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Yerushalaim 31 2002-4.pdf - Chretiens-juifs.org

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simple repentir. Elle est un éveil de conscience<br />

qui entraîne un changement d'esprit, au-delà de<br />

tout « devoir de mémoire », au-delà de tout<br />

jugement d'histoire. C'est bien le paradoxe; nous<br />

devons nous souvenir et nous ne le pouvons<br />

que de ce que nous avons peu à peu appris et<br />

compris d'un drame et d'un crime dont la plupart,<br />

alors, n'ont eu qu'une idée faible et lointaine.<br />

Nous sommes embarqués dans une affaire de<br />

très longue haleine, coextensive à la totalité de<br />

l'histoire chrétienne.<br />

Qui en doute n'aura qu'à lire, récemment<br />

publiée (6), la conférence du cardinal Lustiger,<br />

prononcée le 20 octobre 1998 à la synagogue<br />

de New York où lui était remise la médaille<br />

Nostra aetate du Centre pour la compréhension<br />

entre <strong>juifs</strong> et chrétiens en même temps qu'au<br />

grand rabbin René-Samuel Sirat. Un texte fort,<br />

jailli du plus profond de lui-même, acte de<br />

théologien plus encore que de pasteur. Un texte<br />

audacieux et même étonnant dont la portée, par<br />

la force des choses, déborde le sujet. En effet,<br />

l'avenir des relations entre <strong>juifs</strong> et chrétiens ne<br />

suppose pas seulement qu'on apure le passé : il<br />

engage une conception de l'Église et de sa<br />

tâche dans le monde de ce temps.<br />

A l'origine, la séparation n'a pas été<br />

immédiate (un bon demi-siècle). Elle fut<br />

l'aboutissement d'une double et radicale<br />

divergence: la messianité de Jésus, le Christ; la<br />

gentilité, ouverte, de l'Église, qui explique sa<br />

pénétration dans la société païenne et sa<br />

reconnaissance publique au quatrième siècle.<br />

Chacun revendiquait seul la totalité de l'héritage.<br />

La suite n'est que l'histoire envenimée de ce<br />

désaccord originel, avec ses dérives jusqu'à<br />

nous, dans « un rapport de force totalement<br />

inégal ».<br />

C'est ainsi que <strong>juifs</strong> et chrétiens se sont<br />

«méconnus et méprisés dans l'obscurité de<br />

l'histoire» explique Mgr Lustiger. La douleur de<br />

l'histoire et ses aveuglements nous ont obscurcis<br />

au point de ne reconnaître ni Israël en son<br />

Messie, ni le Messie caché en Israël... ». Dès<br />

lors, « la figure du Juste souffrant (...) demeure<br />

le lieu commun aux <strong>juifs</strong> et aux chrétiens, mais<br />

où la contradiction atteint en même temps sa<br />

plus grande intensité ».<br />

Aujourd'hui, les <strong>juifs</strong> rentrent dans<br />

l'histoire commune ; par leur contribution à<br />

« l'universalisme séculier » et, désormais, l'État<br />

d'Israël, À l'inverse, l'Église, qui avait tant misé<br />

sur une histoire glorieuse, se redécouvre<br />

engagée dans une histoire douloureuse et<br />

renonce à occuper « l'espace des pouvoirs<br />

temporels » et à se présenter comme « la<br />

réalisation ici-bas du Royaume d'En-haut ».<br />

Sans la moindre concession au libéralisme<br />

moderne, elle sort d'un intégralisme triomphant<br />

où son espérance s'était laissé absorber par le<br />

temps de l'histoire et des nations.<br />

Cette compréhension neuve n'en est qu'à<br />

ses débuts; il lui reste à produire ses effets et à<br />

pénétrer les esprits. Elle est un chapitre<br />

essentiel de cet « esprit nouveau » apparu<br />

petitement en France à la fin du siècle dernier et<br />

aussitôt mis en échec par l'affaire Dreyfus.<br />

Le pape Jean-Paul II à Rome et à Jérusalem<br />

L'évolution suivait son cours. Et voilà<br />

qu'elle s'est précipitée de façon décisive: à<br />

Rome, le 12 mars 2000, premier dimanche de<br />

Carême, avec la grande liturgie pénitentielle<br />

voulue et conduite par Jean-Paul II, précédant<br />

d'une semaine son voyage en Terre sainte,<br />

achevé à Jérusalem.<br />

Il existe, au cœur du judaïsme et du<br />

christianisme, une tradition ininterrompue de<br />

conversion du cœur et de pénitence qui a pris,<br />

dans l'Église catholique, des formes<br />

particulières : la prière latine «Confiteor» aux<br />

usages variés, la confession privée auriculaire,<br />

les jubilés qui scandent l'histoire chrétienne<br />

depuis le Moyen-Age, les pardons populaires<br />

associés à des lieux de pèlerinage, etc. C'est<br />

ainsi que Jean-Paul II a promulgué, à l'occasion<br />

du passage au troisième millénaire, une grande<br />

année jubilaire, novatrice à un double titre. En<br />

premier lieu, frappe l'ampleur des demandes<br />

qu'il a adressées à l'entière humanité ( à<br />

commencer par la remise de leur dette aux pays<br />

les plus pauvres ), et dont l'écho est resté fort<br />

modeste (7). En second lieu - et il a déclenché là<br />

un considérable tapage médiatique -, au pardon<br />

accordé par l'Église à ses fidèles il a ajouté, fait<br />

sans précédent, le pardon demandé par<br />

l'Église ; sur sept points dont le quatrième<br />

confesse «les fautes commises dans les<br />

relations avec Israël».<br />

Selon le rituel de la cérémonie, le<br />

cardinal Cassidy a commencé par demander<br />

<strong>Yerushalaim</strong> n°<strong>31</strong> - page 25

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