le<br />
premier penchait pour la création des États-Unis d’Afrique latine, le second pour les<br />
États-Unis d’Afrique centrale.<br />
Jaloux de leurs indépendances et incapables de dégager un dénominateur commun<br />
sur les grandes questions, les plus réalistes avancèrent l’argument selon lequel la faiblesse<br />
des solidarités africaines augurait mal d’une délégation de compétences à un gouvernement<br />
continental. À la lumière de ce jugement, l’Organisation de l’unité africaine<br />
fut créée en 1963 afin de lutter contre le colonialisme et de consolider l’espace étatique<br />
importé de l’Occident. L’OUA aura été absente <strong>du</strong> débat portant sur la création de richesses.<br />
Le traité d’Abuja, entré en vigueur en 1994 et créant un marché commun africain<br />
7 , fut un échec.<br />
L’incapacité de cette institution à opposer un bouclier aux maux qui minent le<br />
continent con<strong>du</strong>isit à son remplacement par un nouvel ordre juridique, l’Union africaine,<br />
entrée en vigueur le 26 mai 2001 avec pour finalité l’intégration politique, sociale<br />
et économique. La dimension économique allait dorénavant se conjuguer avec le<br />
volet politique, encore fallait-il que l’UA eût une vision concrète de l’avenir <strong>du</strong> conti-<br />
6 Kwame Nkrumah, L’Afrique doit s’unir, Paris, Payot, coll. Études et documents, 1961.<br />
7 Cf. Mahiou A. M., « La Communauté économique africaine », Annuaire français de droit international,<br />
1993, p. 798-819.