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niiiiimi LE <strong>23</strong> SEPTEMBRE 19<strong>23</strong> ■■■■■■■iiiiiiiiiiiiimiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiimiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiMiiniHiiiiiii S iiiiiiiiiiMiiiiiiiiiiiiiiiiiimu iiiiiimmiiii ■iiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiniiiiiiiiiiiii EXCELSI DR-DIMANCHE »*<br />
N r—Ov ENDANT sa jeunesse, Louis Bonaparte<br />
j j passa plusieurs années en Italie,<br />
l^*-^ dont tout le Nord était sous la domination<br />
et la tyrannie de l'Autriche.<br />
J v Les sociétés secrètes étaient nombreuses<br />
; elles avaient pour but la<br />
délivrance du pays et la conquête de la liberté.<br />
Aussi, étaient-elles sympathiques à toute<br />
l'Europe libérale. La plupart de ces sociétés<br />
étaient rattachées aux Carbonari, chez qui on<br />
développait ce sentiment que, contre la force<br />
brutale de la tyrannie étrangère, toutes les<br />
armes étaient bonnes pour émanciper le peuple.<br />
Dans ces " ventes ", on liait tous les membres<br />
par des serments, enjoignant à ceux qui les<br />
prêtaient d'obéir aveuglément à ceux qui<br />
dirigeaient les mouvements insurrectionnels.<br />
Les attentats faisaient partie des moyens<br />
prévus et parfois ordonnés.<br />
Louis Napoléon Bonaparte avait prêté<br />
plusieurs de ces serments auxquels, comme<br />
bien d'autres, il n'attachait que l'importance de<br />
simples formalités, mais qu'on devait plus<br />
tard, quand il serait devenu empereur, lui<br />
rappeler d'une manière tragique. Car, presque<br />
tous les attentats dont il fut victime — et ils<br />
furent nombreux — viennent de là. Ils furent<br />
conçus en Italie et préparés à Londres, où<br />
l'Angleterre accordait aux conspirateurs un<br />
asile, ce qui troubla souvent les bonnes relations<br />
politiques entre Rome<br />
et Paris.<br />
On a sauvé des papiers<br />
saisis aux Tuileries, après le<br />
4 <strong>septembre</strong> 1870, un rapport<br />
très précis sur cettesituation,<br />
avec des indications sur<br />
les divers attentats qui précédèrent<br />
celui d'Orsini, le<br />
plus dangereux et le plus sanglant.<br />
Le 29 juin 1852, la police<br />
découvrit, dans une maison<br />
de la rue de la Reine-Blanche,<br />
près de la barrière de Fontainebleau,<br />
tout une fabrique<br />
de machines infernales destinées<br />
à une manifestation<br />
criminelle, préparée à Londres<br />
par des Italiens, et qui<br />
devait éclater au mois d'août.<br />
Tout une volumineusecorrespondance<br />
établissait le complot<br />
d'une façon indubitable.<br />
Six mois après, en janvier<br />
1853, on arrêta à Paris, des<br />
conspirateurs, un Allemand<br />
et deux Italiens, Kelsch, Galli<br />
et Rossi, qui avaient tous trois<br />
préparé leur action en Angleterre.<br />
Kelsch fut envoyé à<br />
Cayenne, où, quelque temps<br />
après, il obtint la grâce de<br />
l'empereur. II aurait fait,<br />
a-t-on dit, des révélations importantes<br />
sur d'autres complots<br />
en cours de préparation.<br />
En 1853 encore, un ancien sergent français,<br />
Boichot, qui avait longtemps habité Londres,<br />
où il était en relations avec les comités italiens<br />
recevant leurs inspirations de Mazzini, vint à<br />
Paris, où il fut arrêté avant qu'il ait pu exécuter<br />
ses projets. Il fut condamné.<br />
EN 1854, un exilé français, Magen, inventa<br />
des bombes qui devaient éclater par lesimple<br />
choc ; arrêté en Belgique avant qu'il ait pu<br />
pénétrer en France, il réussit à s'échapper, se<br />
réfugia à Londres et on le condamna, à Bruxelles,<br />
par contumace. La même année, on arrêtait<br />
