Joseph Amiot et les derniers survivants de la ... - Chine ancienne
Joseph Amiot et les derniers survivants de la ... - Chine ancienne Joseph Amiot et les derniers survivants de la ... - Chine ancienne
Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) langue et de l’écriture de différentes nations qui ont été ou qui sont actuellement tributaires de la Chine. Il y en a de p.086 huit sortes, dont l’écriture et les caractères qui la forment n’ont aucun rapport entre eux, non plus qu’avec les caractères chinois. Celle des académies de Pékin, qui n’a pour objet que la connaissance des langues étrangères, en a fait autant de vocabulaires dont elle tire parti dans l’occasion. Dans un pays où l’argent fait tout, je n’ai pas eu de peine à me procurer un exemplaire original de chacun de ces manuscrits ; j’en ai traduit en latin l’explication chinoise ; parce que je n’avais d’autre vue en commençant, que d’envoyer le tout à l’académie de Londres ; mais, l’ouvrage fini, j’ai changé d’idée. Il m’a paru que mon envoi serait mieux, s’il était fait à la plus savante académie d’Europe, je veux dire à l’académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres. Comme je n’ai pas l’honneur d’être connu d’aucun des membres qui la composent, et que je sais que vous aviez autrefois quelques bontés pour les jésuites, c’est à vous, Monsieur, que j’ai résolu de l’adresser, pour en faire tel usage que vous jugerez à propos. J’attends votre réponse pour me conformer à ce que vous prescrirez. On a beaucoup écrit sur la Chine, mais on n’a pas tout dit ; il reste encore assez de matières pour faire un ample supplément à l’ouvrage du père Duhalde. Si quelqu’un entreprenait de faire ce supplément, je pourrais lui fournir de quoi remplir quelques articles. J’aime l’étude, j’ai du loisir et de la bonne volonté ; si je n’ai pas du talent, les savants de votre Académie qui p.087 voudraient bien m’admettre pour leur correspondant, y suppléeraient par leurs lumières et par leur direction 1 . » Cette lettre, datée de Pékin, 12 mars 1765, fut remise la même année à M. de Guignes avec la Lettre sur les caractères chinois. Celui-ci la communiqua à M. Needham, et elle conquit tous les suffrages à Londres et à Paris. La cause était définitivement jugée. Du même coup, la réputation du père Amiot devint européenne, et jusqu’à sa mort les savants des deux 1 Cette lettre se trouve dans les archives S. J. et à la Bibliothèque de l’Institut de France. — Nous l’avons citée en partie dans les Études, année 1903. 94
Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) mondes firent appel à ses connaissances aussi sûres que variées. A partir de cette date, il fut le correspondant de l’académie royale des inscriptions et belles-lettres, et un des correspondants les plus actifs. Ce savant était vraiment un modeste. « Ce n’est qu’en tremblant, écrit- il dans sa Lettre, que j’ai hasardé cette réponse à la question proposée sur les conjectures du savant M. Needham... Je finis, messieurs, en vous demandant de me lire avec des yeux pleins d’indulgence et de bonté... Si j’ai pris la plume, ce n’est que pour avoir l’honneur de répondre à votre lettre, et vous témoigner l’envie que j’aurais de vous obliger. Ne me jugez pas comme un homme de lettres, mais comme un pauvre missionnaire qui p.088 tâche d’étudier Jésus-Christ crucifié, de le faire connaître, de l’aimer de tout son cœur, et est fort neuf et fort ignorant en toute sorte de science et de littérature 1 . » Le père Amiot n’était ni neuf, ni ignorant ; ses œuvres scientifiques le montrent suffisamment. Estimé des savants d’Europe, il s’attira également l’estime de l’empereur Kien-long par sa valeur personnelle et l’étendue de ses connaissances sur l’histoire et les antiquités chinoises. Ses travaux flattaient l’orgueil national. Mais là ne se bornait pas l’ambition de ce religieux ; comme il l’écrit à Bertin, ministre et secrétaire d’État, « la gloire de Dieu et le salut des âmes sont les motifs qui l’ont engagé à passer les mers » ; c’est l’unique but qu’il avait en vue. Il n’est venu en Chine que pour cela ; et depuis son arrivée, à Pékin, il ne s’est pas écarté de ce but 2 . Plus tard, il écrira à son frère : « J’ai travaillé ici conformément aux vues qu’on avait sur moi en m’y envoyant ; j’y ai annoncé l’Évangile, j’y ai p.089 cultivé les sciences, la littérature et les arts, et je m’y suis fait tout à 1 Dans le P. S. de la Lettre sur les caractères chinois, on lit : « Cette lettre, avec les notes et figures, a été lue par deux anciens missionnaires de notre maison, très versés dans les sciences chinoises, et ils l’ont approuvée. » — Les Notes, où l’auteur déploie une étonnante érudition, ont été imprimées à la suite de la Lettre, dans les Mémoires. 2 Pékin, 23 septembre 1766 (Bibl. de l’Institut de France). 95
