Joseph Amiot et les derniers survivants de la ... - Chine ancienne

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Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) vous le dire, ranimer messieurs vos confrères 1 chacun dans son art et sa science, et vous leur donnerez sûrement l’exemple qu’ils ont déjà sous les yeux par le travail que vous faites pour savoir le mandchou 2 . » M. Raux, en effet, après s’être livré à peu près exclusivement à l’étude du chinois, s’était décidé à apprendre le mandchou, sous la conduite de M. Amiot, et les progrès qu’il fît en quelques mois furent si considérables, que son maître écrivit à M. Bertin : « Si M. Raux continue ses études du mandchou avec la même ardeur qu’il les a commencées, vous pourrez tirer de lui un excellent parti 3 . » p.409 M. Raux fut bientôt à même, tant ses progrès furent rapides dans la connaissance de la langue tartare-mantchou, de remplacer M. Amiot dans ses fonctions d’interprète de l’empereur auprès des puissances étrangères. Celui-ci les lui céda vers 1791. Déjà il lui avait facilité l’accès au tribunal des Mathématiques. D’abord, simple membre de ce tribunal, M. Raux en devint plus tard président. C’était un honneur que n’avait eu aucun Français avant lui 4 . @ 1 M. Bertin fait ici allusion à M. Ghislain, qui s’occupait principalement de l’instruction de la jeunesse et négligeait un peu ses occupations de physicien à la cour. 2 M. Bertin à M. Raux, novembre 1788. 3 1 er septembre 1788.— Le 25 janvier de l’année précédente, M. Amiot écrivait à M. Bertin : « M. Raux a commencé par le chinois, et il a très bien fait, parce que c’est la langue vulgaire du pays et qu’elle est de nécessité pour quiconque y fait son séjour. Le mantchou est de subrogation. On ne le parle qu’à la cour et en la présence du souverain, quand il s’agit d’affaires. Les Chinois s’en sont tenus à leur propre langue. Nos missionnaires (la plupart) imitent en cela les Chinois. » L’année suivante, en novembre, M. Bertin écrivait à M. Raux : « Je vous sais un gré infini de vous être livré avec tant d’ardeur au tartare-mandchou. Cette langue vous abrégera un temps infini dans la recherche même des auteurs qui vous auriez voulu consulter, puisque c’est dans cette langue que l’empereur a fait traduire ce qu’il y a de plus important dans les anciens manuscrits chinois dont il a fait faire une immense collection. » 4 Voir dans Les missions catholiques, par le père Piolet, Les lazaristes en Chine, par Mgr Favier, T. III, p. 66. 294

p.411 Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) CHAPITRE QUATORZIÈME Les derniers jésuites de la mission française à Pékin. — Messieurs de Ventavon, Bourgeois et Amiot. — Leur mort. Les jésuites n’existent plus ; les biens de la mission française, leur maison, leur église, leurs immeubles de Pékin, leurs terres en dehors de la capitale, la rente que leur servait Louis XVI depuis 1776, tout est passé aux mains des lazaristes, à l’exception de quelques milliers de francs que MM. de Grammont et de Poirot se sont réservés. Il ne reste plus, à Pékin, de la société éteinte des jésuites, que trois français, MM. Amiot, de Ventavon et Bourgeois ; deux italiens, MM. de Poirot et Panzi 1 , et quatre chinois, élevés en France. Tous p.412 ces religieux sécularisés par Clément XIV, vivent ensemble dans leur ancienne maison, indépendants et libres, ayant chacun une pension annuelle dont il dispose à son gré, assis à la même table, les uns fidèles aux usages et aux règles de la Compagnie, les autres suivant un genre de vie à leur convenance. L’arrivée des lazaristes n’a pas sensiblement modifié leur existence, sauf que M. Raux est devenu leur supérieur et veille à leur entretien 2 . M. de Ventavon, revenu de ses anciennes erreurs, et comprenant ses 1 M. de Poirot, quoique Lorrain, était entré au noviciat de Florence dans la province de Rome. Envoyé en Chine, il fit partie de la mission française. Le frère Panzi, italien, fut également attaché à la mission française. Tous les deux auraient, dit-on, été admis dans la Compagnie de Jésus, conservée en Russie. M. de Poirot serait mort en 1814, et M. Panzi, en 1812. Il ne sera plus question de ces deux ex-jésuites. 2 Quand les lazaristes furent désignés pour succéder aux ex-jésuites de Chine, trois religieux de la société éteinte travaillaient encore dans les missions des provinces. Ils étaient âgés, fatigués ; ils moururent à peu de distance. M. Pierre de Ladmirat, né le 15 septembre 1723 et arrivé en Chine en 1766, mourut en décembre 1784 ; M. Jean-Baptiste de la Roche, né le 3 mars 1704 et arrivé en Chine le 5 septembre 1722, mourut dans les fers en 1785 ; enfin, M. Mathurin de Lamathe, né le 11 novembre 1723 et arrivé en Chine le 23 août 1755, mourut dans sa chère mission du Ho-nan, qu’il évangélisait depuis 32 ans. Quant à M. de Grammont, rentré à Pékin par ordre de l’empereur, dont il était le mathématicien, il vécut à part avec une pension annuelle, que lui faisait M. Raux, conformément au bref de Clément XIV. M. Favier, lazariste, prétend qu’il mourut à Macao, en 1808. 295 @

