Luang Prabang, capitale laotienne du tourisme - Enfants du Mékong
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Laos d’aujourd’hui<br />
Mais aujourd’hui, sur la ligne de crête qui<br />
entoure la péninsule, les nuages circulent<br />
au ralenti. Ce sont de beaux stratus, ici ou<br />
là traversés de rayons de soleil qui vont<br />
s’épanouir sur les toits rouges de la « Perle<br />
<strong>du</strong> <strong>Mékong</strong> ». Le spectacle n’est pas désagréable<br />
mais soudain, fendant l’air à son<br />
tour, un avion plonge, passe au-dessus de<br />
la rivière Nam Khan et s’en va atterrir juste<br />
après le fouillis de palmiers lataniers. Sur<br />
son fuselage blanc et bleu se dessine une<br />
fleur de frangipanier, fier emblème de la<br />
compagnie Lao Aviation qui effectue des<br />
liaisons quotidiennes entre <strong>Luang</strong> <strong>Prabang</strong><br />
et Bangkok, Chiang Mai, Hanoi et Siem<br />
Reap… soit les villes les plus touristiques<br />
d’Asie <strong>du</strong> Sud-Est.<br />
Depuis la fin de la guerre froide, le Laos<br />
s’est ouvert de façon spectaculaire au<br />
<strong>tourisme</strong>. Moins de 20 000 personnes<br />
avaient visité le pays en 1996. En 2007,<br />
l’Autorité nationale <strong>laotienne</strong> <strong>du</strong> <strong>tourisme</strong><br />
(LATA) a déclaré plus d’1,5 million de visiteurs.<br />
Après son inscription au patrimoine<br />
mondial de l’humanité par l’Unesco en<br />
1995, et grâce à l’Agence française de<br />
développement qui finance en grande<br />
partie la rénovation et la conservation<br />
des 600 édifices classés de la ville, <strong>Luang</strong><br />
<strong>Prabang</strong> est devenue la destination phare<br />
<strong>du</strong> Laos. « Sa structure urbaine originale<br />
qui mêle harmonieusement architecture<br />
coloniale française et temples bouddhistes<br />
lui procure une image férocement<br />
marquée d’exotisme, de romantisme, de<br />
lyrisme et de mysticisme » peut-on lire<br />
dans les brochures, qui conseillent également<br />
de « compter trois jours pour<br />
<strong>Luang</strong> <strong>Prabang</strong> ».<br />
En quelques années, cafés internet et<br />
guest houses ont fleuri à <strong>Luang</strong> <strong>Prabang</strong>,<br />
aussi bien que les parterres d’orchidées<br />
blanches, d’hibiscus ou de bougainvillées.<br />
Sur Chao Fa Ngum road, la rue principale,<br />
les restaurants affichent des cartes où<br />
cheeseburgers, pizzas et autres pâtes alla<br />
carbonara ont remplacé le traditionnel laap<br />
et s’intercalent tant<br />
bien que mal entre<br />
boutiques de souvenirs<br />
et agences de<br />
voyage. Partout, il<br />
est possible de régler<br />
ses achats en bahts<br />
(la monnaie thaïlandaise),<br />
en dollars ou<br />
en euros. Quant à la<br />
population… Le routard<br />
en short repousse<br />
progressivement<br />
les moines en robe<br />
safran dans l’enceinte<br />
de leurs temples.<br />
Les enfants<br />
jouent toujours dans<br />
les cours des écoles<br />
mais ne s’en précipitent pas moins vers ce<br />
nouvel ami qui porte beau ses Ray-Ban<br />
Aviator et qui, le sourire aidant, finira bien<br />
par leur acheter un lot de cartes postales.<br />
En fait, deux sortes de <strong>Luang</strong> Prabanais<br />
se côtoient dans les rues de la « cité aux<br />
mille pagodes » : ceux qui vivent <strong>du</strong> <strong>tourisme</strong><br />
et ceux qui n’en vivent pas. Selon<br />
une note <strong>du</strong> ministère français des Affaires<br />
étrangères relative à la place <strong>du</strong> secteur<br />
touristique dans le développement des<br />
pays émergents, l’emploi non qualifié et<br />
semi-qualifié dans les hôtels ne représente<br />
que 10% <strong>du</strong> chiffre d’affaires lié au <strong>tourisme</strong>.<br />
Autant dire une paille. Bo pen nhang<br />
vous diront les Laotiens – que Mouhot<br />
décrivait comme « paisibles, soumis,<br />
patients, sobres, confiants, cré<strong>du</strong>les,<br />
superstitieux, fidèles, simples et naïfs ».<br />
Tant de qualités qui ne les préparent pas<br />
forcément à l’inéluctable « touristisation »<br />
de leur pays. ■<br />
Dans les années 90, le Laos comptait moins de 20 000 visiteurs par an.<br />
Ils étaient plus d’1,5 million en 2007.<br />
OH ! PÉTANQUE !<br />
Décidément, il en faut peu pour être heureux<br />
au Laos… Dix mètres carrés de terre, quelques<br />
rondins de bambous pour délimiter un périmètre,<br />
un bouquet de palmiers pour l’ombre<br />
salvatrice… et voilà un terrain de pétanque.<br />
Ces terrains-là, sommaires mais non improvisés,<br />
foisonnent à <strong>Luang</strong> <strong>Prabang</strong>. Et pas seulement,<br />
car le Laos entier est un de ces pays<br />
de cocagne où, à toute heure <strong>du</strong> jour, il est bon<br />
de se réunir pour taquiner le cochonnet, une<br />
bière Beerlao à la main à la place <strong>du</strong> pastis de<br />
rigueur. Qu’aurait dit Pagnol si, flânant dans<br />
les rues de <strong>Luang</strong> <strong>Prabang</strong>, il s’était avisé<br />
qu’on y jouait à la pétanque avec une nonchalance<br />
aussi religieuse qu’à Aubagne, lui qui<br />
aimait rappeler que « Dieu aime les joueurs<br />
de boules puisqu’il a fait les feuilles des platanes<br />
proportionnées à la force <strong>du</strong> soleil » ?<br />
MAGAZINE N°154 ❚ SEPTEMBRE - OCTOBRE 2008 ❚ 21