Joseph Amiot et les derniers survivants de la ... - Chine ancienne

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p.300 Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) La lettre de M. Bourgeois, écrite le 30 mars, au nom de ses partisans, MM. d’Ollières et Collas, à Mgr de Delcon, était une lettre de protestation contre tout ce qui se ferait sans bulles ; une seconde lettre était adressée à Mgr Salusti. Les deux furent remises par le père Joseph de Sainte-Thérése. Le père d’Espinha protesta de son côté le 31 mars, et ajouta à sa protestation : sans l’intimation du roi patron 1 . Le droit de la couronne de Portugal, par rapport aux évêques de Pékin, se réduisait canoniquement au jus patronatus seu præsentandi, qui lui fut accordé d’abord par Alexandre VIII, dans la constitution Romani pontificis, du 10 avril 1690, et confirmé par Innocent XII dans la constitution E sublimi, du 15 octobre 1696. Il y est dit que les rois de Portugal auront à perpétuité le droit de présenter ou nommer au pape les sujets pour l’évêché de p.301 Pékin à chaque vacance, dans le délai d’un an. La condition, c’est qu’ils doteront l’évêque. A ce droit, reconnu par le Saint-Siège, s’ajoutait l’usage qu’il admettait au moins pratiquement ou tolérait par nécessité, à savoir que les bulles instituant l’évêque passaient par la cour de Portugal et étaient envoyées et remises par ses agents au prélat nommé. Le Saint-Siège n’a jamais, ni sanctionné, ni contesté cet usage que la couronne de Portugal affirma toujours comme un droit ; et, de fait, les bulles des évêques de Pékin, comme celles des évêques de Nankin, ne leur ont jamais été remises directement par les agents du Saint-Siège, mais toujours par ceux du roi de Portugal. Si on avait voulu faire autrement, le Portugal aurait refusé sa subvention à l’évêque, qui n’aurait pu vivre. 1 Lettre de M. Bourgeois à M. Duprez, 15 oct. 1780. (Arch. S. J.) — Le 26 juillet 1780, MM. d’Ollières, Cibot, Bourgeois et Collas écrivirent à l’archevêque de Goa une lettre collective, où ils racontent tout ce qui se passa alors au sujet du sacre et de l’administration de Mgr Salusti. En voici un extrait. « B° P i Josepho a Sa Theresia protestationes transmisimus exhibendas tum consecratori episcopo tum consecrando, quibus monebamus nos non tantum ejus modi consecrationi sine litteris apostolicis in forma legitima factæ aut faciendæ resistere, sed nec unquam eum qui sic consecratus esset in legitimum episcopum agnituros donec quod juris est peractum fuerit. » Cette lettre n’est pas signée de M. Amiot, qui, par principe, ne signait jamais les lettres collectives. (Voir Pièces justificatives, n° V). 228

Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) D’une manière générale, le jus præsentandi était interprété par le Portugal en ce sens, que non seulement il lui réservait la nomination de l’évêque de Pékin, mais encore qu’il obligeait l’élu d’attendre que le gouvernement portugais lui en fît notification et l’autorisât à entrer en fonctions. Le Saint-Siège a laissé, sans protester, cette interprétation se traduire en fait. Il suit de ce qui précède que l’évêque nommé ne pouvait pas même se faire consacrer sans l’agrément explicitement obtenu du Portugal. p.302 d’Espinha. C’est sur ce fait incontesté que s’appuyait la protestation du père M. Amiot ne prit aucune part, ni pour ni contre la consécration de Mgr Salusti. « Sa maxime, comme il l’avoue lui-même, était de bien vivre avec tout le monde, de ne pas s’ingérer dans les affaires des autres... Il abhorrait les disputes. » Cependant, il désapprouva la protestation de MM. Bourgeois, d’Ollières et Cibot. « Ces messieurs, écrit-il un peu plus tard à M. de Poirot, eussent mieux fait de se tenir tranquilles et d’être simples spectateurs d’une scène qui ne les intéressait en rien. N’ayant aucun titre qui les autorisât à cette démarche, ils ont passé les bornes de leur devoir ; du moins je le crois ainsi. Je vous avoue que la conduite de nos trois messieurs à cet égard m’a toujours fait de la peine et m’en fait encore aujourd’hui 1 . » Mais, s’il désapprouvait la protestation, il n’approuvait pas pour cela la consécration sans bulles. Il restait seulement en dehors du débat, et, tout en étant sur divers points de l’avis des bonifaciens, il ne voulait jamais rien faire, ni signer en commun avec eux. @ Malgré la protestation des bonifaciens, la p.303 cérémonie du sacre eut lieu dans la petite église de la Propagande, au jour marqué. Seuls les salustiens s’y présentèrent. Le père Joseph de Sainte-Thérése, et M. Félix 1 Lettre de M. Amiot à M. de Poirot, 13 juin 1780 (Arch. de la Propag.) 229

