ISRAËL - Consistoire de Paris

Une girouette nommée
Avraham Burg
Pas de doute : cet homme se
croit profond et intelligent
alors qu'il n'est qu'ironique
et stupide. Il est devenu en
très peu de temps l'homme
le plus cynique du
panorama politique israélien. Voilà six
ans, après qu'il ait occupé les postes les
plus importants dans la société -
président de la Knesset, président de
l'Agence juive, président de
l'Organisation sioniste mondiale - il
avait un beau matin annoncé avec
fracas qu'il ne croyait plus ni en Dieu,
ni à l'action politique, encore moins au
sionisme. Et qu'il décidait donc de
quitter le monde politique pour celui
des affaires. On parla de lui dans les
Avraham Burg
gazettes durant quelques jours puis il
retomba dans le néant médiatique d'où,
en vérité, il n'aurait jamais dû sortir et
dans lequel, sans doute, il devait se
sentir chez lui comme disait
Clemenceau.
Membre du parti travailliste durant
des années, il avait la particularité de
porter ostensiblement une kippa mais
ses collègues savaient ou devinaient
qu'elle n'avait pas, pour lui, la moindre
signification religieuse. Les rabbins s'en
amusaient et les journalistes s'en
moquaient. Peut-être la portait-il, cette
kippa, pour se distinguer dans une
formation politique au sein de laquelle
il y avait à l'époque nombre de petits
pères Combe, en version israélienne,
qui bouffaient du rabbin matin et soir.
Il était le fils d'un des hommes les
plus flamboyants (et les plus
machiavéliques) de la classe politique
du pays :Yossef Burg. Son père avait
été l'un des fondateurs du parti national
religieux. Il faisait et défaisait les
gouvernements parce que son
minuscule parti était indispensable à
tout candidat au poste de premier
ministre. Et c'est ainsi que les
gouvernements passaient et Yossef était
toujours ministre. Inamovible. Tantôt le
portefeuille des cultes, tantôt celui de
l'Intérieur. Comme beaucoup au sein
de sa formation, Yossef Burg était un
intrigant hors pair. Il savait
beaucoup promettre et, à
l'heure de tenir, il s'en
sortait par une pirouette
et par un de ces mots
d'humour dont il avait le
secret. C'est qu'il était sans
doute - avec M. Lévi
Eshkol, l'ancien premier
ministre- le meilleur
spécialiste de l'humour
juif. Voici, à titre
d'exemple, deux mots
d'esprit qu'il m'a tenus un
jour : “La démocratie est
une très belle chose mais
il est dommage qu'elle soit
enlaidie par les élections”
; d'un collègue, membre de la Knesset,
il disait : “Je ne sais pourquoi il m'en
veut tellement, je ne lui ai pourtant
rendu aucun service”.
Le fils, Avraham, lui, est - c'est sûr -
dénué du moindre gramme d'humour.
Sans quoi , aurait-il, tout honte bue,
agressé, le 6 août dernier, la société
israélienne en tenant au journal
Maariv, les déclarations les plus antisionistes
que l'on ait jamais pu proférer
? On a scrupule à publier ici des propos
que l'on ne trouve d'ordinaire que dans
des gazettes extrémistes ou bien encore
dans la bouche d'un certain nombre de
personnages politiques, tels -
récemment - M. de Villepin, qui
ISRAËL
cherche à flatter les réflexes de la
banlieue parisienne.
Résumons : M.Burg s'en prend avec
violence aux communautés juives (et
d'abord à celles des Etats-Unis) qui ne
voient pas, selon lui, que la démocratie
israélienne n'existe plus. M.Burg
rappelle qu'il a cessé de croire en Dieu
et qu'il ne porte la kippa que comme
signe d'identité culturelle. Le rabbinat
n'est, selon lui, qu'une médiocre
institution et une construction de
nature “catholique”. “Quelle différence,
dit-il, y aurait-il dans ce pays si le chef
du gouvernement était juif ou arabe ?
L'essentiel est que le meilleur gagne !
Construisons la nouvelle réalité : peutêtre
la meilleure solution est-elle, en
effet, que le premier ministre soit
arabe!”
L'entretien est titré par le rédacteur
en chef du quotidien Maariv “ Vous
souvenez-vous de moi ?”.
Les Israéliens se souviennent surtout
du fait que l'homme qui parle dans ces
hauteurs morales ( gvoha, gvoha, disait
le prophète biblique ) a refusé, durant
des années, de rendre à l'Etat la
voiture officielle mise à sa disposition
quand il avait des responsabilités. Ce
qui signifie que chez M.Burg, le
courtisan qu'il était craignait
essentiellement de s'éloigner de son
portefeuille.
M.Burg est à l'évidence, ivre
d'orgueil. Il souffre d'hydropisie, cette
maladie de la grenouille qui voulait se
faire plus grosse que le bœuf. Dans le
dictionnaire israélien des girouettes
Avraham Burg aura une place de choix.
En lisant l'entretien de M. Burg, j'ai
pensé à une formule du poète Khalil
Gibrane, considéré comme le Victor
Hugo du monde arabe : “La sagesse
cesse d'être sagesse quand elle devient
trop fière pour pleurer, trop grave pour
rire, et trop imbue de soi pour
rechercher autre chose que soi”.
V.M
INFORMATION JUIVE Septembre 2010 17