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FT Marchés publics d'assurances 1 p. 57-58 8/08/05 10:55 Page 57<br />
Atypiques, les marchés publics d’assurances suscitent de<br />
nombreuses interrogations. Quelle procédure mettre en<br />
œuvre ? Comment faire évoluer le contrat ? Comment<br />
prendre en compte les majorations exceptionnelles de<br />
prime ? Quelle position adopter en cas de résiliation par<br />
l’assureur ? Devant quel juge porter les différends ? Afin<br />
d’y répondre, le <strong>Journal</strong> <strong>des</strong> <strong>Maires</strong> propose une série de<br />
<strong>fiche</strong>s techniques. La première porte sur la place que réserve<br />
le Code <strong>des</strong> marchés publics (CMP) à la négociation de<br />
ces contrats.<br />
Les contrats d’assurance ont fait leur apparition dans<br />
le Code <strong>des</strong> marchés publics (CMP) en 1998. A l’époque,<br />
<strong>cette</strong> révolution fut rendue indolore en raison<br />
d’un régime spécifique de passation : la procédure négociée<br />
avec publicité et mise en concurrence. En 2001, deux<br />
événements ont permis de mesurer l’ampleur du bouleversement<br />
de la matière. D’une part, la réforme du CMP a soumis<br />
l’assurance au droit commun de la commande publique.<br />
D’autre part, la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 (loi<br />
MURCEF) a imposé une équation simple : tous les marchés<br />
publics sont <strong>des</strong> contrats administratifs.<br />
Dans un contexte où le nombre d’assureurs intéressés par<br />
le secteur <strong>des</strong> collectivités diminue régulièrement, et où le<br />
coût de l’assurance devient prohibitif, négocier les marchés<br />
relève d’une véritable nécessité selon de nombreux acteurs<br />
de la commande publique.<br />
Or, ce besoin pratique est souvent confronté à un écueil juridique<br />
: le CMP, qui ne distingue pas les prestations d’assurances<br />
<strong>des</strong> autres prestations de services, n’offre, à ce titre, que<br />
quelques espaces ponctuels de négociation. Aussi, dans quels<br />
cas peut-on donc négocier les marchés publics d’assurance ?<br />
Classiquement, trois paramètres peuvent être pris en<br />
compte : le montant <strong>des</strong> prestations, les circonstances<br />
entourant la passation du marché, mais également le secteur<br />
d’activité dans lequel le contrat est souscrit.<br />
1. La négociation en raison du montant<br />
CONTRATS ET MARCHÉS<br />
Les marchés publics d’assurances<br />
1. La négociation<br />
Les réformes de 2001 et de 2004 se sont traduites par un<br />
accroissement de la place de la négociation en raison du<br />
montant <strong>des</strong> marchés. Les prestations d’assurances ne dérogent<br />
pas à <strong>cette</strong> règle. Jusqu’à 230 000 € HT, elles peuvent<br />
être attribuées au terme d’une mise en concurrence librement<br />
organisée par la personne responsable du marché.<br />
Cette possibilité de négocier est assortie d’une contrainte de<br />
publicité formalisée lorsque le marché dépasse 90 000 € HT.<br />
Depuis peu (décret n° 2004-1298 du 26 novembre 2004), les<br />
marchés inférieurs à 4000 € HT sont dispensés de toute formalité<br />
de publicité et de mise en concurrence (voir le JdM de<br />
janvier, p. 74 à 76, notamment pour les réserves).<br />
> Comment estimer un tel<br />
montant en matière d’assurance ?<br />
Aux termes de l’article 27 du CMP, « il est procédé à une<br />
estimation de la valeur totale (…) <strong>des</strong> services qui peuvent<br />
<strong>fiche</strong>s techniques<br />
être considérés comme homogènes soit en raison de leurs<br />
caractéristiques propres, soit parce qu’ils constituent une<br />
unité fonctionnelle ».<br />
Concrètement, c’est le montant total de la prime payable<br />
par la personne publique – ou <strong>des</strong> primes, si la catégorie<br />
homogène définie englobe plusieurs contrats d’assurance –,<br />
sur toute la durée du ou <strong>des</strong> marché(s) qui doit guider le<br />
choix de la procédure de consultation appropriée.<br />
L’estimation préalable de la plupart <strong>des</strong> besoins <strong>des</strong> collectivités<br />
ne pose, en général, guère de difficultés : il est, par<br />
exemple, relativement aisé de définir le montant prévisionnel<br />
d’une opération de travaux de voirie.<br />
D’autres prestations, parce qu’elles relèvent d’un secteur économiquement<br />
sensible (cas <strong>des</strong> assurances), rendent, en<br />
revanche, l’exercice plus délicat. D’une période à une autre,<br />
en fonction <strong>des</strong> branches d’assurance concernées, le montant<br />