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<strong>Joseph</strong> <strong>Amiot</strong>, <strong>la</strong> Mission française à Pékin (1750-1795)<br />

La l<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> M. Bourgeois, écrite le 30 mars, au nom <strong>de</strong> ses<br />

partisans, MM. d’Ollières <strong>et</strong> Col<strong>la</strong>s, à Mgr <strong>de</strong> Delcon, était une l<strong>et</strong>tre <strong>de</strong><br />

protestation contre tout ce qui se ferait sans bul<strong>les</strong> ; une secon<strong>de</strong> l<strong>et</strong>tre<br />

était adressée à Mgr Salusti. Les <strong>de</strong>ux furent remises par le père <strong>Joseph</strong> <strong>de</strong><br />

Sainte-Thérése.<br />

Le père d’Espinha protesta <strong>de</strong> son côté le 31 mars, <strong>et</strong> ajouta à sa<br />

protestation : sans l’intimation du roi patron 1 . Le droit <strong>de</strong> <strong>la</strong> couronne <strong>de</strong><br />

Portugal, par rapport aux évêques <strong>de</strong> Pékin, se réduisait canoniquement au<br />

jus patronatus seu præsentandi, qui lui fut accordé d’abord par Alexandre<br />

VIII, dans <strong>la</strong> constitution Romani pontificis, du 10 avril 1690, <strong>et</strong> confirmé<br />

par Innocent XII dans <strong>la</strong> constitution E sublimi, du 15 octobre 1696. Il y est<br />

dit que <strong>les</strong> rois <strong>de</strong> Portugal auront à perpétuité le droit <strong>de</strong> présenter ou<br />

nommer au pape <strong>les</strong> suj<strong>et</strong>s pour l’évêché <strong>de</strong> p.301 Pékin à chaque vacance,<br />

dans le dé<strong>la</strong>i d’un an. La condition, c’est qu’ils doteront l’évêque.<br />

A ce droit, reconnu par le Saint-Siège, s’ajoutait l’usage qu’il adm<strong>et</strong>tait<br />

au moins pratiquement ou tolérait par nécessité, à savoir que <strong>les</strong> bul<strong>les</strong><br />

instituant l’évêque passaient par <strong>la</strong> cour <strong>de</strong> Portugal <strong>et</strong> étaient envoyées <strong>et</strong><br />

remises par ses agents au pré<strong>la</strong>t nommé. Le Saint-Siège n’a jamais, ni<br />

sanctionné, ni contesté c<strong>et</strong> usage que <strong>la</strong> couronne <strong>de</strong> Portugal affirma<br />

toujours comme un droit ; <strong>et</strong>, <strong>de</strong> fait, <strong>les</strong> bul<strong>les</strong> <strong>de</strong>s évêques <strong>de</strong> Pékin,<br />

comme cel<strong>les</strong> <strong>de</strong>s évêques <strong>de</strong> Nankin, ne leur ont jamais été remises<br />

directement par <strong>les</strong> agents du Saint-Siège, mais toujours par ceux du roi <strong>de</strong><br />

Portugal. Si on avait voulu faire autrement, le Portugal aurait refusé sa<br />

subvention à l’évêque, qui n’aurait pu vivre.<br />

1 L<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> M. Bourgeois à M. Duprez, 15 oct. 1780. (Arch. S. J.) — Le 26 juill<strong>et</strong> 1780, MM.<br />

d’Ollières, Cibot, Bourgeois <strong>et</strong> Col<strong>la</strong>s écrivirent à l’archevêque <strong>de</strong> Goa une l<strong>et</strong>tre collective,<br />

où ils racontent tout ce qui se passa alors au suj<strong>et</strong> du sacre <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’administration <strong>de</strong> Mgr<br />

Salusti. En voici un extrait. « B° P i <strong>Joseph</strong>o a Sa Theresia protestationes transmisimus<br />

exhibendas tum consecratori episcopo tum consecrando, quibus monebamus nos non<br />

tantum ejus modi consecrationi sine litteris apostolicis in forma legitima factæ aut faciendæ<br />

resistere, sed nec unquam eum qui sic consecratus ess<strong>et</strong> in legitimum episcopum agnituros<br />

donec quod juris est peractum fuerit. » C<strong>et</strong>te l<strong>et</strong>tre n’est pas signée <strong>de</strong> M. <strong>Amiot</strong>, qui, par<br />

principe, ne signait jamais <strong>les</strong> l<strong>et</strong>tres collectives. (Voir Pièces justificatives, n° V).<br />

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