Dispositifs, usage, publics : essai de typologie - BnF
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Cécilia <strong>de</strong> Varine,<br />
Plasticienne <strong>de</strong> formation, Cécilia <strong>de</strong> Varine est médiatrice culturelle <strong>de</strong>puis 1993 et prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong><br />
l'association Médiation culturelle <strong>de</strong>puis 2001 (www.mediationculturelle.net). Elle a d’abord travaillé au<br />
musée d’art contemporain <strong>de</strong> Lyon et à l’Institut d’art contemporain Villeurbanne où elle a conçu et<br />
animé, entre autres, les « Rencontres <strong>de</strong> mai – art et éducation » <strong>de</strong> 1996 à 2000 (actes disponibles).<br />
Depuis 1995, elle a exercé plusieurs missions au sein <strong>de</strong> l’équipe du musée <strong>de</strong>s Beaux-Arts <strong>de</strong> Lyon<br />
où elle est actuellement chargée <strong>de</strong>s outils d'ai<strong>de</strong> à l'interprétation.<br />
A travers ces différentes expériences professionnelles et associatives, elle a développé une réflexion<br />
sur les moyens d'un accompagnement <strong>de</strong>s <strong>publics</strong> dans l'appropriation et l'interprétation <strong>de</strong>s<br />
expositions et <strong>de</strong>s œuvres, et sur les enjeux d'un échange et d'une coopération entre populations et<br />
institutions culturelles.<br />
Table-ron<strong>de</strong> : <strong>Dispositifs</strong>, <strong>usage</strong>, <strong>publics</strong> : <strong>essai</strong> <strong>de</strong> <strong>typologie</strong><br />
Si l’on entend le terme « autonomisation » comme un processus dynamique pour une autonomie à<br />
construire, nous pouvons en effet constater que les musées travaillent actuellement à la facilitation<br />
d’une appropriation autonome par les visiteurs.<br />
Non que cette autonomie n’ait pas été imaginée dès le début <strong>de</strong>s musées, bien au contraire, mais<br />
l’approche <strong>de</strong>s professionnels <strong>de</strong> musée s’est, à cet égard, profondément transformée.<br />
Du visiteur fantasmé aux visiteurs réels<br />
En caricaturant, on pourrait dire que les anciens professionnels <strong>de</strong> musée imaginaient <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong><br />
visiteurs : ceux capables d’être autonomes complètement, et ceux ayant besoin d’un<br />
accompagnement. Le musée était pensé pour les premiers, tandis que <strong>de</strong>s dispositifs<br />
d’accompagnement étaient proposés aux seconds, mais exclusivement en groupe. On avait donc d’un<br />
côté le visiteur individuel imaginé comme « gentilhomme lettré » capable d’appréhen<strong>de</strong>r les œuvres à<br />
partir <strong>de</strong> son seul bagage culturel 1 , et <strong>de</strong> l’autre, <strong>de</strong>s visiteurs en groupe, suivant un « gui<strong>de</strong> » à même<br />
<strong>de</strong> leur transmettre les informations minimums pour apprécier « à sa juste valeur » un patrimoine<br />
sélectionné par les premiers. Dans ce contexte, un visiteur n’ayant pas les référents culturels<br />
appropriés étaient donc contraint d’accepter le groupe pour profiter un peu <strong>de</strong> cette institution et <strong>de</strong> ce<br />
patrimoine.<br />
Le travail <strong>de</strong> médiation mené <strong>de</strong>puis une vingtaine d’année au sein <strong>de</strong>s musées, la politique <strong>de</strong><br />
démocratisation culturelle (qui a tendance aujourd’hui à dériver fâcheusement en « politique<br />
d’audience ») et le développement <strong>de</strong>s nouvelles technologies ont profondément modifié la vision <strong>de</strong>s<br />
choses. Le « pédagogue » <strong>de</strong> musée, nourri par la rencontre avec les visiteurs, les recherches en<br />
sciences <strong>de</strong> l’éducation ou <strong>de</strong> la communication, la tradition d’éducation populaire, et une pensée<br />
muséologique humaniste, a inventé <strong>de</strong> nouveaux mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> médiation, imaginant les moyens d’une<br />
rencontre ouverte, et d’un partage <strong>de</strong> savoirs entre accompagnés et accompagnants.<br />
Mais aujourd’hui, si cette médiation participante est indéniablement plébiscitée par les visiteurs et <strong>de</strong><br />
