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ISRAËL - Consistoire de Paris

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<strong>de</strong> 1904, dans une jolie rue arborée aux<br />

trottoirs défoncés, qui mène aux bains <strong>de</strong><br />

soufre publics et au fleuve, à <strong>de</strong>ux pas<br />

d’une mosquée et d’une église. L’office<br />

du samedi matin est fini <strong>de</strong>puis plus<br />

d’une heure mais un homme d’une<br />

soixantaine d’années, le regard bleu<br />

délavé, me propose placi<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> me<br />

faire visiter les lieux : fraîchement<br />

restauré, le bâtiment héberge en fait <strong>de</strong>ux<br />

synagogues : celle du premier étage n’est<br />

ouverte que pour les gran<strong>de</strong>s fêtes. Dans<br />

le même quartier, on trouve aussi une<br />

école juive, un mikhvé, une boucherie et<br />

une épicerie cachère.<br />

L’une <strong>de</strong>s plus anciennes minorités<br />

du pays, la présence <strong>de</strong> Juifs en<br />

Géorgie remonterait à l’antiquité :<br />

dans le traité Roch Hachana, le<br />

Talmud fait d’ailleurs mention d’une<br />

communauté que Rabbi Akiva serait<br />

allé visiter. La légen<strong>de</strong> veut que <strong>de</strong>s<br />

exilés du royaume <strong>de</strong> Juda, après la<br />

<strong>de</strong>struction du premier temple par<br />

Nabucho-donosor, s’y soient installés.<br />

De là proviendrait le nom qu’ils<br />

s’attribuent : les guriyim ou<br />

lionceaux, emblème du royaume <strong>de</strong><br />

Juda. En 1270, le grand voyageur<br />

vénitien Marco Polo parle <strong>de</strong><br />

“l’influence <strong>de</strong>s marchands juifs dans<br />

les villes <strong>de</strong> Géorgie”. A l’exception<br />

d’une vague <strong>de</strong> persécutions au XVè<br />

siècle, les Juifs géorgiens ont toujours<br />

connu une liberté <strong>de</strong> culte et<br />

servaient les seigneurs féodaux du<br />

coin au même titre que le reste <strong>de</strong> la<br />

population.<br />

Cela change au 19ème siècle, avec<br />

l’annexion du pays par la Russie : les<br />

Russes exportent leur antisémitisme et<br />

votent une mesure d’expulsion en 1835<br />

qu’ils doivent abandonner, face aux<br />

violentes protestations locales. Rejoints<br />

progressivement par <strong>de</strong>s Juifs ashkénazes<br />

venus <strong>de</strong> Russie, les juifs géorgiens sont<br />

bien distincts ; ils ont leur propre langue<br />

et culture : le kivrouli, un mélange <strong>de</strong><br />

géorgien, langue caucasienne à<br />

l’alphabet unique très ancien, et d’hébreu.<br />

La première organisation sioniste <strong>de</strong><br />

Géorgie est créée en 1897, créant <strong>de</strong>s<br />

liens entre ces juifs <strong>de</strong> culture si différente.<br />

Quatre ans plus tard, le premier congrès<br />

<strong>de</strong>s Sionistes du Caucase se tient à<br />

Tbilissi. En 1918, lors <strong>de</strong> la brève<br />

indépendance <strong>de</strong> la Géorgie (à nouveau<br />

sous le joug soviétique, dès 1921), les<br />

Juifs géorgiens prennent fait et cause<br />

pour la monarchie, tandis que ceux venus<br />

<strong>de</strong> Russie soutiennent la révolution.<br />

S’ouvrent alors écoles, journaux,<br />

synagogues, et même un musée<br />

ethnographique et historique juif (1933),<br />

fermé en 1951 par les Soviétiques.<br />

Pendant la secon<strong>de</strong> guerre mondiale,<br />

beaucoup meurent sur le front russe.<br />

Tandis que <strong>de</strong>s Juifs d’Ukraine ou <strong>de</strong><br />

Russie se réfugient dans les montagnes<br />

du Caucase et en Géorgie pour fuir la<br />

botte nazie, comme ce fut le cas <strong>de</strong> la<br />

mère du charmant monsieur qui me<br />

servait <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>, à la synagogue <strong>de</strong> la rue<br />