d’une prime peut fortement fluctuer. Certaines collectivités<br />
qui se sont récemment engagées dans le renouvellement de<br />
leurs contrats en ont fait la douloureuse expérience : relance<br />
de la procédure à la suite du franchissement d’un seuil,<br />
absence temporaire de couverture, etc.<br />
En somme, avant d’engager la procédure de consultation,<br />
on invitera les personnes publiques à se renseigner auprès<br />
d’autres collectivités ou <strong>des</strong> opérateurs, afin d’éviter les<br />
déconvenues et retards liés, le cas échéant, à une estimation<br />
irréaliste du besoin.<br />
Sources ■ Art. 27 et 28 du CMP ; circulaire du 18 décembre 2001 relative<br />
à la passation <strong>des</strong> marchés publics de services d’assurance.<br />
2. La négociation en raison<br />
<strong>des</strong> circonstances de la passation<br />
En pratique, l’infructuosité <strong>des</strong> procédures d’appel d’offres,<br />
la complexité <strong>des</strong> prestations et encore l’urgence sont<br />
les motifs les plus couramment invoqués par les acheteurs<br />
publics pour négocier les marchés.<br />
> L’infructuosité<br />
En vertu de l’article 35-I-1° du CMP, les marchés n’ayant<br />
donné lieu à aucune offre ou pour lesquels il n’a été proposé<br />
que <strong>des</strong> offres irrecevables ou inacceptables au sens<br />
de l’article 53, peuvent être négociés avec publicité – sauf<br />
s’il est décidé de ne négocier qu’avec les candidats admis à<br />
présenter une offre – et mise en concurrence.<br />
La déclaration d’infructuosité, suivie d’une négociation,<br />
fait l’objet d’un contrôle très rigoureux par le juge administratif.<br />
Celui-ci analyse avec attention les conditions<br />
initiales de la mise en concurrence : s’il constate que ces<br />
conditions ne permettaient pas, en tout état de cause, de<br />
mener à bien la procédure d’appel d’offres (sous-estimation<br />
<strong>des</strong> prestations, inadaptation du dossier de consultation),<br />
il censure la procédure négociée subséquente. Dans<br />
ce type d’hypothèse, en effet, la procédure peut certes être<br />
réengagée, mais sur la base d’un nouvel appel d’offres.<br />
suite page 58 ><br />
www.journal<strong>des</strong>maires.com – février 2005 – <strong>Journal</strong> <strong>des</strong> <strong>Maires</strong> – 57
FT Marchés publics d'assurances 1 p. 57-58 8/08/05 10:55 Page 58<br />
<strong>fiche</strong>s techniques<br />
> suite de la page 57<br />
En matière d’assurance, les cas d’absence de réception<br />
d’offres ou d’offres irrecevables ou inacceptables au sens<br />
de l’article 53 ne sont pas rares. L’appel d’offres repose, en<br />
effet, comme le contrat d’assurance, sur un mécanisme<br />
« d’adhésion » du cocontractant. La confrontation de ces<br />
deux logiques contractuelles se traduit souvent, en pratique,<br />
par un décalage : à la proposition de contrat soumis<br />
à la concurrence par l’acheteur public, les assureurs répondent<br />
par le dépôt de leurs conditions générales et particulières<br />
d’assurances, rarement conformes aux prescriptions<br />
de la personne publique. Le choc frontal est alors inévitable.<br />
Une fois les offres déclarées non conformes, la personne<br />
publique est placée devant un choix cornélien : faut-il<br />
relancer la procédure d’appel d’offres, sur la base d’un<br />
nouveau cahier <strong>des</strong> charges, ou faut-il déclarer l’appel<br />
d’offres infructueux, et enclencher la négociation ? La<br />
rigueur juridique conduit à privilégier la première voie,<br />
mais le sens pratique impose bien souvent de recourir à<br />
l’infructuosité…<br />
Sources ■ Art. 35 du CMP ; CE, 14 mars 1997, OPHLM du Maine-et-<br />
Loire, req. n° 146011, conclusions C. Bergeal.<br />
> La complexité <strong>des</strong> prestations<br />
Le CMP distingue deux degrés dans la complexité : celui<br />
permettant de recourir à la procédure négociée de droit<br />
commun (art. 35) et celui autorisant de mettre en œuvre un<br />
dialogue compétitif (art. 36).<br />
Il ressort d’abord <strong>des</strong> alinéas 2 et 4 du I de l’article 35 que<br />
les marchés de services peuvent être négociés avec publicité<br />
et mise en concurrence :<br />
✗ lorsque la prestation de services, objet du marché, est<br />
d’une nature telle que les spécifications de celui-ci ne peuvent<br />
être établies préalablement avec une précision suffisante<br />
pour permettre le recours à l’appel d’offres ;<br />
✗ ou lorsqu’il s’agit de services dont la nature ou les aléas<br />
pouvant affecter leur réalisation ne permettent pas une<br />
fixation préalable et globale <strong>des</strong> prix.<br />