nouveaux <strong>publics</strong>, d’autres outils doivent être proposés. Deux raisons principales à cela : il n’est pas<br />
possible aujourd’hui <strong>de</strong> répondre à une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> exponentielle d’accompagnement 2 (preuve que la<br />
diversification <strong>de</strong>s <strong>publics</strong> est effective, et que <strong>de</strong> nouveaux visiteurs osent passer la porte <strong>de</strong>s<br />
musées) ; les visiteurs <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt à pouvoir mener seuls, à l’heure qu’ils souhaitent et à leur rythme<br />
leur découverte du musée.<br />
Lâcher prise<br />
Mais comment faciliter un processus d’autonomisation qui, dans sa définition même, induit un lâcher<br />
prise <strong>de</strong> l’accompagnateur 23 ?<br />
Pour le médiateur culturel, la réflexion sur l’autonomie du visiteur dans sa découverte du musée passe<br />
néc<strong>essai</strong>rement par une réflexion sur le métier même qu’il exerce. Penser que les visiteurs peuvent se<br />
1 Seul le « cartel » (étiquette) près <strong>de</strong> l’objet ou sur son cadre était présent dès les premières présentations muséales. Le<br />
« gui<strong>de</strong> » (papier) également, rassemblant quelques informations basiques sur les œuvres. Ces <strong>de</strong>ux outils qui continuent<br />
d’exister nécessitent cependant, pour être eux-mêmes interprétés, un bagage culturel particulier, tant les informations y sont<br />
elliptiques.<br />
2 Il est néc<strong>essai</strong>re <strong>de</strong> rappeler ici que la première et principale autonomie rêvée par tout pédagogue est bien celle <strong>de</strong> la liberté<br />
<strong>de</strong> choisir. A commencer par le choix <strong>de</strong> venir ou <strong>de</strong> ne pas venir. Viennent ensuite d’autres choix comme celui <strong>de</strong> souhaiter<br />
être accompagné ou non, <strong>de</strong> visiter en groupe ou individuellement, etc.<br />
<strong>BnF</strong> – Actes du colloque Chemins d'accès : L’autonomisation, une école du visiteur ? – novembre 2008 – p. 1
passer <strong>de</strong> sa présence, c’est renoncer à un certain aspect <strong>de</strong> son activité, et à la gratification apportée<br />
par la rencontre avec les visiteurs. Comment penser sa propre disparition, si ce n’est en se décentrant<br />
par rapport à sa fonction ? Cette question est essentielle pour toute personne en posture<br />
pédagogique. L’éducateur, l’enseignant, le parent, travaille irrémédiablement à sa propre disparition.<br />
Comment permettre aux visiteurs <strong>de</strong> vivre leur autonomie, c’est-à-dire <strong>de</strong> gérer leur dépendances,<br />
dans un contexte muséal codifié, et face à <strong>de</strong>s objets souvent énigmatiques, voire muets pour<br />
beaucoup ?<br />
Présence absence<br />
Il s’agit donc d’accompagner sans être présent, <strong>de</strong> prévoir et d'imaginer un étayage invisible. Cela<br />
rappelle certaines figures <strong>de</strong> la mythologie grecque comme celle d’Athéna dans l’Odyssée. Athéna<br />
protège Ulysse. Elle est à ses côtés tout au long <strong>de</strong> son voyage vers Ithaque. Mais elle reste invisible.<br />
Ainsi en est-il <strong>de</strong> la posture à adopter, me semble-t-il, lorsque nous travaillons à la création d’outils <strong>de</strong><br />
médiation pour ai<strong>de</strong>r le visiteur à gérer ses dépendances. Nous composons <strong>de</strong>s instruments, <strong>de</strong>s<br />
documents, <strong>de</strong>s outils qu’il doit trouver simplement sur son chemin (<strong>de</strong> la préparation <strong>de</strong> sa visite en<br />
amont, à son potentiel désir <strong>de</strong> poursuivre la réflexion en aval), sans même s'en rendre compte, au<br />
moment où il en a besoin 4 .<br />
En reprenant le vocabulaire psychanalytique, cela renvoie aux concepts <strong>de</strong> « holding » et <strong>de</strong><br />
« handling » dont parle Winnicott. Le holding renvoie à la façon dont l'enfant est porté, soutenu,<br />
contenu, retenu, et qui déterminera le processus d'intégration, conduisant l'enfant à un état d'unité.<br />
Quant au handling, il désigne la manière dont l’enfant est traité, manipulé, soigné qui amènera<br />
l'installation <strong>de</strong> la psyché dans le soma (le corps) et le développement du fonctionnement mental.<br />
