Les Spécificités Architecturales des Mosquées au Maroc

1ExposésMassajidFr5 5/03/08 23:47 Page 106
Tous ces édifices sacrés dans le monde rural témoignent de la force des enceintes
sacrées nourricières : les zawyas se dressent comme des vaisseaux de pierre ou de terre
entre les franges présahariennes desséchées et les petites vallées prospères des
montagnes, : Assa, Illigh du Tazewalt, Imi n’Tatelt (Fondation : au XVI e siècle
miladiya), Tamegrout, Smara ou encore Timgilcht, vont incarner une spécificité locale,
marocaine. Dans ces zawyas, sur la longue durée, le pèlerin, le voyageur comme le
fugitif est accueilli, nourri ; par les représentants de ces zawyas, les conflits y sont
résolus. Un lieu saint est donc un morceau d’histoire mais aussi, pour les populations,
un morceau de mémoire. Cette mémoire se vit par des pratiques propres, ancrées dans
le lieu et sur lesquelles toute restauration doit s’appuyer. Or, actuellement, on remarque
que les rénovations des lieux sacrés tendent à transformer les usages cultuels
traditionnels et à réadapter les lieux en tenant rarement compte des plans originaux.
Pourtant, les espaces portent toujours en eux des usages. Ces usages, multiples,
riches, expriment une foi sincère (niya) qui font la force de l’Islam du Maroc. En
effaçant les lieux, en transformant les espaces, on efface aussi les usages et les
traditions attachées aux lieux.
L’argument de l’extension moderniste n’est pas recevable
Ceci est trop souvent négligée par des communautés pressées de faire œuvre de
bienfaisance en effaçant la mémoire des pratiques au nom également d’une orthodoxie
rigide oublieuse des hommes et de leur histoire. Les lieux sacrés hérités d’économie de
pénurie dans des pays de la faim et de la soif, sont souvent considérés du fait de leurs
matériaux (terre et pierre) et de leurs dimensions (parfois modestes) comme le produit
d’archaïsmes. Les nouvelles communautés de croyants veulent effacer ce passé pour
montrer leur richesse actuelle et la débauche de moyens financiers devient la plus grande
preuve de leur foi. Si cela trouve son sens pour la construction de lieux nouveaux, pour
les lieux anciens en revanche, trop souvent cela s’apparente à une mutilation, une
destruction partielle ou totale, qui correspond à une atteinte à la culture locale.
Aujourd’hui, les besoins en nouveaux espaces d’accueil ou de prière dans un
contexte de croissance démographique doivent se concrétiser par des mosquées de
qualité qui font la part belle à la création dans le contexte socio-culturel marocain et
selon l’héritage local spécifique d’une région donnée. Cependant ces nouveaux
besoins ne doivent pas se faire CONTRE les espaces anciens. Il ne faut pas détruire le
patrimoine au nom de besoins nouveaux qui peuvent se concrétiser dans les quartiers
d’extension récente des villes ou villages. La nouvelle mode ou le pis-aller de
préserver les mosquées anciennes pour les femmes doit nous alerter : cela ne doit pas
être un premier niveau de mépris à l’égard des espaces anciens qui les fera tôt ou tard
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