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III Tue-la-Mort - Bibliothèque numérique romande

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table. Il avait longuement regardé toutes choses autour de lui,<br />

les murs enfumés décorés d’images naïves, deux fusils suspendus<br />

au-dessus de <strong>la</strong> cheminée, à des cornes de chamois… les fenêtres<br />

gril<strong>la</strong>gées qui donnaient sur <strong>la</strong> cour, un petit escalier de<br />

bois à <strong>la</strong> rampe vermoulue qui conduisait directement de <strong>la</strong> salle<br />

aux chambres du premier étage… et puis il s’était replongé dans<br />

ses réflexions qui devaient être de plus en plus sombres, car les<br />

rides de son front, cependant jeune encore, paraissaient s’être<br />

creusées davantage.<br />

Quand on servit le repas, il y toucha à peine… Chaque fois<br />

que l’on ouvrait une porte, il regardait qui entrait. Puis tout lui<br />

redevenait indifférent. Canzonette finit par lui demander s’il<br />

n’était pas souffrant. Mais il secoua <strong>la</strong> tête, de <strong>la</strong> plus méchante<br />

humeur. L’enfant s’éloigna en murmurant :<br />

– Quel vi<strong>la</strong>in monsieur prêtre !<br />

Après le dîner, les <strong>la</strong>ngues s’étaient déliées… On commençait<br />

à raconter des histoires… Soudain, <strong>la</strong> porte qui donnait sur<br />

le petit escalier de bois s’ouvrit et l’on vit paraître maître <strong>Tue</strong>-<strong>la</strong>-<br />

<strong>Mort</strong>.<br />

Un grand silence se fit tandis que l’homme saluait ses hôtes<br />

d’un geste simple et cordial.<br />

Il était vêtu d’une peau de bique que serrait aux reins <strong>la</strong><br />

ceinture cartouchière. Une casquette poilue, dont les oreillettes<br />

étaient relevées, coiffait une tête aux broussailles grisonnantes.<br />

C’était une rude figure, mais d’une ligne noble et plutôt sympathique<br />

à cause de deux yeux aigus qui dévisageaient leur monde<br />

bien en face.<br />

Pour peindre cette tête à <strong>la</strong> fois aristocratique et sauvage, il<br />

eût fallu à l’artiste un art profond et subtil qui aurait fait <strong>la</strong> part<br />

de tout ce que cette physionomie pouvait exprimer dans le moment,<br />

mais aussi de ce qu’elle était capable de rendre en sentiments<br />

contraires dans l’instant qui al<strong>la</strong>it suivre. Les mille êtres<br />

– 24 –

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