Ainsi en est-il <strong>de</strong> la fonction <strong>de</strong> médiation « en absence » (par opposition à la médiation « en<br />
présentiel », lorsque le médiateur accompagne physiquement le visiteur). Nous <strong>de</strong>vons mettre tout en<br />
œuvre pour que le visiteur soit soutenu dans sa démarche. Cela va <strong>de</strong> la signalétique directionnelle<br />
qui lui permet <strong>de</strong> se repérer facilement et <strong>de</strong> ne pas avoir à se préoccuper du cheminement physique,<br />
à la mise à disposition <strong>de</strong> textes ou autres éléments lui permettant d’approfondir un sujet, <strong>de</strong><br />
s’approprier les objets ou les œuvres à sa manière.<br />
Imaginer les possibles<br />
Mais là est bien la difficulté. Comment penser <strong>de</strong>s outils pour tous mais capables <strong>de</strong> permettre une<br />
appropriation singulière ? On sait que les visiteurs sont multiples, qu’ils ont <strong>de</strong>s <strong>usage</strong>s très divers <strong>de</strong><br />
l’institution. Chacun porte avec lui son bagage culturel et son désir singulier. Comment dès lors,<br />
proposer un outil suffisamment ouvert pour permettre l’appropriation et la naissance d’une<br />
interprétation soutenue mais non moins personnelle ? Car si l’on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> souvent aux visiteurs <strong>de</strong><br />
laisser leurs sacs à dos à l’entrée pour ne pas risquer d’abîmer les œuvres, qu’en est-il du sac à dos<br />
culturel que chacun porte en lui ? Il est essentiel <strong>de</strong> le gar<strong>de</strong>r avec soi. Il s’agit <strong>de</strong> sa boîte à outils<br />
personnelle, <strong>de</strong> son bagage symbolique. Dès lors, comment penser <strong>de</strong>s apports qui ai<strong>de</strong>nt le visiteur à<br />
utiliser ses propres outils, tout en étayant son cheminement avec les éléments qui pourraient peut-être<br />
lui manquer ?<br />
S’appuyer sur l’expertise <strong>de</strong>s visiteurs<br />
Mais pour savoir exactement ce dont le visiteur a besoin, n’est-il pas naturellement essentiel <strong>de</strong> lui<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r son avis ? De l’écouter, <strong>de</strong> l’observer ? De recueillir ses impressions, l’expression <strong>de</strong> ses<br />
peurs, <strong>de</strong> ses questionnements ? Les professionnels <strong>de</strong> la médiation le savent bien : il s’agit moins <strong>de</strong><br />
parler que d’écouter, moins d’offrir que <strong>de</strong> construire une réflexion partagée. Ainsi, on s’appuiera sur<br />
les multiples expériences d’accompagnement et <strong>de</strong> rencontres, mais également sur le réseau <strong>de</strong>s<br />
partenaires pour être à même <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s outils pertinents. Au-<strong>de</strong>là même <strong>de</strong>s visiteurs qui<br />
viennent déjà, il est important d’aller à la rencontre <strong>de</strong> ceux qui ne viennent pas encore. Ils sont peutêtre<br />
encore plus à même <strong>de</strong> nous informer sur leurs besoins et leurs attentes en termes d’accueil et<br />
d’accompagnement. Aux professionnels ensuite <strong>de</strong> proposer un fil rouge ininterrompu d’outils – du site<br />
Internet aux documents à emporter chez soi, du siège pour se reposer aux sources sonores ou<br />
4 Pour poursuivre le sillage mythologique, on constate dans l’Odyssée que les dieux invisibles ne sont pas tous d’accord.<br />
Certains ai<strong>de</strong>nt Ulysse tandis que d’autres amplifient ses malheurs et ses difficultés. Ainsi en est-il au sein <strong>de</strong> l’institution. La<br />
dispute entre les dieux <strong>de</strong> l’Olympe ressemble étonnamment à la dispute dans les coulisses <strong>de</strong> l’institution. Faut-il ai<strong>de</strong>r le<br />
visiteur ou faut-il l’éprouver dans son désir d’autonomie ? Les <strong>de</strong>ux visions se confrontent, surtout peut-être dans les musées<br />
d’art, encore fortement emprunts <strong>de</strong> la pensée malrusienne qui induit que la confrontation avec l’œuvre <strong>de</strong>vrait être suffisante<br />
pour « aimer ».<br />
<strong>BnF</strong> – Actes du colloque Chemins d'accès : L’autonomisation, une école du visiteur ? – novembre 2008 – p. 2