La synagogue <strong>de</strong> Tbilissi<br />

Kozeveny. Dès les années 1970, <strong>de</strong>s Juifs<br />

géorgiens parviennent à émigrer au<br />

compte-goutte vers Israël, sous la pression<br />

<strong>de</strong> Golda Meïr et d’instances<br />

internationales. En 1991, après la chute<br />

du mur, <strong>de</strong>s dizaines <strong>de</strong> milliers <strong>de</strong> juifs<br />

géorgiens s’installent en Israël, aux Etats-<br />

Unis et au Canada. La communauté<br />

passe ainsi en une génération <strong>de</strong> 80 000<br />

à 10 000 juifs environ, la plupart vivant<br />

dans la capitale. Pendant la guerre <strong>de</strong><br />

2008, l’Agence juive vient au secours <strong>de</strong><br />

familles juives vivant à Gori -ville natale<br />

<strong>de</strong> Staline, bombardée alors par les<br />

Russes- parvenant à évacuer <strong>de</strong>ux cents<br />

d’entre eux vers Israël.<br />

REPORTAGE<br />

Ce petit pays <strong>de</strong> 4,5 millions<br />

d’habitants, charnière entre l’Europe et<br />

l’Asie, a connu <strong>de</strong>s dizaines d’invasions<br />

au cours <strong>de</strong> son histoire (mongols, turcs<br />

perses, et bien sûr russe), luttant sans<br />

cesse pour conserver son i<strong>de</strong>ntité. La<br />

récente poussée <strong>de</strong> fièvre nationaliste et<br />

chrétienne orthodoxe née après la chute<br />

du mur, a légèrement écorné la tradition<br />

millénaire <strong>de</strong> tolérance géorgienne. Des<br />

tensions sont apparues, mais elles<br />

<strong>de</strong>meurent marginales par rapport au<br />

reste <strong>de</strong> la région. Les Juifs jouissent<br />

d’une totale liberté <strong>de</strong> culte et d’aucune<br />

discrimination gouvernementale. Au<br />

contraire : en 2009, le prési<strong>de</strong>nt<br />

Mikhaïl Saakashvili a tenu à<br />

participer à l’inauguration <strong>de</strong> la<br />

<strong>de</strong>uxième synagogue <strong>de</strong> Tbilissi. Et<br />

son gouvernement compte <strong>de</strong>s<br />

ministres juifs, dont Temur<br />

Yakobashvili, vice-premier ministre<br />

en charge <strong>de</strong>s question d’intégration,<br />

présent au colloque.<br />

Quant à l’église orthodoxe, citons<br />

l’accord <strong>de</strong> respect et d’appui mutuel<br />

signé en 2001 avec la communauté<br />

juive, pour œuvrer pour la<br />

démocratie, la paix et la stabilité <strong>de</strong><br />

la région.<br />

Le voyage ne dure que quatre<br />

jours. Dommage, car le 26 mai, jour<br />

<strong>de</strong> l’indépendance géorgienne, a eu<br />

lieu un événement hors du<br />

commun, organisé par SOS<br />

Racisme et l’Union <strong>de</strong>s Etudiants<br />

Juifs <strong>de</strong> France : une marche vers<br />

Enguri et un concert à Zugdidi,<br />

immense camp <strong>de</strong> réfugiés situé à la<br />

lisière <strong>de</strong> la ligne <strong>de</strong> démarcation <strong>de</strong><br />

l’Abkhazie. Cette région à l’ouest <strong>de</strong> la<br />

Géorgie est toujours occupée par<br />

l’armée russe <strong>de</strong>puis la guerre <strong>de</strong> 2008,<br />

qui viole <strong>de</strong> fait le cessez-le feu signé<br />

sous l’égi<strong>de</strong> <strong>de</strong> Nicolas Sarkozy. Là, 300<br />

Certaines causes attirent apparemment<br />

moins l'attention <strong>de</strong> la communauté<br />

internationale que d'autres<br />

000 réfugiés, chassés d’Abkhazie et<br />

d’Ossétie du Sud, campent toujours.<br />

Pour l’occasion, Jane Birkin, MC Solaar<br />

et Youssou N’Dour ont, entre autres,<br />

fait le déplacement. Certaines causes<br />

attirent apparemment moins l’attention<br />

<strong>de</strong> la communauté internationale que<br />

d’autres…<br />

INFORMATION JUIVE Septembre 2010 23

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