<strong>Joseph</strong> <strong>Amiot</strong>, <strong>la</strong> Mission française à Pékin (1750-1795)<br />

vous le dire, ranimer messieurs vos confrères 1 chacun dans son art <strong>et</strong> sa<br />

science, <strong>et</strong> vous leur donnerez sûrement l’exemple qu’ils ont déjà sous <strong>les</strong><br />

yeux par le travail que vous faites pour savoir le mandchou 2 . »<br />

M. Raux, en eff<strong>et</strong>, après s’être livré à peu près exclusivement à l’étu<strong>de</strong><br />

du chinois, s’était décidé à apprendre le mandchou, sous <strong>la</strong> conduite <strong>de</strong> M.<br />

<strong>Amiot</strong>, <strong>et</strong> <strong>les</strong> progrès qu’il fît en quelques mois furent si considérab<strong>les</strong>, que<br />

son maître écrivit à M. Bertin : « Si M. Raux continue ses étu<strong>de</strong>s du<br />

mandchou avec <strong>la</strong> même ar<strong>de</strong>ur qu’il <strong>les</strong> a commencées, vous pourrez tirer<br />

<strong>de</strong> lui un excellent parti 3 . »<br />

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M. Raux fut bientôt à même, tant ses progrès furent rapi<strong>de</strong>s dans <strong>la</strong><br />

connaissance <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue tartare-mantchou, <strong>de</strong> remp<strong>la</strong>cer M. <strong>Amiot</strong> dans<br />

ses fonctions d’interprète <strong>de</strong> l’empereur auprès <strong>de</strong>s puissances étrangères.<br />

Celui-ci <strong>les</strong> lui céda vers 1791. Déjà il lui avait facilité l’accès au tribunal<br />

<strong>de</strong>s Mathématiques. D’abord, simple membre <strong>de</strong> ce tribunal, M. Raux en<br />

<strong>de</strong>vint plus tard prési<strong>de</strong>nt. C’était un honneur que n’avait eu aucun Français<br />

avant lui 4 .<br />

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1 M. Bertin fait ici allusion à M. Ghis<strong>la</strong>in, qui s’occupait principalement <strong>de</strong> l’instruction <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

jeunesse <strong>et</strong> négligeait un peu ses occupations <strong>de</strong> physicien à <strong>la</strong> cour.<br />

2 M. Bertin à M. Raux, novembre 1788.<br />

3 1 er septembre 1788.— Le 25 janvier <strong>de</strong> l’année précé<strong>de</strong>nte, M. <strong>Amiot</strong> écrivait à M. Bertin :<br />

« M. Raux a commencé par le chinois, <strong>et</strong> il a très bien fait, parce que c’est <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue vulgaire<br />

du pays <strong>et</strong> qu’elle est <strong>de</strong> nécessité pour quiconque y fait son séjour. Le mantchou est <strong>de</strong><br />

subrogation. On ne le parle qu’à <strong>la</strong> cour <strong>et</strong> en <strong>la</strong> présence du souverain, quand il s’agit<br />

d’affaires. Les Chinois s’en sont tenus à leur propre <strong>la</strong>ngue. Nos missionnaires (<strong>la</strong> plupart)<br />

imitent en ce<strong>la</strong> <strong>les</strong> Chinois. » L’année suivante, en novembre, M. Bertin écrivait à M. Raux :<br />

« Je vous sais un gré infini <strong>de</strong> vous être livré avec tant d’ar<strong>de</strong>ur au tartare-mandchou. C<strong>et</strong>te<br />

<strong>la</strong>ngue vous abrégera un temps infini dans <strong>la</strong> recherche même <strong>de</strong>s auteurs qui vous auriez<br />

voulu consulter, puisque c’est dans c<strong>et</strong>te <strong>la</strong>ngue que l’empereur a fait traduire ce qu’il y a <strong>de</strong><br />

plus important dans <strong>les</strong> anciens manuscrits chinois dont il a fait faire une immense<br />

collection. »<br />

4 Voir dans Les missions catholiques, par le père Piol<strong>et</strong>, Les <strong>la</strong>zaristes en <strong>Chine</strong>, par Mgr<br />

Favier, T. III, p. 66.<br />

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