Joseph Amiot et les derniers survivants de la ... - Chine ancienne

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Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) Dans ce changement de dynastie, on pouvait craindre que les vainqueurs ne poursuivissent une religion et des hommes que le dernier empereur des p.XXIII Ming avait couverts de sa haute protection. Il n’en fut rien, grâce à la sagesse et à la prudence du père Schall. Envisageant les événements à un point de vue surnaturel, il sait si bien ménager les nouveaux maîtres que Chuen-tché s’attache à lui, il en fait son conseiller, son ami, son maître, et, par un décret de 1645, il le nomme président du tribunal des Mathématiques. Cette haute dignité, une des plus importantes de l’empire, lui permet d’étendre sa protection sur ses frères dans l’apostolat : il obtient la délivrance du père Longobardi, retenu prisonnier par les Mandchoux ; il fait rapporter le décret de mort contré les pères de Magalhaës 1 et Sambiaso 2 , et celui d’exil contre le père de Ferrariis 3 . Là ne se borne pas son influence : il arrête des persécutions suscitées en province par les mandarins contre les néophytes chinois ; il fait rendre la liberté à des centaines de prisonniers, il empêche la construction à Pékin de p.XXIV vastes pagodes, il décide l’empereur à porter un décret en faveur de la libre prédication de l’Évangile ; lui-même enseigne, sans aucune entrave, les vérités de la foi aux grands de la cour, aux mandarins et au peuple. Sous le règne précédent, il avait converti cinquante dames du palais, plus de quarante eunuques et cent-quarante personnes du sang royal. De 1650 à 1664, le nombre des néophytes s’accroît tellement que les missionnaires baptisent à Pékin et dans les provinces plus de 100.000 catéchumènes. « Il se formait de toutes parts, dit l’abbé Huc, dans les villes, dans les 1 Le père Gabriel de Magalhaës, qui vint à Pékin en 1640, était né près de Coïmbre (1609) et entré chez les jésuites (1624). Il mourut le 6 mai 1677, étant supérieur des Pères de Pékin. 2 Le père François Sambiaso, appelé à Pékin en 1613, était né à Cosenza (Royaume de Naples) en 1582, et entré au noviciat des jésuites en 1602. Il mourut en janvier 1649. 3 Le père Jean-François de Ferrariis, né dans le Piémont (1608), entré au noviciat, des jésuites en 1624, mourut à Canton en 1671. 16

Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) bourgades, une foule de petites chrétientés ferventes, où Dieu était servi avec esprit de foi 1 ». Enfin, pour reconnaître les services signalés qu’il a rendus à l’empire, Chuen-tché cède au père Schall un vaste terrain, où le missionnaire bâtit une église en forme de croix latine avec quatre chapelles latérales, dont il est l’architecte et l’entrepreneur 2 . Le 6 février 1661, l’empereur Chuen-tché expirait, laissant le trône à un enfant de 8 ans, son second fils, le prince Kang-hi. Quatre régents choisis par son père gouvernèrent pendant sa minorité, et le père Schall fut nommé précepteur du jeune héritier. Bientôt tout changea. Le jésuite est disgracié, jeté p.XXV en prison avec les pères Buglio 3 , Magalhaës et le père Verbiest, chargé de chaînes et condamné à être haché, découpé par morceaux (1665). Mais, à la suite d’un tremblement de terre et d’autres accidents, où les chrétiens voient une intervention divine, il est rendu à la liberté. Les mauvais traitements avaient brisé ses forces : il meurt le 15 août 1666, après quarante-quatre années d’apostolat 4 . « Les jésuites avaient alors 151 églises et 38 résidences sur le territoire de la Chine ; les p.XXVI dominicains, 21 églises et 2 résidences, les franciscains, 3 églises et une maison. Les jésuites avaient écrit 131 1 Le Christianisme en Chine, par l’abbé Huc, T. II, p. 424. 2 La première église publique à Pékin fut élevée par le père Schall, en 1650. 3 Le père Louis Buglio, né en Sicile (1606), entré dans la Compagnie (1622), arriva à Pékin en 1648. Très versé dans la littérature tartare et chinoise, il composa de nombreux ouvrages chinois. En outre, bon peintre, il enseigna aux Chinois la méthode de dessiner. Il mourut le 12 oct. 1682. 4 Ses nombreux ouvrages, relatifs pour la plupart à l’astronomie, à l’optique et à la géométrie, ont été publiés à Pékin avant 1635, pendant qu’il travaillait à la réforme du calendrier avec le père Jacques Rho. Le père Jacques Rho, né à Milan (1593), entré dans la Compagnie (1614), arrivé à Pékin en 1630, avait, avant son départ pour la Chine, montré les plus belles aptitudes pour les mathématiques et professé dans sa ville natale les sciences exactes devant un nombreux auditoire (Bartoli, p. 233). A Pékin, il passait avec le père Schall une grande partie de la nuit et du jour à prendre les distances des étoiles, à vérifier leurs points, à calculer leurs positions. À ses heures libres, il fabriquait des instruments de précision, et faisait imprimer des ouvrages sur toutes les branches théoriques et pratiques de l’astronomie et des mathématiques. Ce travail, excessif épuisa vite ses forces. Il mourut presque subitement le 26 avril 1638. V. La Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, art. Schall et Rho : liste de leurs ouvrages. 17

