Les actes complets du colloque - Fondation Gabriel Péri

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114 Afrique et Europe : néocolonialisme ou partenariat ? souffrait du paludisme et des maladies pulmonaires, particulièrement de la tuberculose. En 1999, on a identifié 13 000 cas de sida contre 53 000 cas de paludisme (PNUD, 2000). Il serait donc judicieux pour combattre efficacement la pauvreté de combattre non seulement le sida, mais aussi les maladies comme le paludisme et la tuberculose. Sur les secteurs sociaux de base, la santé et l’éducation, les ressources prévues dans le programme 2000-2002 sont respectivement de 8,6 % et 3,8 %. Si on constate une amélioration des ressources dans le domaine de la santé, comparativement à la moyenne de 4 % pour les dernières décennies, en revanche, l’éducation est en chute libre. Le budget est loin des 12 % de la période 1960-1979. De telles prévisions ne feront qu’aggraver la situation déjà catastrophique de ce secteur de base. S’agissant de la croissance avec équité, un axe de grande importance manque, c’est celui de l’équité régionale. Or, si le pays connaît une grande instabilité politique (guerres de 1993, 1997, 1998, 1999), elle est essentiellement engendrée par les inégalités entre les régions et communautés ethniques, poussant les groupes politiques qui représentent les différentes entités régionales à l’accaparement du pouvoir politique comme moyen d’accéder aux ressources nationales, le marché étant considéré comme un instrument qui procure moins de ressources que l’État. La non-participation aux affaires publiques est perçue comme un facteur d’appauvrissement et d’exclusion par les groupes politiques. Si un des objectifs de la stratégie est de renforcer la paix civile, l’absence de politique axée sur le développement local et régional apparaît comme une des lacunes de la stratégie de lutte contre la pauvreté. La pauvreté est accentuée et entretenue par l’instabilité des institutions et les guerres civiles à répétition. La combattre à la racine nécessite de se pencher sur la question des inégalités régionales et ethniques. Cela contribuerait aussi à renforcer la démocratie qui est vitale pour les pays africains, dont la population est caractérisée par sa configuration multiethnique. En outre, les inégalités de revenus se sont nettement accentuées depuis les dernières mesures prises en 2000 (décrets des 5 juin et 1 er juillet 2000) et visant à accroître le salaire nominal moyen de certains cadres de l’État, comme les officiers de l’armée, les magistrats, les administrateurs des mairies. Ainsi, le salaire nominal des hauts fonctionnaires représente actuellement 25 fois celui du petit fonctionnaire alors que cet écart s’élevait à 10 fois avant cette date (Boungou Bazika et al., 2005). On sait que la distribution équitable des fruits de la croissance est conditionnée par le degré des inégalités sociales et notamment des salaires (Collier, Dollar et Stern, 2001). À Nkayi, par exemple, les inégalités relativement importantes tendent à accentuer la profondeur de la sévérité de la pauvreté. Si ces inégalités ne sont pas réduites, notamment par l’augmentation des bas salaires, il est alors dérisoire de parler de la croissance équitable. Tous ces aspects sont liés les uns avec les autres : une meilleure prestation des services de santé améliore non seulement la qualité de la vie des pauvres, mais aussi leur niveau d’éducation. Celui-ci favorise le développement local. Kanbur et Squire (2002) ont effectué une étude intéressante à propos des interactions des stratégies de lutte contre la pauvreté, ce qui éclaire mieux la conception des politiques visant à éradiquer ce phénomène. Ils montrent en effet que les actions menées dans un secteur comme l’éducation affectent aussi d’autres secteurs comme la santé, la nutrition, etc.
Session 1 - Troisième partie 115 b) La contrainte majeure de la dette extérieure La dette extérieure du Congo est estimée à 245 % du PIB et le service de la dette absorbe 70 % des recettes publiques (Banque mondiale, 2002 ; PNUD, 2001). Elle constitue une contrainte majeure. Le remède à apporter à la dette, à savoir sa réduction ou annulation, est un objectif poursuivi depuis 1994 et qui n’a pas encore connu d’aboutissement. Le Congo est dans la phase de négociation avec le FMI pour l’annulation de sa lourde dette extérieure afin de bénéficier de l’initiative PPTE. En Afrique centrale, seul le Cameroun a réussi à obtenir l’accord des institutions de Bretton-Woods pour faire partie de la liste des PPTE. Le problème de la dette a une incidence importante sur la stratégie de lutte contre la pauvreté car elle contraint le gouvernement à mener une politique restrictive d’affectation des ressources budgétaires aux secteurs sociaux, en particulier à l’éducation et à la santé, impuissante à redresser la situation chaotique de ces secteurs. La politique budgétaire des pouvoirs publics peut être décomposée en deux étapes : la première est celle qui va de 1960 à 1979 ; la deuxième de 1980 à aujourd’hui. Au cours de la première étape, la politique du gouvernement consiste à mettre l’accent sur les secteurs sociaux, en particulier l’éducation. En effet, la santé et l’enseignement absorbent respectivement en moyenne 8,9 % et 23,2 % des dépenses publiques. En revanche, au cours de la deuxième étape, la politique sociale marque un net fléchissement avec l’ajustement structurel dans les années 1990. Les dépenses publiques sont réduites systématiquement afin qu’elles s’ajustent aux ressources de l’État. Des coupes sombres sont effectuées lors du programme stand-by de 1994-1995, négocié avec le FMI. Cette politique restrictive conduit à d’importantes baisses budgétaires dans tous les domaines, y compris les secteurs de la santé et de l’éducation. Pendant la deuxième étape les dépenses de santé et d’éducation déclinent de moitié et passent respectivement à 4 % et 12 % en moyenne (voir tableau 6) 2 . Tableau 6. Niveau des indicateurs de stratégie de lutte contre la pauvreté au Congo Indicateurs (en moyenne) Période 1960-1979 1980-1999 Taux de scolarisation 64,2 % 70 % Taux de croissance du PIB/h 2,5 % 0,7 % Espérance de vie (en années) 45,29 50,72 Solde budgétaire/PIB -0,9 %* -7,8 % Dépenses publiques de santé/dépenses publiques totales 8 % 4 % Dépenses publiques d’éducation/dépenses publiques totales 23 % 12 % Enfants d’un an vaccinés contre la rougeole 85,9 % 76,7 % Cas de tuberculose pour 100 000 habitants 67 81 Ménages ayant accès à l’assainissement 45,6 % 36,6 % Source : Boungou Bazika et al., 2005. 2 Les chiffres ont été calculés par l’auteur à partir des données du PNUD 2000.
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