Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri
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Afrique et Europe : néocolonialisme ou partenariat ?<br />
Après le mépris et le paternalisme des colonisateurs, la dynamique endogène de développement<br />
scientifique risque de se rompre si nos États continuent à traiter ce secteur<br />
hors des règles universelles de rationalité, de compétence, de vision et de résultat.<br />
La science se fait en apprenant à la faire, c’est-à-dire avec des erreurs, des approximations<br />
et un peu de mimétisme. Ce n’est pas parce qu’il existe un logiciel performant sur<br />
le marché qu’il ne faudra pas essayer d’en concevoir un. Ce n’est pas parce qu’il y a une<br />
équipe ou une entreprise mondialement reconnue sur telle ou telle question scientifique<br />
qu’il faille, par souci de perfection ou sous l’injonction des bailleurs, lui confier<br />
les projets scientifiques au détriment des Africains inexpérimentés, car c’est ce qui les<br />
empêche de se faire la main et d’acquérir le savoir-faire indispensable à la maîtrise de<br />
questions cruciales pour notre destin.<br />
Le développement de la science et de la technologie rencontre d’énormes difficultés<br />
dans les pays africains. L’Afrique au sud <strong>du</strong> Sahara représente à peine 1 % de la<br />
pro<strong>du</strong>ction scientifique mondiale, et l’Afrique <strong>du</strong> Sud compte pour les deux tiers de<br />
cette pro<strong>du</strong>ction. La qualité intrinsèque de nos ressources humaines dans le secteur de<br />
la recherche n’est pas en cause. Malgré la faiblesse de leur nombre, l’insuffisance des ressources<br />
mises à leur disposition et la déficience de l’environnement de travail, les chercheurs<br />
restés au pays obtiennent des résultats de niveau international et sont publiés<br />
dans des revues de renom. Certains parmi eux reçoivent des prix et des nominations<br />
dans des sociétés savantes réputées. L’Afrique doit se défaire de tout complexe pour<br />
s’abreuver à la source vivifiante de la science et de la technologie, entre pangols et djinns,<br />
pour domestiquer la créativité dont elles sont porteuses.<br />
Dès lors que les modèles de développement autarciques ont échoué, que c’est dans<br />
l’interdépendance que réside notre salut, ne pas accorder à la science et à la technologie<br />
la même place que dans les pays <strong>du</strong> Nord revient à handicaper toute évolution de<br />
nos pays et à accepter la marginalisation définitive de l’Afrique. Aussi l’Afrique doit-elle<br />
réussir le défi de l’é<strong>du</strong>cation, de la formation et de la jeunesse en ce XXI e siècle. Il est essentiel<br />
pour nos pays de trouver les voies et moyens afin de bâtir une école adaptée, pour<br />
tous et tout au long de la vie. L’école doit devenir le catalyseur de toutes les énergies pour<br />
les orienter vers la construction d’une Afrique ambitieuse, conquérante, par-dessus tout<br />
généreuse et fière de participer à la compétition entre les peuples et les nations. Dans<br />
une telle perspective, l’enseignement des mathématiques, des sciences et des techniques<br />
occupe une place centrale. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’aux États-Unis la parution<br />
en septembre 2000 <strong>du</strong> rapport <strong>du</strong> célèbre astronaute John Glenn sur les mathématiques<br />
et les sciences dans l’enseignement, intitulé « Before it’s too late » (« Avant qu’il<br />
ne soit trop tard ») a suscité un débat national sur lequel chacun des candidats à la présidence<br />
de la République avait dû se prononcer. En revanche, la chute vertigineuse en<br />
Afrique des filières scientifiques et techniques dans l’enseignement secondaire laisse<br />
presque indifférents les décideurs publics et privés, les politiques et la société civile.<br />
<strong>Les</strong> images des enfants-soldats <strong>du</strong> Liberia, de la Sierra-Leone, <strong>du</strong> Ruanda et <strong>du</strong><br />
Zaïre, les reportages montrant des milliers d’enfants mourant de faim en Éthiopie et au<br />
Soudan, ces enfants de plus en plus nombreux à s’agglutiner dans les carrefours des<br />
villes à la recherche de la charité, ces mères si nombreuses à mourir en couches, ces<br />
jeunes qui assiègent les frontières des pays développés et en particulier ceux de l’Union