<strong>Joseph</strong> <strong>Amiot</strong>, <strong>la</strong> Mission française à Pékin (1750-1795)<br />

bourga<strong>de</strong>s, une foule <strong>de</strong> p<strong>et</strong>ites chrétientés ferventes, où Dieu était servi<br />

avec esprit <strong>de</strong> foi 1 ».<br />

Enfin, pour reconnaître <strong>les</strong> services signalés qu’il a rendus à l’empire,<br />

Chuen-tché cè<strong>de</strong> au père Schall un vaste terrain, où le missionnaire bâtit<br />

une église en forme <strong>de</strong> croix <strong>la</strong>tine avec quatre chapel<strong>les</strong> <strong>la</strong>téra<strong>les</strong>, dont il<br />

est l’architecte <strong>et</strong> l’entrepreneur 2 .<br />

Le 6 février 1661, l’empereur Chuen-tché expirait, <strong>la</strong>issant le trône à un<br />

enfant <strong>de</strong> 8 ans, son second fils, le prince Kang-hi. Quatre régents choisis<br />

par son père gouvernèrent pendant sa minorité, <strong>et</strong> le père Schall fut<br />

nommé précepteur du jeune héritier. Bientôt tout changea. Le jésuite est<br />

disgracié, j<strong>et</strong>é p.XXV en prison avec <strong>les</strong> pères Buglio 3 , Magalhaës <strong>et</strong> le père<br />

Verbiest, chargé <strong>de</strong> chaînes <strong>et</strong> condamné à être haché, découpé par<br />

morceaux (1665). Mais, à <strong>la</strong> suite d’un tremblement <strong>de</strong> terre <strong>et</strong> d’autres<br />

acci<strong>de</strong>nts, où <strong>les</strong> chrétiens voient une intervention divine, il est rendu à <strong>la</strong><br />

liberté. Les mauvais traitements avaient brisé ses forces : il meurt le 15<br />

août 1666, après quarante-quatre années d’aposto<strong>la</strong>t 4 .<br />

« Les jésuites avaient alors 151 églises <strong>et</strong> 38 rési<strong>de</strong>nces sur le territoire<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Chine</strong> ; <strong>les</strong> p.XXVI dominicains, 21 églises <strong>et</strong> 2 rési<strong>de</strong>nces, <strong>les</strong><br />

franciscains, 3 églises <strong>et</strong> une maison. Les jésuites avaient écrit 131<br />

1 Le Christianisme en <strong>Chine</strong>, par l’abbé Huc, T. II, p. 424.<br />

2 La première église publique à Pékin fut élevée par le père Schall, en 1650.<br />

3 Le père Louis Buglio, né en Sicile (1606), entré dans <strong>la</strong> Compagnie (1622), arriva à Pékin<br />

en 1648. Très versé dans <strong>la</strong> littérature tartare <strong>et</strong> chinoise, il composa <strong>de</strong> nombreux<br />

ouvrages chinois. En outre, bon peintre, il enseigna aux Chinois <strong>la</strong> métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssiner. Il<br />

mourut le 12 oct. 1682.<br />

4 Ses nombreux ouvrages, re<strong>la</strong>tifs pour <strong>la</strong> plupart à l’astronomie, à l’optique <strong>et</strong> à <strong>la</strong><br />

géométrie, ont été publiés à Pékin avant 1635, pendant qu’il travail<strong>la</strong>it à <strong>la</strong> réforme du<br />

calendrier avec le père Jacques Rho.<br />

Le père Jacques Rho, né à Mi<strong>la</strong>n (1593), entré dans <strong>la</strong> Compagnie (1614), arrivé à Pékin en<br />

1630, avait, avant son départ pour <strong>la</strong> <strong>Chine</strong>, montré <strong>les</strong> plus bel<strong>les</strong> aptitu<strong>de</strong>s pour <strong>les</strong><br />

mathématiques <strong>et</strong> professé dans sa ville natale <strong>les</strong> sciences exactes <strong>de</strong>vant un nombreux<br />

auditoire (Bartoli, p. 233). A Pékin, il passait avec le père Schall une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nuit<br />

<strong>et</strong> du jour à prendre <strong>les</strong> distances <strong>de</strong>s étoi<strong>les</strong>, à vérifier leurs points, à calculer leurs<br />

positions. À ses heures libres, il fabriquait <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong> précision, <strong>et</strong> faisait imprimer<br />

<strong>de</strong>s ouvrages sur toutes <strong>les</strong> branches théoriques <strong>et</strong> pratiques <strong>de</strong> l’astronomie <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />

mathématiques. Ce travail, excessif épuisa vite ses forces. Il mourut presque subitement le<br />

26 avril 1638. V. La Bibliothèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> Compagnie <strong>de</strong> Jésus, art. Schall <strong>et</strong> Rho : liste <strong>de</strong><br />

leurs ouvrages.<br />

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