l'ENDROIT 22 • <strong>Spirit</strong> le CaraCtère Urbain
La maison salvan fait le pari d'un art contemporain accessible. ...ou plutôt, comme à la boulangerie d’à côté. La maison salvan, c’est l’idée qu’il est possible de créer un lieu d’art contemporain de proximité dans un petit village, Labège, plus connu pour sa zone d’hyper-consommation et ses entreprises high-tech. Par valérie lassus - Photo vincent larrata comme À La maison… au-dessus de l’ancienne porte d’entrée dont la peinture vert bouteille s’écaille, on lit « 1809 ». La demeure de feu Madame Salvan fait face à l’église, son petit jardin aux allées de terre biscornues n’a pas été planté d’essences rares. Quand la mairie l’a rachetée, au décès de son occupante, c’était avant tout pour protéger le centre du village d’une opération immobilière qui l’eut défiguré. D’où la préoccupation constante de garder l’âme de ce lieu. De façadisme, point ! L’architecte Hugues Sicre, choisi fin 2009 pour s’occuper de la mise en conformité et du réaménagement de l’intérieur, a tout de suite saisi qu’il fallait préserver les pièces telles quelles et garder le kaléidoscope de matières : plâtre abîmé, briques recouvertes de chaux, plancher, carrelages et ciment. Seules des ouvertures ont été percées pour permettre la circulation des visiteurs, les plafonds ont été surélevés et l’ancien auvent transformé en un vaste hall d’accueil. maiSon CoCon La demeure reste organique, pas une pièce qui ne communique avec les autres, autour de l’axe formé depuis l’espace très clair de l’entrée jusqu’au fond de la maison-cocon. « Les artistes se sentent bien ici, dans ce qui est à présent un outil au service de la création et des visiteurs, même si l’agencement de cette maison est un challenge pour certaines installations », souligne Paul de Sorbier, le responsable de ce lieu ouvert en 2006. L’idée de faire de la maisonnette un centre d’art contemporain est celle de Christine Camarès, adjointe à la culture, préoccupée par le manque d’équipements culturels alentours - il y a bien le multiplexe Gaumont, mais... « Il y avait cette envie d’un lieu où l’on crée mais qui ait sa spécificité, afin de ne pas être écrasé par l’abondance de propositions toulousaines », rappelle l’hôte de céans. Or, au début des années 2000, alors que mûrissait ce plan, le numérique entrait dans le monde des arts, avec sa cohorte d’expériences interactives plus ou moins réussies. Et puis, Labège, c’est aussi l’Innopole, la proximité de l’Université Paul-Sabatier, la recherche. De là à imaginer d’associer arts plastiques et sciences, il n’y avait qu’un octet. Aujourd’hui les artistes invités à créer à Labège – sur cinq expositions annuelles environ, trois sont des résidences – ont pour impératif une proposition en binôme avec un scientifique. « Autrement, la sélection est assez libre. Nous avons la chance de pouvoir encore marcher au coup de cœur, et même si ces binômes ne fonctionnent pas toujours idéalement. Il se passe à chaque fois quelque chose d’intéressant pendant le cheminement vers l’œuvre. Surtout que nous avons à cœur de suivre le travail des artistes. » En effet, certaines résidences s’étalent sur plusieurs années, comme avec Thomas Sabourin et son Espace partagé, développé pendant 3 ans. venir en voiSin Ici le public aussi se sent chez lui, libre d’agir comme à la maison et de pousser la porte facilement… « On veut que les gens n’aient pas peur d’entrer. Tous les gens. Et on doit être là pour écouter et répondre aux questions, car il est difficile d’appréhender l’art contemporain sans bagages, ce qui est souvent le cas dans ce domaine. D’où l’importance du travail de la médiatrice Lise Mazin qui intervient dans les écoles pour préparer la venue des élèves des alentours. » Ateliers, édition, production, partenariats, contribuent aussi à multiplier les clés permettant de vaincre les réticences. « L’autre jour, un gamin est venu, tout seul, il a regardé l’expo et il est reparti. Il est revenu, avec son père. Et puis il a fini par amener toute sa famille. Il y a aussi cette très vieille dame, qui vient en voisine... » Ce jeu de "reviens-y" a comme un goût de pari réussi... Maison Salvan, Labège village, 05 62 24 86 55, maison-salvan.fr, du mercredi au samedi de 15h à 19h, entrée libre En ce moment L’exposition À l’ombre des sens réunit les artistes taïwanais, Charwei Tsai et Wu Chi-Tsung, invités dans le cadre du festival Made in Asia. ICI, le PublIC se seNT Chez luI, lIbRe D’agIR COmme à la maIsON eT De POusseR la PORTe FaCIlemeNT… le CaraCtère Urbain <strong>Spirit</strong> • 23