Joseph Amiot et les derniers survivants de la ... - Chine ancienne
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Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) son diocèse le bref qui détruisait la Société. » Les religieux auxquels le père Bourgeois n’eut pas le don de plaire, furent les trois jésuites français qui se séparèrent de leurs confrères. « Croyant avoir quelque sujet de n’être pas contents de l’administration de leur supérieur, est-il dit dans la lettre du père d’Ollières à son frère, ils reçurent avec avidité la nouvelle de la suppression de leur ordre, et, avant aucune signification juridique, ils se regardèrent et se portèrent p.161 pour sécularisés, et se mirent à procéder contre les autres missionnaires pour les forcer à se reconnaître pour sécularisés. Mais ceux-ci tinrent ferme sur ce principe, que des vœux solennellement prononcés en face des autels, entendus par le peuple chrétien et reçus juridiquement par le supérieur légitime, ne pouvaient cesser d’obliger le religieux que par un acte juridiquement à lui intimé de la part de celui qui peut ou les casser malgré le religieux, ou l’en relever sur sa demande légitimement fondée. En conséquence, ils continuèrent à se porter pour religieux, à traiter leur supérieur en supérieur et lui en exercer les devoirs 1 . Le père Bourgeois, dont le père Amiot loue la bonté et la grandeur d’âme tout en lui reprochant une trop grande fermeté, fît aux sécularisés des remontrances amicales, mais inutilement ; leur parti était pris. Craignant d’être sans ressources après la promulgation du bref, ils réclamèrent encore, ou le partage des biens entre tous les missionnaires, ou la remise à chacun d’une somme suffisante pour faire face aux exigences de la première heure. Le père Bourgeois s’opposa au partage, et, sur le conseil des plus anciens Pères, il accorda la remise 2 . Depuis un mois, il s’était chargé de la procure p.162 à la place du père Colas, démissionnaire. « Il fut résolu, dit le père Bourgeois, que je donnerais à chaque Père environ 1.000 taëls. C’était un viatique pour s’en 1 Le père d’Ollières à son frère, curé de Lexie. 2 Mémoire du père Colas, 20 novembre 1780. 140
Joseph Amiot, la Mission française à Pékin (1750-1795) retourner en Europe, ou un supplément au peu que la Sacrée Congrégation donne aux siens. On supposait alors avec fondement qu’on mettrait sur le même pied qu’eux ceux des nôtres qui resteraient à Pékin. La maison n’était pas fournie en argent. Je vendis du consentement des Pères quelques maisons ; Dès le 1 er octobre 1774, tout fut arrêté, et les rentes de la maison fixées irrévocablement à 6.000 taëls. » Le supérieur ajoute : « Depuis ce temps là, je ne regardai plus les biens de la maison que comme un dépôt que je devais conserver jusqu’à ce qu’il fût décidé à qui il appartenait d’en disposer 1 . » p.163 Les trois sécularisés continuèrent à habiter la résidence des Français, où il étaient nourris et entretenus, mais ils vivaient indépendants, sans règles, déliés, disaient-ils, de leurs vœux par le bref pontifical. Ce bref, les jésuites l’attendaient d’un jour à l’autre. Seuls, les Propagandistes l’avaient reçu directement de leurs amis de Rome et le tenaient soigneusement caché. Le père Bourgeois terminait par ces trois mots sa lettre du 15 mai 1775 à son ami, le père Duprez : François Bourgeois, jésuite. Et à cette lettre il joignait ce post-scriptum qui, dans sa simplicité, déchire l’âme à la veille d’une vocation brusquement brisée, d’un arrêt de mort rendu par un Père, le Père commun des fidèles : « Cher ami, c’est pour la dernière fois qu’il m’est permis de signer ainsi ; le bref est en 1 Bourgeois à Bertin, 21 juin 1781. (Arch. S. J.) Dans cette même lettre, on lit : « Nous avons vendu quelques boutiques 16.000 taëls. J’en distribuai 11.000 tant aux missionnaires européens que chinois ; le père Ciboten assura 2.000 aux missionnaires des provinces dont il était chargé ; 2.000 furent employés au vu et au su de tout le monde à achever la Congrégation que le père Lefebvre, notre supérieur général, m’avait donné ordre de bâtir. Le reste, environ 1.000 taëls, servit à construire une plate-forme qui manquait à notre sépulture, à acheter quelques objets nécessaires et à faire quelques bonnes œuvres. » Le père Bourgeois donne ce compte détaillé pour répondre à de vilaines accusations, qui lui reprochaient d’avoir gardé â son usage une partie du produit de la vente, et il ajoute : « Il ne me reste que ma portion, qui fut la plus petite de toutes. M. de Grammont, qui se plaignait inconsolablement et disait hautement que pour 1.000 taëls il ne pourrait jamais avoir la paix ni me la donner, déterminé que j’étais à laisser désormais intactes les rentes de la maison, plutôt que d’y toucher, j’aimai mieux prendre sur ma portion. Je lui donnai 150 taëls du mien. » — Les bonnes œuvres dont parle le père Bourgeois sont quelques dons faits à trois vieux domestiques des pères Benoist, Cibot et Bourgeois. 141
