ISRAËL - Consistoire de Paris

REPORTAGE
Carnet de voyage :
Heureux comme un juif en Géorgie !
Avant le 14 mai dernier, la
Géorgie n’évoquait pour
moi qu’une guerre-éclair
avec la Russie en août 2008
et un film israélien hilarant,
“Mariage Tardif”, dans
lequel une famille de gruzinim, juifs
géorgiens émigrés en Israël, grégaires et
primaires à souhait, faisaient tout pour
empêcher le héros d’épouser une jolie
juive marocaine divorcée. J’en avais
22 INFORMATION JUIVE Septembre 2010
hommage aux populations démunies
vivant le long de l’oléoduc, véritable poule
aux œufs d’or du pays dont ils ne voient
pourtant pas les fruits.
Je rencontre également une jeune
femme, Katia Kotrikaze, directrice à 28
ans de la première chaîne caucasienne,
chaîne de télévision russophone
récemment supprimée du bouquet
satellitaire français Eutelsat. Elle y voit
bien sûr la main des Russes, et non une
Ce petit pays de 4,5 millions d'habitants, charnière
entre l'Europe et l'Asie, a connu des dizaines
d'invasions au cours de son histoire (mongols, turcs
perses, et bien sûr russe), luttant sans cesse pour
conserver son identité.
déduit que les Géorgiens étaient
nationalistes, traditionnels à la limite de
l’archaïsme, pas si éloignés des parrains
siciliens ou yougoslaves, la grossièreté et
le burlesque en plus.
Par un semi-hasard, me voici
embarquée dans un voyage organisé par
le gouvernement géorgien et son
conseiller politique, Raphäel Glucksman,
fils du philosophe, engagé depuis
plusieurs années dans la lutte pour la
liberté des peuples du Caucase, contre
l’hégémonie russe. Le but de ce voyage
était d’assister à une nuit du
photojournalisme organisée en
partenariat avec le fameux festival d’Arles
et d’inaugurer la maison de l’Europe de
Tbilissi : un joli immeuble début de
siècle, fraîchement restauré sur la place
de la liberté, ex-place Lénine, tout un
symbole… Dans ce lieu destiné à la
liberté d’expression, colloques et
expositions artistiques sont à l’honneur.
Rena Effendi, photographe azérie
engagée, dont le travail est censuré dans
son pays, reçoit ce soir là le prix Magnum
du jeune photographe caucasien. Son
exposition est un puissant voyage
poético-social en noir et blanc,
misérabiliste diront certains, qui rend
simple décision commerciale. Au
lendemain de notre arrivée doit s’ouvrir
le procès qui décidera de l’avenir de la
chaîne, provisoirement condamnée à se
contenter d’une diffusion sur Internet…
15 mai. Début du colloque sur les
rapports entre la Géorgie et l’Europe. Le
message est clair. Le survitaminé
président Mikhaïl Sakachvili, qui nous
Une vue générale de la capitale
PAR HÉLÈNE HADAS-LEBEL
fait l’honneur d’une visite éclair en
pleines élections municipales, ouvre la
discussion en rappelant combien les
valeurs de la jeune démocratie
géorgienne, déjà membre du Conseil de
l’Europe, aspire à se rapprocher de toutes
les manières possibles, de l’Union
européenne dont elle partage les valeurs.
Discussions sympathiques mais vœux
pieux quand on sait que la candidature
d’entrée de la Géorgie dans l’union
européenne n’est nulle part inscrite à
l’ordre du jour, loin encore derrière la
Moldavie, l’Ukraine ou la Turquie !)
Au gré de mes promenades dans
Tbilissi, la capitale, je découvre une ville
romantique et ombragée, chérie des
poètes russes Lermontov et Pouchkine,
aux influences mêlées : maisons décaties
à deux étages et aux balcons de bois
ouvragés évoquant la Turquie, enserrées
entre rivière et collines verdoyantes. Mais
aussi, larges ronds-points et grandes
artères pré-soviétiques, bordées de
boutiques, d’un théâtre coquet, d’une
grande université et de l’imposant
Parlement devant lequel toute occasion
est bonne pour manifester !
Je me dirige enfin vers la synagogue :
un haut bâtiment de brique rouge datant