Cette dernière possibilité, prévue par le droit communautaire,<br />
a été introduite en droit interne avec la réforme<br />
de 2004.<br />
Depuis 2001, en matière d’assurance, la tentation est forte,<br />
chez les acheteurs publics, de se réfugier derrière ces dispositions<br />
de l’article 35 : les spécificités de formation et d’exécution<br />
du contrat d’assurance ne permettraient pas le<br />
recours à l’appel d’offres et nécessiteraient donc de négocier<br />
le contrat… Pour étayer <strong>cette</strong> position, il est notamment<br />
fait référence à l’article 30-c) – consacré à la procédure<br />
négociée – de la directive Marchés, qui vise, à titre<br />
d’illustration, les services de la catégorie 6 (services d’assurance<br />
et services financiers).<br />
☛ Attention ! Il ne faut pas interpréter l’exemple utilisé<br />
dans la directive précitée comme la reconnaissance d’un<br />
droit systématique à la négociation <strong>des</strong> marchés d’assurances<br />
: c’est au cas par cas que la complexité de la prestation<br />
doit être appréciée pour déterminer si le recours à la procédure<br />
négociée s’impose.<br />
En outre, le recours à la dérogation implique l’existence<br />
d’une complexité réelle et résultant objectivement de la<br />
prestation. Or, en pratique, les besoins en assurances <strong>des</strong><br />
collectivités (assurance dommages aux biens, assurance de<br />
58 – <strong>Journal</strong> <strong>des</strong> <strong>Maires</strong> – février 2005 – www.journal<strong>des</strong>maires.com<br />
CONTRATS ET MARCHÉS<br />
responsabilité, assurance risques statutaires…) donnent<br />
rarement lieu à la passation de marchés portant sur <strong>des</strong><br />
prestations qui répondent aux conditions de complexité<br />
fixées à l’article 35.<br />
La complexité d’une prestation peut également conduire à<br />
recourir à la procédure de dialogue compétitif caractérisée<br />
par l’existence d’une phase de discussion avec les opérateurs.<br />
☛ Attention ! L’acheteur public doit se trouver dans l’impossibilité<br />
de définir les moyens techniques susceptibles de<br />
répondre à ses besoins ou d’établir le montage juridique<br />
ou financier du projet. En pratique, le recours à <strong>cette</strong> nouvelle<br />
procédure devrait rester particulièrement rare.<br />
Sources ■ Art. 35, 36 et 67 du CMP ; CAA de Nantes, Formation plénière,<br />
30 juillet 2003, Ville de Rennes, n° 02NT01384, n° 02NT01590 ;<br />
Rép. Min. à la QE n° 36955, JO AN, 19 octobre 2004, p. 8116 ; directive<br />
2004/18/CE du 31 mars 2004.<br />
> L’urgence<br />
Un droit à la négociation, sans publicité mais avec mise en<br />
concurrence, existe dès lors que la personne publique est placée<br />
dans une situation d’urgence, qualifiée d’« impérieuse ».<br />
Pour bénéficier de <strong>cette</strong> dérogation, deux conditions doivent<br />
être réunies :<br />
✗ la personne responsable du marché doit être confrontée<br />
à <strong>des</strong> circonstances imprévisibles (catastrophes naturelles<br />
ou technologiques…) ;<br />
✗ ces circonstances doivent l’empêcher d’organiser une<br />
procédure de consultation dans <strong>des</strong> délais compatibles<br />
avec ceux de l’appel d’offres ou de la procédure négociée<br />
de droit commun.<br />
En pratique, les cas de négociation <strong>des</strong> marchés publics<br />
d’assurance sur le fondement de l’urgence impérieuse<br />
devraient être rares.<br />
Source ■ Art. 35-II-1 du CMP.<br />
3. Le cas <strong>des</strong> activités d’opérateurs de réseaux<br />
L’article 84 du CMP prévoit que les collectivités peuvent<br />
recourir à la procédure négociée avec publicité et mise en<br />
concurrence pour attribuer, sans plafond de montant, les<br />
marchés de travaux, fournitures et services, directement<br />
liés à leurs activités d’« opérateur de réseaux ». Les marchés<br />
publics d’assurances sont, sous réserve de respecter les<br />
conditions fixées à l’article 84, susceptibles de bénéficier de<br />
ce régime spécifique de passation.<br />
Source ■ Pour la liste <strong>des</strong> activités<br />
<strong>des</strong> opérateurs de réseaux, art. 82 du CMP.<br />
En pratique, <strong>cette</strong> dérogation offre <strong>des</strong> perspectives intéressantes<br />
: à titre d’illustration, la possibilité de négocier les<br />
contrats garantissant la responsabilité <strong>des</strong> collectivités<br />
dans le cadre de leur activité d’autorité organisatrice de<br />
transport…<br />
Sources ■ Art. 65, 66, 82 et 84 du CMP.<br />
Cyril Coupé<br />
consultant<br />
www.goutal-alibert.net