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<strong>Joseph</strong> <strong>Amiot</strong>, <strong>la</strong> Mission française à Pékin (1750-1795)<br />
r<strong>et</strong>ourner en Europe, ou un supplément au peu que <strong>la</strong> Sacrée Congrégation<br />
donne aux siens. On supposait alors avec fon<strong>de</strong>ment qu’on m<strong>et</strong>trait sur le<br />
même pied qu’eux ceux <strong>de</strong>s nôtres qui resteraient à Pékin. La maison<br />
n’était pas fournie en argent. Je vendis du consentement <strong>de</strong>s Pères<br />
quelques maisons ; Dès le 1 er octobre 1774, tout fut arrêté, <strong>et</strong> <strong>les</strong> rentes <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> maison fixées irrévocablement à 6.000 taëls. »<br />
Le supérieur ajoute : « Depuis ce temps là, je ne regardai plus <strong>les</strong> biens<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> maison que comme un dépôt que je <strong>de</strong>vais conserver jusqu’à ce qu’il<br />
fût décidé à qui il appartenait d’en disposer 1 . »<br />
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Les trois sécu<strong>la</strong>risés continuèrent à habiter <strong>la</strong> rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s<br />
Français, où il étaient nourris <strong>et</strong> entr<strong>et</strong>enus, mais ils vivaient indépendants,<br />
sans règ<strong>les</strong>, déliés, disaient-ils, <strong>de</strong> leurs vœux par le bref pontifical.<br />
Ce bref, <strong>les</strong> jésuites l’attendaient d’un jour à l’autre. Seuls, <strong>les</strong><br />
Propagandistes l’avaient reçu directement <strong>de</strong> leurs amis <strong>de</strong> Rome <strong>et</strong> le<br />
tenaient soigneusement caché.<br />
Le père Bourgeois terminait par ces trois mots sa l<strong>et</strong>tre du 15 mai 1775<br />
à son ami, le père Duprez : François Bourgeois, jésuite.<br />
Et à c<strong>et</strong>te l<strong>et</strong>tre il joignait ce post-scriptum qui, dans sa simplicité,<br />
déchire l’âme à <strong>la</strong> veille d’une vocation brusquement brisée, d’un arrêt <strong>de</strong><br />
mort rendu par un Père, le Père commun <strong>de</strong>s fidè<strong>les</strong> : « Cher ami, c’est<br />
pour <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière fois qu’il m’est permis <strong>de</strong> signer ainsi ; le bref est en<br />
1 Bourgeois à Bertin, 21 juin 1781. (Arch. S. J.) Dans c<strong>et</strong>te même l<strong>et</strong>tre, on lit : « Nous<br />
avons vendu quelques boutiques 16.000 taëls. J’en distribuai 11.000 tant aux missionnaires<br />
européens que chinois ; le père Ciboten assura 2.000 aux missionnaires <strong>de</strong>s provinces dont<br />
il était chargé ; 2.000 furent employés au vu <strong>et</strong> au su <strong>de</strong> tout le mon<strong>de</strong> à achever <strong>la</strong><br />
Congrégation que le père Lefebvre, notre supérieur général, m’avait donné ordre <strong>de</strong> bâtir.<br />
Le reste, environ 1.000 taëls, servit à construire une p<strong>la</strong>te-forme qui manquait à notre<br />
sépulture, à ach<strong>et</strong>er quelques obj<strong>et</strong>s nécessaires <strong>et</strong> à faire quelques bonnes œuvres. » Le<br />
père Bourgeois donne ce compte détaillé pour répondre à <strong>de</strong> vi<strong>la</strong>ines accusations, qui lui<br />
reprochaient d’avoir gardé â son usage une partie du produit <strong>de</strong> <strong>la</strong> vente, <strong>et</strong> il ajoute : « Il<br />
ne me reste que ma portion, qui fut <strong>la</strong> plus p<strong>et</strong>ite <strong>de</strong> toutes. M. <strong>de</strong> Grammont, qui se<br />
p<strong>la</strong>ignait inconso<strong>la</strong>blement <strong>et</strong> disait hautement que pour 1.000 taëls il ne pourrait jamais<br />
avoir <strong>la</strong> paix ni me <strong>la</strong> donner, déterminé que j’étais à <strong>la</strong>isser désormais intactes <strong>les</strong> rentes<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> maison, plutôt que d’y toucher, j’aimai mieux prendre sur ma portion. Je lui donnai<br />
150 taëls du mien. » — Les bonnes œuvres dont parle le père Bourgeois sont quelques dons<br />
faits à trois vieux domestiques <strong>de</strong>s pères Benoist, Cibot <strong>et</strong> Bourgeois.<br />
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