à Paris, aux Batignolles, un Italien nommé<br />
Carpezza qui fut trouvé porteur de bombes<br />
du modèle Magen.<br />
On essaya de le comprendre dans une des<br />
organisations que protégeait Ledru-Rollin,<br />
mais cela fut impossible ; on ne l'en envoya<br />
pas moins à Cayenne, en août 1855, d'où il ne<br />
tarda pas à s'évader avec le consentement<br />
tacite, a-t-on prétendu, des autorités françaises,<br />
en exécution d'instructions que l'empereur<br />
aurait fait transmettre... mais cela n'a<br />
jamais été prouvé.^<br />
Pendant qu'on instruisait les deux affaires,<br />
Magen et Carpezza, on découvrit, sur le chemin<br />
de fer du Nord, une machine infernale comprenant<br />
des bombes du système Magen et qui<br />
devaient éclater sous le train impérial. Si<br />
l'attentat avait réussi, cette machine aurait été<br />
capable de détruire plusieurs wagons. La<br />
police prétendit que cet appareil avait été soit<br />
fabriqué, soit apporté sur la voie, par Louis<br />
Déron (de Lille), Vandomme, les frères Jacquin<br />
(de Bruxelles), d'Hénins et Desquines.<br />
Les quatre premiers furent condamnés à<br />
LES ROMANS DE LA VIE<br />
L'ATTENTAT D' O R S INI<br />
par JEÂM = BEKMÂED<br />
L'attentat d'Orsini où l'Empereur ne fut que très légèrement<br />
blessé, eut cependant un retentissement considérable. Les<br />
souverains se rendaient à la représentation de l'Opéra,<br />
quand, sur le passage du carrosse, éclatèrent plusieurs<br />
bombes. Ce complot, qu'avait tramé, avec plusieurs complices,<br />
Orsini, lui coûta la vie. Ce sont les circonstances<br />
du drame, l'arrestation du coupable et de ses complices,<br />
l'exécution de plusieurs d'entre eux et les précautions<br />
extrêmes prises par la police que nous conte ici Jean-Bernard.<br />
mort par contumace ; Déron put se sauver à<br />
Londres.<br />
Le 28 avril 1854, un Italien, Pianori, tira,<br />
presque à bout portant, deux coups de pistolet<br />
sur l'empereur, avenue des Champs-Elysées,<br />
et le manqua. Condamné à mort, il fut guillotiné.<br />
Un peu plus tard, trois Italiens, exécutant<br />
les ordres de comités secrets de Londres,<br />
Thibaldi, Grilli et Bartholotti, vinrent à Paris<br />
pour assassiner l'empereur. Ils furent arrêtés<br />
avant d'avoir pu mettre leur projet à exécution.<br />
Le rapport confidentiel dont nous parlons<br />
J<br />
été gravement blessés. Un des quatre chevaux<br />
de la voiture impériale avait été tué et c'est à la<br />
mort de ce cheval qu'on attribua le salut, tout<br />
à fait providentiel, du couple impérial. En<br />
tombant, le cheval imprimait un mouvement à<br />
la voiture vers la droite et l'éloignait de l'endroit<br />
où les bombes éclataient. Sans cela, le<br />
caisson eût été pulvérisé. Un des chevaux que<br />
montait un sous-officier se tenant à la portière,<br />
du côté de l'impératrice, avait "attrapé une<br />
grosse partie de la décharge ".<br />
Par un singulier hasard, au moment où se<br />
L'ATTENTAT CONTRE LA VIE DE NAPOLÉON III ET QUI JETA L'ÉPOUVANTE<br />
DANS PARIS LE 14 JANVIER 1858, A HUIT HEURES ET DEMIE DU SOIR<br />
Ce cliché est la reproduction d'une image d'Epinal de l'époque, conservée au Cabinet des estampes de la Bibliothèque Nationale<br />
rattache l'attentat d'Orsini du 14 janvier 1858<br />
aux précédents complots dont il ne serait que<br />
la suite. Comme les autres, celui-ci fut préparé<br />
à Londres et son exécution confiée à quatre<br />
Italiens.<br />
Il était 8 heures et demie du soir ; l'empereur et<br />
l'impératrice se rendaient en voiture à l'Opéra,<br />
alors rue Lepelletier, quand, au moment où ils<br />