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<strong>Joseph</strong> <strong>Amiot</strong>, <strong>la</strong> Mission française à Pékin (1750-1795)<br />
mon<strong>de</strong>s firent appel à ses connaissances aussi sûres que variées. A partir<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te date, il fut le correspondant <strong>de</strong> l’académie royale <strong>de</strong>s inscriptions<br />
<strong>et</strong> bel<strong>les</strong>-l<strong>et</strong>tres, <strong>et</strong> un <strong>de</strong>s correspondants <strong>les</strong> plus actifs.<br />
Ce savant était vraiment un mo<strong>de</strong>ste. « Ce n’est qu’en tremb<strong>la</strong>nt, écrit-<br />
il dans sa L<strong>et</strong>tre, que j’ai hasardé c<strong>et</strong>te réponse à <strong>la</strong> question proposée sur<br />
<strong>les</strong> conjectures du savant M. Needham... Je finis, messieurs, en vous<br />
<strong>de</strong>mandant <strong>de</strong> me lire avec <strong>de</strong>s yeux pleins d’indulgence <strong>et</strong> <strong>de</strong> bonté... Si<br />
j’ai pris <strong>la</strong> plume, ce n’est que pour avoir l’honneur <strong>de</strong> répondre à votre<br />
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pas comme un homme <strong>de</strong> l<strong>et</strong>tres, mais comme un pauvre missionnaire qui<br />
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tâche d’étudier Jésus-Christ crucifié, <strong>de</strong> le faire connaître, <strong>de</strong> l’aimer <strong>de</strong><br />
tout son cœur, <strong>et</strong> est fort neuf <strong>et</strong> fort ignorant en toute sorte <strong>de</strong> science <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> littérature 1 . »<br />
Le père <strong>Amiot</strong> n’était ni neuf, ni ignorant ; ses œuvres scientifiques le<br />
montrent suffisamment. Estimé <strong>de</strong>s savants d’Europe, il s’attira également<br />
l’estime <strong>de</strong> l’empereur Kien-long par sa valeur personnelle <strong>et</strong> l’étendue <strong>de</strong><br />
ses connaissances sur l’histoire <strong>et</strong> <strong>les</strong> antiquités chinoises. Ses travaux<br />
f<strong>la</strong>ttaient l’orgueil national.<br />
Mais là ne se bornait pas l’ambition <strong>de</strong> ce religieux ; comme il l’écrit à<br />
Bertin, ministre <strong>et</strong> secrétaire d’État, « <strong>la</strong> gloire <strong>de</strong> Dieu <strong>et</strong> le salut <strong>de</strong>s âmes<br />
sont <strong>les</strong> motifs qui l’ont engagé à passer <strong>les</strong> mers » ; c’est l’unique but qu’il<br />
avait en vue. Il n’est venu en <strong>Chine</strong> que pour ce<strong>la</strong> ; <strong>et</strong> <strong>de</strong>puis son arrivée, à<br />
Pékin, il ne s’est pas écarté <strong>de</strong> ce but 2 .<br />
Plus tard, il écrira à son frère : « J’ai travaillé ici conformément aux<br />
vues qu’on avait sur moi en m’y envoyant ; j’y ai annoncé l’Évangile, j’y ai<br />
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cultivé <strong>les</strong> sciences, <strong>la</strong> littérature <strong>et</strong> <strong>les</strong> arts, <strong>et</strong> je m’y suis fait tout à<br />
1 Dans le P. S. <strong>de</strong> <strong>la</strong> L<strong>et</strong>tre sur <strong>les</strong> caractères chinois, on lit : « C<strong>et</strong>te l<strong>et</strong>tre, avec <strong>les</strong> notes <strong>et</strong><br />
figures, a été lue par <strong>de</strong>ux anciens missionnaires <strong>de</strong> notre maison, très versés dans <strong>les</strong><br />
sciences chinoises, <strong>et</strong> ils l’ont approuvée. » — Les Notes, où l’auteur déploie une étonnante<br />
érudition, ont été imprimées à <strong>la</strong> suite <strong>de</strong> <strong>la</strong> L<strong>et</strong>tre, dans <strong>les</strong> Mémoires.<br />
2 Pékin, 23 septembre 1766 (Bibl. <strong>de</strong> l’Institut <strong>de</strong> France).<br />
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