interactives dans l’espace d’exposition – pour que le lien <strong>de</strong> confiance soit soli<strong>de</strong>, entre les <strong>usage</strong>rs et<br />
l’institution.<br />
Expertise <strong>de</strong>s médiateurs<br />
En écho à l’expertise <strong>de</strong>s visiteurs à même d’orienter la démarche <strong>de</strong>s musées dans leur travail <strong>de</strong><br />
développement <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> médiation, il est néc<strong>essai</strong>re <strong>de</strong> reconnaître également l’expertise <strong>de</strong>s<br />
professionnels qui travaillent au quotidien avec les <strong>publics</strong>. Rencontrer les <strong>publics</strong>, échanger avec<br />
eux, se confronter aux difficultés <strong>de</strong>s personnes dans leur appropriation tant physique qu’intellectuelle<br />
<strong>de</strong>s savoirs produits par l’institution est une excellente école à qui veut produire <strong>de</strong>s outils. Être un bon<br />
« émetteur » n’est pas suffisant. Encore faut-il connaître les problèmes <strong>de</strong> réception. Il s’agit moins<br />
d’être dans une surabondance d’outils que dans la pertinence d’un travail en profon<strong>de</strong>ur sur les<br />
mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> communication ouverts à ceux qui viennent. Comment répondre aux questions <strong>de</strong>s visiteurs<br />
si on ne les a pas entendues ? Comment imaginer les difficultés <strong>de</strong> ceux que l’on n’a pas rencontrés ?<br />
Il y a donc une néc<strong>essai</strong>re coopération à développer entre scientifiques et médiateurs culturels autour<br />
<strong>de</strong>s projets portés par l’institution.<br />
Accompagner sans diriger<br />
Beaucoup d’autres questions se posent encore à celui qui conçoit les outils. La principale étant peutêtre<br />
celle-ci : comment ne pas enfermer par ces apports la lecture du lieu, <strong>de</strong>s œuvres ou <strong>de</strong><br />
l’exposition dans une seule approche ? Si pour ai<strong>de</strong>r à l’interprétation <strong>de</strong>s œuvres ou <strong>de</strong>s idées je<br />
propose <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> contextualisation historique, qu’est-ce que j’induis ? Est-ce que je ne suis<br />
pas en train d’enfermer l’objet à cet unique angle d’approche ? Si l’on doit éviter d’enfermer dans une<br />
règle du jeu, comment donner les règles du lieu ?<br />
Éloge <strong>de</strong> la simplicité<br />
Aujourd’hui, les nouvelles technologies sont souvent imaginées comme les solutions à tous ces<br />
problèmes. Chaque musée souhaite s’équiper <strong>de</strong> matériel « high tech » afin d’attirer les jeunes et <strong>de</strong><br />
proposer une multitu<strong>de</strong> d’approches au visiteur. Certains outils déjà anciens comme l’audiogui<strong>de</strong> ont<br />
montré leur capacité à accompagner le visiteur. L’outil est d’ailleurs suffisamment travaillé aujourd’hui<br />
pour permettre une véritable appropriation par les professionnels <strong>de</strong> musée.<br />
D’autres recherches ont montré que certains visiteurs sont sensibles à la dimension interactive (les<br />
jeunes en particulier) et que les nouvelles technologies permettent <strong>de</strong> déployer <strong>de</strong> nouveaux<br />
dispositifs qui peuvent être intéressants pour rendre accessibles <strong>de</strong>s informations ou permettre <strong>de</strong>s<br />
échanges et <strong>de</strong>s partages nouveaux au sein <strong>de</strong>s expositions.<br />
Mais ne nous y trompons pas : la visite <strong>de</strong> musée ou d’exposition reste avant tout une expérience<br />
physique où le corps en mouvement participe <strong>de</strong> l’intelligence à l’œuvre et <strong>de</strong> la construction du sens.<br />
Remplacer une fiche <strong>de</strong> salle que l’on manipule physiquement en se déplaçant par un poste<br />
informatique fixe canalisant l’attention et réduisant l’expérience physique et les échanges dans<br />
l’espace n’est pas forcément la meilleure solution. De plus, une partie importante <strong>de</strong> la population<br />
n’est pas encore très à l’aise avec les nouvelles technologies. Si le visiteur doit s’adapter aux outils en<br />
plus <strong>de</strong> l’adaptation néc<strong>essai</strong>re au lieu, cela risque <strong>de</strong> l’éloigner encore pour longtemps <strong>de</strong>s<br />