allaient descendre, des bombes éclatèrent avec<br />
un bruit formidable. Il y eut un moment de<br />
panique. Lorsque le couple impérial réussit<br />
enfin à quitter sa voiture, on s'aperçut que la<br />
robe de l'impératrice portait de nombreuses<br />
taches de sang. Les deux souverains n'avaient<br />
que des éraflures, mais ils avaient échappé<br />
à la mort par le plus grand des hasards. Le<br />
maréchal Vaillant, ministre de la Guerre,<br />
écrivait, le lendemain, au maréchal de Castellane<br />
:<br />
L'Empereur a reçu une égratignure au<br />
bout du nez, ce n'est rien. L'Impératrice a<br />
reçu un petit éclat dans le coin interne de<br />
l'œil gauche ; l'œil est rouge, mais non douloureux.<br />
"Le panneau de la voiture a cinquante empreintes<br />
dont plusieurs ont traversé. Roguet<br />
(le général) a une forte contusion à la mâchoire<br />
et son paletot a été percé à fourrer le poing par<br />
le trou. "<br />
Quoique naturellement très émue, l'impératrice<br />
voulut assister, quand même, à la représentation<br />
où le public l'applaudit chaleureusement.<br />
Pendant que les artistes jouaient et chantaient,<br />
on procédait aux premières constatations.<br />
II y avait de nombreux blessés, cent quarante,<br />
et plusieurs tués, neuf.<br />
Les deux valets de pied et le cocher avaient<br />
passait ce drame, le cousin de l'empereur, le<br />
prince Napoléon, donnait une soirée au Palais-<br />
Royal et on jouait la comédie d'Alfred de<br />
Vigny : Quitte pour la peur.<br />
Les auteurs de l'attentat furent vite arrêtés ;<br />
c'étaient quatre Italiens : Orsini, Pietri et deux<br />
autres, qui reconnurent leur participation.<br />
Orsini était d'une bonne famille, remontant<br />
au XVII E siècle, famille dans laquelle il y avait<br />
des cardinaux. Il fut défendu par Jules Favre.<br />
Trois des participants furent condamnés à<br />
mort ; deux, Orsini et Pietri furent exécutés<br />
(13 mars). L'empereur voulait faire grâce, mais<br />
il en fut détourné par son entourage.<br />
Orsini avait toujours fait partie des groupes<br />
patriotes opprimés ; il était récemment sorti de<br />
la citadelle de Mantoue où les Autrichiens<br />
l'avaient longtemps détenu prisonnier. A peine<br />
libéré, il se rendit à Londres où furent fabriquées<br />
les bombes qu'il vint jeter sous la voiture<br />
de Napoléon III.<br />
Orsini semble avoir été un exalté, luttant pour<br />
un idéal ; l'indépendance italienne n'eut pas<br />
cependant de meilleur soutien que celui qu'il<br />
avait failli assassiner. Du fond de la prison, le<br />
condamné écrivait de longues lettres à l'empereur.<br />
Dans l'une d'elles, il lui disait :<br />
" Est-ce que je demande, pour la délivrance<br />
de l'Italie, que le sang des Français soit répandu?<br />
Je ne vais pas jusque là. L'Italie<br />
demande que la France n'intervienne pas<br />
contre elle ; elle demande que la France ne<br />
permette pas à l'Allemagne d'appuyer l'Autriche<br />
dans les luttes qui vont peut-être s'engager<br />
- ", ,<br />
Les événements de l'année suivante prouvèrent<br />
que la France alla beaucoup plus loin<br />
qu'Orsini le désirait, car les régiments français<br />
allèrent combattre l'Autriche et versèrent leur<br />
sang sans lequel l'indépendance italienne<br />
n'aurait jamais été obtenue.<br />
Quoi qu'il en soit, Orsini mourut avec<br />
beaucoup de courage et son dernier cri fut :<br />
" Vive la France ! et vive l'Italie ! "<br />
LE lendemain même de l'attentat, le précepteur<br />
du duc d'Aumale, M. Cuvelier-Fleury,<br />
qui était demeuré son ami et son conseil, lui<br />
écrivait, dans une lettre particulière :<br />
" L'événement est immense. II augmentera<br />
