fanees. Elle avait tres chaud, en s'avancant au milieu de cet envolement continu, qui l'egayait. —Ah! ma petite, dit Palmyre, de sa voix dolente, on voit bien que tu es jeune... Demain, tu sentiras tes bras. Mais elles n'etaient point seules, tout Rognes fauchait et fanait, dans les pres, autour d'elles. Avant le jour, Delhomme se trouvait la, car l'herbe, trempee de rosee, est tendre a couper, comme du pain mollet, tandis qu'elle durcit, a mesure que le soleil la chauffe; et on l'entendait bien, resistante et sifflante a cette heure sous la faux, dont la volee allait et revenait, continuellement, au bout de ses bras nus. Plus pres, touchant l'herbage de la ferme, il y avait deux parcelles, l'une appartenant a Macqueron, l'autre a Lengaigne. Dans la premiere, Berthe, vetue en demoiselle d'une robe a volants, coiffee d'un chapeau de paille, avait suivi les faneuses, par distraction; mais, lasse deja, elle restait appuyee sur sa fourche, a l'ombre d'un saule. Dans l'autre, Victor, qui fauchait pour son pere, venait de s'asseoir et, son enclume entre les genoux, battait sa faux. Depuis cinq minutes, au milieu du grand silence frissonnant de l'air on ne distinguait plus que ce martelement obstine, les petits coups presses du marteau sur le fer. Justement, Francoise arriva pres de Berthe. —Hein? t'en as assez! —Un peu, ca commence... Quand on n'en a pas l'habitude! Elles causerent, elles parlerent de Suzanne, la soeur a Victor, que les Lengaigne avaient mise dans un atelier de couture, a Chateaudun, et qui, au bout de six mois, s'etait envolee a Chartres, pour faire la vie. On la disait sauvee avec un clerc de notaire, toutes les filles de Rognes en chuchotaient, revaient des details. Faire la vie, c'etaient des orgies de sirop de groseille et d'eau de Seltz, au milieu d'une debandade d'hommes, des douzaines vous passant a la file sur le corps, dans des arriere−boutiques de marchands de vins. —Oui, ma chere, c'est comme ca... Ah! elle en prend! Francoise, plus jeune, ouvrait des yeux stupefies. —En voila un amusement! dit−elle enfin. Mais, si elle ne revient pas, les Lengaigne vont donc etre seuls, puisque Victor est tombe au sort. Berthe, qui epousait la haine de son pere, haussa les epaules: il s'en fichait bien, Lengaigne! il n'avait qu'un regret, celui que la petite ne fut pas restee a se faire culbuter chez lui, pour achalander son bureau de tabac. Est−ce qu'un vieux de quarante ans, un oncle a elle, ne l'avait pas eue deja, avant qu'elle partit a Chateaudun, un jour qu'ils epluchaient ensemble des carottes? Et, baissant la voix, Berthe, dit avec les mots, comment ca s'etait passe. Francoise, pliee en deux, riait a s'etouffer, tant ca lui semblait drole. —Oh! la, la, est−ce bete qu'on se fasse des machines pareilles! Elle se remit a sa besogne, elle s'eloigna, soulevant des fourchees d'herbe, les secouant dans le soleil. On entendait toujours le bruit persistant du marteau, qui tapait le fer. Et, quelques minutes plus tard, comme elle s'etait rapprochee du jeune homme assis, elle lui adressa la parole. —Alors, tu vas partir soldat? —Oh! en octobre... J'ai le temps, ce n'est pas presse. <strong>La</strong> <strong>Terre</strong> Elle resistait a l'envie de le questionner sur sa soeur, elle en causa malgre elle. IV 70
—Est−ce vrai, ce qu'on raconte, que Suzanne est a Chartres? Mais lui, plein d'indifference, repondit: —Parait... Si ca l'amuse! Tout de suite, il reprit, en voyant au loin poindre Lequeu, le maitre d'ecole, qui semblait arriver par hasard, en flanant: —Tiens! en v'la un pour la fille a Macqueron... Qu'est−ce que je disais? Il s'arrete, il lui fourre son nez dans les cheveux... Va, va, sale tete de pierrot, tu peux la renifler, tu n'en auras que l'odeur! Francoise s'etait remise a rire, et Victor tombait maintenant sur Berthe, par haine de famille. Sans doute, le maitre d'ecole ne valait pas cher, un rageur qui giflait les enfants, un sournois dont personne ne connaissait l'opinion, capable de se faire le chien couchant de la fille pour avoir les ecus du pere. Mais Berthe, elle non plus, n'etait guere catholique, malgre ses grands airs de demoiselle elevee en ville. Oui, elle avait beau porter des jupes a volants, des corsages de velours, et se grossir le derriere avec des serviettes, le par−dessous n'en etait pas meilleur, au contraire, car elle en savait long, on en apprenait davantage en s'eduquant a la pension de Cloyes, qu'en restant chez soi a garder les vaches. Pas de danger que celle−la se laissat de sitot coller un enfant: elle aimait mieux se detruire toute seule la sante! —Comment ca? demanda Francoise, qui ne comprenait point. Il eut un geste, elle devint serieuse, et dit sans gene: —C'est donc ca qu'elle vous lache toujours des saletes et qu'elle se pousse sur vous! Victor s'etait remis a battre son fer. Dans le bruit, il rigola, tapant entre chaque phrase. —Puis, tu sais, N'en−a−pas... —Hein? —Berthe, pardi!... N'en−a−pas, c'est le petit nom que les garcons lui donnent, a cause qu'il ne lui en a pas pousse. —De quoi? —Des cheveux partout... Elle a ca comme une gamine, aussi lisse que la main! —Allons donc, menteur! —Quand je te dis! —Tu l'as vue, toi? —Non, pas moi, d'autres. —Qui, d'autres? <strong>La</strong> <strong>Terre</strong> —Ah! des garcons qui l'ont jure a des garcons que je connais. IV 71
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—Non, plus rien, vous etes assez
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La Terre Et il continua sa route. L
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—C'est ma soeur, mais qu'elle ne
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de recommencer ca, avec ce garcon.
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de vous etre refuse un fin morceau?
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—Maintenant, retourne−toi. Il c
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son pere, feignant de ne pas l'avoi
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terre; ca le tenait si fort, qu'il
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—Ah! ouiche! j'ai vu justement ce
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Coelina, qui servait, eut un geste
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Hourdequin eclata d'un gros rire a
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Tous fremirent, et ce soulard de Je
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elle n'eut plus qu'une envie, quitt
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marchait, ca commencait a etre amus
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D'un saut, Buteau se trouva debout,
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deux mioches, lachant des injures,
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son elan, tapant de la tete ainsi q
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alle jusqu'au bout, sans omettre un
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—Comment, pourquoi? Mais parce qu
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Alors Buteau se rua, pesa de tout l
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Lorsque, vers neuf heures, Jean eut
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Les Buteau, lorsqu'ils apercurent J
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souffrir dans cette vie. Lorsque De
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