Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
plan rapproché<br />
pour vivre heureux,<br />
vivons ensembLe<br />
quand Dominique et Renée Gilbon<br />
se sont installés au hameau de<br />
Mange-Pommes, à Ramonville,<br />
l’habitat participatif n’était pas<br />
encore à la mode. Pire, pour les élus, le concept<br />
n’existait pas. Quelques réalisations essaimaient,<br />
ça et là, en banlieue parisienne, ou encore à<br />
Lacroix-Falgarde, au sud de Toulouse. « Cette<br />
idée relevait des bases post-soixante-huitardes et<br />
alternatives », explique le retraité de 67 ans. C’est<br />
dans cette mouvance que Mange-Pommes a vu<br />
le jour. Plusieurs familles ont souhaité partager un<br />
territoire et des valeurs, au premier rang desquelles<br />
la solidarité et le respect de l’environnement, à travers<br />
la construction de maisons écologiques.<br />
Quand le couple s’y installe en 1985, il prend<br />
le projet en marche. Une dynamique se met en<br />
place autour d’espaces verts communs, de tondeuses<br />
à gazon et de fêtes partagées. « C’était<br />
un espace des possibles. » Dominique Gilbon<br />
n’est pas arrivé là par hasard. Toute sa vie a<br />
été marquée par l’anarchisme et le militantisme<br />
chrétien, dont la rencontre avec l’abbé Pierre fut<br />
l’élément déclencheur. Dominique est passé par<br />
le séminaire de Brignol près d’Orléans, avant de<br />
prendre ses distances avec le clergé. Il devient<br />
objecteur de conscience dans un bidonville de<br />
Noisy-le-Grand où il rencontre sa future femme,<br />
Renée, alors assistance sociale. « Un jour,<br />
nous sommes allés voir l’abbé Pierre, que nous<br />
connaissions, car nous ne supportions plus la vie<br />
au bidonville. Mais nous souhaitions continuer<br />
54 • <strong>Spirit</strong> Le caractère urbain<br />
à partager le mode de vie des plus précaires.<br />
L’abbé nous a aidés à nous installer dans la<br />
cité d’urgence de Bordelongue, à Toulouse, en<br />
1967 », raconte Renée.<br />
la HantiSe du quartier dortoir<br />
Aujourd’hui, ces militants chrétiens devenus<br />
agnostiques ont gardé le goût de la vie en communauté.<br />
Même si l’expérience de Bordelongue<br />
s’est avérée plus difficile que prévu, ils sont<br />
toujours revenus à l’idée d’un habitat en collectivité.<br />
Après des allers-retours entre Orléans et<br />
Toulouse, et d’autres expériences d’autogestion<br />
collective, ils s’installent définitivement dans la<br />
ville rose dans les années 80. En scolarisant leurs<br />
enfants à l’école de La Prairie « qui respecte les<br />
rythmes de l’enfant et utilise la méthode active »,<br />
ils s’inscrivent dans un mode de vie alternatif<br />
avec d’autres parents. C’est à ce moment qu’ils<br />
se joignent au projet de Mange-Pommes.<br />
Aujourd’hui, la moitié des quinze familles du<br />
départ vit toujours là. L’entraide est monnaie courante,<br />
que ce soit pour du dépannage matériel ou<br />
pour héberger les amis du voisin. « Nous avons<br />
plus des rapports amicaux que de simple voisinage<br />
», lâche Dominique. Mais, après 26 ans, il<br />
regrette que l’esprit collectif ait été grignoté par<br />
l’individualisme. Quelques habitants ont installé<br />
des clôtures et une pancarte « propriété privée ».<br />
Quant à la salle collective, « elle n’est toujours pas<br />
terminée. Mais on vient de relancer les travaux ! ».<br />
Désormais conseiller municipal d’Europe Ecologie<br />
dominique gilbon est un pionnier de l’habitat<br />
participatif, bien avant qu’il ne devienne<br />
un étendard à la mode. installé depuis 26 ans<br />
au hameau de mange-Pommes, à ramonville,<br />
il revient sur ses expériences et s’engage<br />
dans les nouveaux projets toulousains. Portrait<br />
à l’avant-garde. Par armelle Parion - Photo de elise boularan<br />
les Verts à Ramonville, Dominique développe<br />
d’autres initiatives citoyennes avec l’association<br />
Caracole. Ainsi, un nouveau projet d’habitat<br />
groupé porté par huit familles, est né. Il sera<br />
mitoyen de Mange-Pommes. Enthousiaste, le<br />
retraité en suit de près les étapes, jamais avare<br />
de quelques conseils. « Il faut se mettre d’accord<br />
tout de suite sur les règles de vie. Sinon,<br />
des résistances se réveillent et le projet peut<br />
perdre de son sens », prévient-il. Sa hantise ?<br />
« Qu’on devienne un quartier dortoir !». Si le sujet<br />
est devenu à la mode, Dominique regrette qu’il ait<br />
« fallu tant de temps pour se rendre compte que le<br />
lien social se délitait. J’ai un brin de scrupule aussi,<br />
car cela veut dire qu’on n’a pas su véhiculer le message.<br />
On était sûrement trop dans notre bulle ».<br />
QuelQues Projets touLousains<br />
Malgré la pénurie de terrains et la difficulté des montages financiers,<br />
l’habitat participatif se développe dans l’agglomération.<br />
L’habitat groupé du Canal devrait sortir de terre au printemps<br />
2013. Il comprend un immeuble bioclimatique avec cloisons en<br />
terre crue et inertie thermique, les futurs habitants partageront<br />
voitures, machines à laver et chambres d’amis. Le futur éco quartier<br />
de la Cartoucherie devrait accueillir, en 2014, un immeuble où<br />
étudiants, familles et personnes âgées se côtoieront, avec des<br />
jardins partagés et une terrasse commune sur les toits. À Bellefontaine<br />
25 logements d’habitat participatif sont prévus. Le projet,<br />
accompagné par un bailleur social, vise la mixité.