la solidité du trône impérial, si ce n'est sa<br />
sécurité. L'indignation qu'inspire justement un<br />
pareil crime, profitera à celui qui a failli de si peu<br />
en être la victime. Les machines infernales*ont<br />
beau voler en éclats et répandre la mort autour<br />
d'elles avec leurs débris : elles affermissent les<br />
princes qu'elles ne tuent pas. Le 3 nivôse, la<br />
machine infernale mettait le Premier Consul<br />
sur le chemin de l'Empire; Fieschi sauvait la<br />
monarchie de Juillet des excès de la presse<br />
démagogique.<br />
" L'attentat du 14 janvier fera serrer les rangs<br />
autour du nouvel empereur. C'est bien souvent,<br />
le châtiment des grands crimes que de tourner<br />
contre le but même que se proposaient les<br />
auteurs, et cela seul devrait en détourner les<br />
misérables insensés qui les conçoivent. "<br />
Cette lettre du confident<br />
le plus intime du duc d'Aumale<br />
fut lue par le Cabinet<br />
noir qui fonctionnait avec une<br />
inlassable activité, et fut communiquée<br />
à l'empereur qui<br />
aurait voulu en remercier son<br />
auteur, mais il ne le fit pas,<br />
ne pouvant avouer qu'on avait<br />
intercepté la lettre. Cependant,<br />
M. Cuvelier-Fleury<br />
s'étant présenté quelque<br />
temps après, Napoléon III fit<br />
vivement appuyer sa candidature<br />
par ses amis qui lui<br />
étaient opposés.<br />
Le duc d'Aumale répondait<br />
à son précepteur, deTwickenham,<br />
où il était exilé :<br />
" Je ne vous parle pas politique<br />
; le vent n'y est pas. Je<br />
n'ai, d'ailleurs pas besoin de<br />
vous dire combien j'ai horreur<br />
de l'assassinat et des tentatives<br />
semblables à celles qui<br />
ont si souvent menacé la vie<br />
de mon père. "<br />
Cet attentat changea toute<br />
la politique intérieure de la<br />
France. On demanda au corps<br />
législatif la loi de sûreté générale,<br />
qui donnait au gouvernement<br />
un pouvoir discrétionnaire<br />
sur les individus<br />
condamnés pour délits politiques.<br />
" Cette loi, a écrit M. Ducoudray,<br />
dans son Histoire à l'usage des<br />
écoles, ne fut point une lettre morte, et les<br />
emprisonnements, les envois en Algérie, recommencèrent<br />
comme au lendemain du 2 décembre.<br />
Le ministère de l'Intérieur fut confié<br />
au général Espinasse. On divisa la France<br />
en cinq commandements militaires donnés à<br />
des maréchaux, et le gouvernement tendit ses<br />
ressorts. "<br />
La police multiplia, naturellement, les précautions<br />
à la frontière et on alla jusqu'à<br />
saisir des balles pour le jeu de la pelote<br />
basque.<br />
A la douane, des produits venant d'Espagne,<br />
on examinait avec un soin spécial les caisses<br />
d'oranges expédiées en France.<br />
Toutes ces mesures n'empêchaient pas les<br />
complots de continuer et, en <strong>septembre</strong>,<br />
on saisissait à Saint-Etienne un caisson de<br />
bombes du même modèle qui avaient servi<br />
à Orsini.<br />
Nous avons dit que l'impératrice avait<br />
montré beaucoup de sang-froid, mais elle n'en<br />
avait pas moins éprouvé une impression forte<br />
et, quand elle traversait la foule en voiture, elle<br />
avait toujours peur d'un nouvel attentat.<br />
Cette crainte persista plusieurs années et deux<br />
ans après, en 1860, pendant un voyage que<br />
les souverains firent à Lyon, tandis que la<br />
voiture se rendait à l'Hôtel de Ville, un<br />
homme se précipita pour jeter une pétition<br />
dans le landau. L'impératrice fit un mouvement<br />
d'effroi :<br />
" C'est bien simple, a écrit le maréchal de Castellane,<br />
elle se rappelait les bombes d'Oi'snu<br />
devant l'Opéra. '<br />
JEAN-BERNARD.