Joseph Amiot et les derniers survivants de la ... - Chine ancienne

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Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) d’eux : Isti degeneres non sic ostendunt erga summum Pontificem suam promptam obedientiam (quæ talis non exigitur), sed suum parvum amorem ergà nostram matrem optimam 1 . » Cependant, le père Joseph, grand vicaire de l’évêque de Nankin, n’était pas resté inactif. Dès le 31 juillet 1775, sans prévenir les missionnaires français, il se présenta à leur résidence : Mgr de Nankin ne lui avait envoyé ni le bref, ni la commission. « Le jour de la fête de saint Ignace, raconte le père d’Ollières, les offices de l’Église étant terminés, nous fûmes fort surpris de voir paraître ces messieurs propagandistes, excepté le père franciscain, et avec eux un Chinois propagandiste. Ils n’avaient pas pensé que pour nous signifier le bref, il aurait p.187 du moins fallu en faire venir une copie. Cette réflexion ne survint qu’au moment où il aurait fallu l’avoir à la main. Cependant, une fois avancés, Ils ne voulurent pas reculer, et, sans invitation de notre part, ils vinrent s’asseoir à notre table 2 . » Là se passa une scène assez comique. « Les propagandistes, continue le père d’Ollières, résolurent de nous appeler désormais Monsieur et non Père, en nous saluant (les jésuites n’existaient plus pour eux). Tous approuvèrent cette résolution et l’exécutèrent. Mais, pendant le dîner, chaque fois que cette expression nouvelle sortait de la bouche de quelqu’un d’entre eux, nous reprenions : révérend père supérieur, père Amiot. Ils comprirent et se turent 3 . » Le 25 août, fête de saint Louis, roi de France, même descente des propagandistes à Saint-Sauveur ; même scène au repas de midi, auquel ils se rendirent sans y être invités. Ils agissaient comme s’ils étaient chez eux. « Il faudrait des volumes, écrit le père d’Ollières, si je voulais raconter 1 M. Bourgeois à M. Bertin, sur les accusations de M. de Ventavon, 21 juin 1781 (Arch. de la Propag.). 2 Même lettre du père d’Ollières à son frère. 3 Ibid. 156

Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) toutes les scènes scandaleuses, dont ils entremêlaient leurs visites 1 . » On comprend après cela le désir qu’éprouvaient les missionnaires français de se voir notifier enfin, régulièrement, le bref pontifical. La suppression seule pouvait les soustraire à ces misérables p.188 tracasseries, à ces scènes de mauvais goût. Qu’une pareille agonie dût leur paraître longue et dure ! On souffre cruellement de voir des missionnaires, avides de dépouilles des condamnés à mort, se donner le triste plaisir de danser autour de l’échafaud où ceux-ci vont tendre le cou au couperet... Heureusement que la conduite coupable de quelques propagandistes peu consciencieux ou d’une éducation douteuse ne saurait atteindre ni entacher l’honneur de leur corps respectable. Cependant l’heure du sacrifice suprême a sonné. Le 17 juin 1775, Mgr de Nankin reçoit le bref de Clément XIV et des instructions spéciales ou commission pour sa publication à Pékin 2 . Ces instructions sont signées par le cardinal Castelli et contresignées par Mgr Étienne Borgia, secrétaire de la congrégation de la Propagande, un des prélats les plus hostiles, au dire du père de Ravignan, à l’institut de saint Ignace. Le bref et les instructions ne sont accompagnés ni de la circulaire du 18 août, ni de la circulaire du 18 décembre. Il semble cependant que cette dernière était applicable à la mission française de Pékin, aussi bien qu’à la mission portugaise. Pourquoi ne fut-elle pas communiquée à l’évêque de Nankin par le cardinal Castelli ?... p.189 Si le cardinal Castelli n’a pas communiqué la circulaire du 18 décembre, il s’en est du moins inspiré. Ses instructions ne sont pas comme la circulaire du 18 août, sèches, tranchantes, sans pitié ; elles ont des égards, elles contiennent de sages prévoyances, elles insinuent des adoucissements. Elles permettent, par exemple, aux jésuites de Pékin, de 1 Ibid. 2 V. aux Pièces justificatives, n° III, ces instructions spéciales. 157

<strong>Joseph</strong> <strong>Amiot</strong>, <strong>la</strong> Mission française à Pékin (1750-1795)<br />

d’eux : Isti <strong>de</strong>generes non sic ostendunt erga summum Pontificem suam<br />

promptam obedientiam (quæ talis non exigitur), sed suum parvum amorem<br />

ergà nostram matrem optimam 1 . »<br />

Cependant, le père <strong>Joseph</strong>, grand vicaire <strong>de</strong> l’évêque <strong>de</strong> Nankin, n’était<br />

pas resté inactif. Dès le 31 juill<strong>et</strong> 1775, sans prévenir <strong>les</strong> missionnaires<br />

français, il se présenta à leur rési<strong>de</strong>nce : Mgr <strong>de</strong> Nankin ne lui avait envoyé<br />

ni le bref, ni <strong>la</strong> commission.<br />

« Le jour <strong>de</strong> <strong>la</strong> fête <strong>de</strong> saint Ignace, raconte le père d’Ollières, <strong>les</strong> offices<br />

<strong>de</strong> l’Église étant terminés, nous fûmes fort surpris <strong>de</strong> voir paraître ces<br />

messieurs propagandistes, excepté le père franciscain, <strong>et</strong> avec eux un<br />

Chinois propagandiste. Ils n’avaient pas pensé que pour nous signifier le<br />

bref, il aurait p.187 du moins fallu en faire venir une copie. C<strong>et</strong>te réflexion ne<br />

survint qu’au moment où il aurait fallu l’avoir à <strong>la</strong> main. Cependant, une<br />

fois avancés, Ils ne voulurent pas reculer, <strong>et</strong>, sans invitation <strong>de</strong> notre part,<br />

ils vinrent s’asseoir à notre table 2 . »<br />

Là se passa une scène assez comique. « Les propagandistes, continue le<br />

père d’Ollières, résolurent <strong>de</strong> nous appeler désormais Monsieur <strong>et</strong> non Père,<br />

en nous saluant (<strong>les</strong> jésuites n’existaient plus pour eux). Tous approuvèrent<br />

c<strong>et</strong>te résolution <strong>et</strong> l’exécutèrent. Mais, pendant le dîner, chaque fois que<br />

c<strong>et</strong>te expression nouvelle sortait <strong>de</strong> <strong>la</strong> bouche <strong>de</strong> quelqu’un d’entre eux,<br />

nous reprenions : révérend père supérieur, père <strong>Amiot</strong>. Ils comprirent <strong>et</strong> se<br />

turent 3 . »<br />

Le 25 août, fête <strong>de</strong> saint Louis, roi <strong>de</strong> France, même <strong>de</strong>scente <strong>de</strong>s<br />

propagandistes à Saint-Sauveur ; même scène au repas <strong>de</strong> midi, auquel ils<br />

se rendirent sans y être invités. Ils agissaient comme s’ils étaient chez eux.<br />

« Il faudrait <strong>de</strong>s volumes, écrit le père d’Ollières, si je vou<strong>la</strong>is raconter<br />

1 M. Bourgeois à M. Bertin, sur <strong>les</strong> accusations <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Ventavon, 21 juin 1781 (Arch. <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

Propag.).<br />

2 Même l<strong>et</strong>tre du père d’Ollières à son frère.<br />

3 Ibid.<br />

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