informations dont il a besoin.<br />
D’autre part, ces équipements coûtent cher à l’achat et à la programmation, et leur maintenance exige<br />
une souplesse institutionnelle pas toujours évi<strong>de</strong>nte dans le contexte actuel.<br />
Par ailleurs, il est néc<strong>essai</strong>re <strong>de</strong> penser à la formation <strong>de</strong>s professionnels <strong>de</strong>s musées à ces nouvelles<br />
technologies si nous ne voulons pas que les établissements entrent dans <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong><br />
dépendance vis à vis <strong>de</strong>s entreprises qui proposent <strong>de</strong>s produits séduisants mais souvent trop peu<br />
raffinés.<br />
Enfin, les équipements interactifs ayant un coût élevé, ils sont souvent imaginés par les financeurs<br />
comme <strong>de</strong>s sources <strong>de</strong> recettes, ou tout du moins, comme <strong>de</strong>s prétextes à un meilleur équilibre<br />
financier. Mais cela ne risque-t-il pas d’entraîner une confusion entre outils <strong>de</strong> médiation et produits<br />
dérivés ? N’oublions pas que la pédagogie fait partie <strong>de</strong>s missions fondamentales du musée, au<br />
même titre que la conservation. Pourquoi ferait-on payer les visiteurs qui ont besoin d’outils <strong>de</strong><br />
médiation plus cher que les autres ? Il serait extrêmement grave et dommageable <strong>de</strong> confondre ainsi<br />
les outils <strong>de</strong> médiation et les produits dérivés. Certains établissements ont déjà tendance aujourd’hui à<br />
indure cette confusion tant le prix <strong>de</strong> ces outils est élevé 5 .<br />
5<br />
On n’abor<strong>de</strong>ra pas ici le glissement actuel vers une marchandisation <strong>de</strong> ces outils qui <strong>de</strong>viennent également parfois le support<br />
<strong>de</strong> publicité ou le vecteur <strong>de</strong> communication pour les financeurs privés <strong>de</strong>s établissements.<br />
<strong>BnF</strong> – Actes du colloque Chemins d'accès : L’autonomisation, une école du visiteur ? – novembre 2008 – p. 3
Complémentarité n’est pas accumulation<br />
Un <strong>de</strong>s autres écueils <strong>de</strong> ces recherches autour <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> médiation est bien celui <strong>de</strong> vouloir en<br />
faire toujours plus. Au risque <strong>de</strong> la cacophonie, on accumule, on surajoute, et le visiteur se sent pris<br />
au piège d’une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> sources d’information. Est-il également néc<strong>essai</strong>re <strong>de</strong> segmenter encore<br />
une fois les <strong>publics</strong> ?<br />
Quoi qu’il en soit, et malgré toute la créativité et le professionnalisme en jeu dans la réalisation <strong>de</strong><br />
nouveaux supports, force est <strong>de</strong> constater aujourd’hui que le véritable travail <strong>de</strong> médiation à l’adresse<br />
<strong>de</strong> tous les visiteurs reste bien la visite accompagnée par un professionnel <strong>de</strong> l’institution, à même<br />
d’accueillir dans le sens fort du terme. Aucun texte ne saura s’adresser à tous, aucun jeu ne<br />
parviendra à enthousiasmer tous les enfants, aucune « mallette pédagogique » ne pourra remplacer<br />
l’extraordinaire inventivité à l’œuvre dans la rencontre et l’échange entre <strong>de</strong>s hommes.<br />
Échanger entre professionnels<br />
Il me semble néc<strong>essai</strong>re d’ajouter en conclusion, que <strong>de</strong>s journées <strong>de</strong> réflexion et <strong>de</strong> travail comme<br />
celle d’aujourd’hui sont essentielles pour avancer sur ces sujets. Une <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s difficultés<br />
rencontrées par les professionnels est bien celle d’être isolés. Or, chacun d’entre nous expérimente<br />
<strong>de</strong>s formes, les évalue. Il est néc<strong>essai</strong>re <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s lieux d’échange et <strong>de</strong> dialogue pour que nous<br />
puissions nous retrouver, partager ces expériences, et ne pas nous épuiser à repasser chacun par<br />
toutes les étapes du voyage.<br />
<strong>BnF</strong> – Actes du colloque Chemins d'accès : L’autonomisation, une école du visiteur ? – novembre 2008 – p. 4