16 <strong>La</strong> <strong>Presse</strong> <strong>Pontissalienne</strong> n° 136 - Février 2011 S elon Pierre Lidoine, spécialiste de l’histoire des anciennes automobi<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s voitures “ZL” étaient <strong>le</strong>s plus robustes de <strong>le</strong>ur génération. El<strong>le</strong>s avaient d’ail<strong>le</strong>urs remporté <strong>le</strong> Tour de France automobi<strong>le</strong> en 1914 avec 5 000 km parcourus sans aucune panne ! Toutes ont été fabriquées et assemblées à Pontarlier mais l’origine de cette saga est suisse. “El<strong>le</strong>s étaient incassab<strong>le</strong>s car <strong>le</strong>s pentes du <strong>La</strong>rmont servaient de piste d’essai. Les machines étaient mises à rude épreuve, <strong>le</strong>s moteurs étaient même attachés à des sapins et <strong>le</strong>s ingénieurs faisaient patiner <strong>le</strong>s roues pour s’assurer de la fiabilité” précise Pierre Lidoine qui est <strong>le</strong> seul à posséder des maquettes de ces DOSSIER AUTOMOBILE Zedel,une firme pontissalienne au destin peu commun “ZL”, prémices des délocalisations Fabriquées jusqu’en 1923 à Pontarlier, <strong>le</strong>s voitures “ZL” étaient connues pour <strong>le</strong>ur robustesse. Deux ingénieurs suisses sont à l’origine de cette aventure automobi<strong>le</strong>. L’usine sera délocalisée à Nanterre. Polémique Pourquoi l’appe<strong>le</strong>r rue “Donnet-Zedel” ? Pour <strong>le</strong>s puristes de lʼhistoire pontissalienne, <strong>le</strong> fait dʼavoir baptisé une rue “Donnet-Zedel” est une erreur, sinon un nonsens. Il aurait tout simp<strong>le</strong>ment fallu la nommer Zedel. Jérôme Donnet est en effet celui qui a vidé Pontarlier de son activité économique et de ses cerveaux en transférant <strong>le</strong>s technologies du Haut-Doubs à Nanterre. Un dessin de Pierre Lidoine représentant une Donnet-Zedel préparée pour la course (7 CV, 1 100 cm 3 ). autos. Avec Jean-Claude Fichet, président du club Besançon autos miniatures et Raymond Dornier, ces amoureux de voitures anciennes ont retracé cette épopée qui aura duré plus de 20 ans dans un ouvrage qui n’a jamais été publié faute d’éditeur intéressé. Pour <strong>La</strong> <strong>Presse</strong> <strong>Pontissalienne</strong>, ces amoureux de vieil<strong>le</strong>s mécaniques ont bien voulu rouvrir la boîte à souvenirs. L’aventure Zedel débute à Saint- Aubin, dans <strong>le</strong> canton de Neuchâtel à la fin du XIX ème sièc<strong>le</strong> dans une entreprise de fabrication de moteurs. Pour contourner des droits de douane exorbitants, deux ingénieurs suisses, Ernest Zürcher (1865-1935) et L’usine de Pontarlier fabriquait dans un premier temps des moteurs pour motos. Hermann Lüthi, s’instal<strong>le</strong>nt à Pontarlier entre 1902 et 1903. C’est <strong>le</strong> début de l’histoire. En premier lieu, <strong>le</strong>s ateliers fabriquent des moteurs de motocyc<strong>le</strong>ttes. “Le personnel au sein de l’usine était mixte, c’est-à-dire composé de Suisses, <strong>le</strong>squels occupaient <strong>le</strong>s postes <strong>le</strong>s plus importants et de Français, plus souvent employés comme ouvriers. Il y a eu quelques tensions par rapport à cela”, note Pierre Lidoine. Les débouchés pour “ZL” ne se font pas tarder : <strong>le</strong>urs moteurs équipent <strong>le</strong>s motos Peugeot et Terrot dont certaines dépassent déjà <strong>le</strong>s 100 km/h malgré un poids énorme. Dans <strong>le</strong> reste de la France, des cylindres sont envoyés pour équiper <strong>le</strong>s marques Alcyon et Griffon. En Al<strong>le</strong>magne, la fabrique de voitures N.S.U. choisit Zedel. C’est en 1905 que <strong>le</strong>s premières automobi<strong>le</strong>s flanquées du sig<strong>le</strong> “ZL” sortent de l’usine composée au départ d’une dizaine de Une maquette de ZL unique. L’usine pontissalienne où <strong>le</strong>s moteurs étaient fabriqués. salariés. De son côté, Hermann Lüthi est renvoyé et remplacé par Samuel Graff, un directeur venu de Suisse. À l’apogée de la firme, 250 voitures sont produites à l’année avec autant de salariés. Quant au prix d’un modè<strong>le</strong>, il pouvait varier de 20 000 à 30 000 francs après-guerre. Deux temps forts donnent à la marque ses <strong>le</strong>ttres de nob<strong>le</strong>sse : la médail<strong>le</strong> d’or obtenue à l’exposition de Turin en 1911 offrant un débouché vers la clientè<strong>le</strong> italienne et cette participation en 1914 au Tour de France automobi<strong>le</strong>. À la sortie de la guerre, <strong>le</strong> moteur “ZL” ne tourne plus à p<strong>le</strong>in régime. <strong>La</strong> faute à une économie pontissalienne morose. <strong>La</strong> vil<strong>le</strong> vient de perdre la production d’absinthe, <strong>le</strong> train ne passe plus à Pontarlier. C’est à ce moment précis, en 1923, qu’intervient Jérôme Donnet (1885-1953), riche industriel helvétique dont la fortune a grandi grâce à la construction d’avions durant la première guerre mondia<strong>le</strong>. Il achète et reprend l’entreprise… pour la délocaliser à Nanterre dans <strong>le</strong>s locaux de l’usine automobi<strong>le</strong> “Vinot-Deguingard”. Il va tota<strong>le</strong>ment la reconstruire pour en faire une usine ultramoderne. “Ce n’était ni plus ni moins qu’un transfert de technologie” commente Pierre Lidoine. En 1929, quelques mois avant <strong>le</strong> krach boursier, <strong>le</strong> site de Pontarlier ferme ses portes. “<strong>La</strong> seu<strong>le</strong> interrogation reste dans <strong>le</strong> transfert d’ouvriers : on ignore si certains ont choisi de quitter Pontarlier pour travail<strong>le</strong>r à Nanterre” confie l’historien. Quant à l’usine de Nanterre, el<strong>le</strong> fera faillite avant d’être reprise par la société Simca. Entre Pontarlier et la l’industrie automobi<strong>le</strong>, l’idyl<strong>le</strong> aura duré quelques années seu<strong>le</strong>ment. Heureusement, <strong>le</strong>s archives rappel<strong>le</strong>nt ce glorieux passé. ■ E.Ch.
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