Le train bleu - Chri.. - Index of
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— Oui, sans doute, répondit Catherine, d’un ton vague.<br />
— Quelle impression ?<br />
— Voyons, mademoiselle, dit le commissaire en se penchant en avant, faites-nous<br />
connaître votre opinion sur cette femme.<br />
Catherine tournait et retournait dans son esprit les détails de leur entretien. Il lui semblait<br />
qu’elle allait trahir une confidence mais ce mot horrible « assassinat » résonnait à son oreille<br />
et la poussait à dévoiler le peu qu’elle savait. Elle répéta donc, aussi fidèlement que possible,<br />
la conversation qu’elle avait eue avec la pauvre voyageuse.<br />
— Intéressant, très intéressant, n’est-ce pas, monsieur Poirot, dit le commissaire.<br />
— Ne s’agirait-il pas d’un suicide ? demanda Catherine.<br />
— Non. Elle a été étranglée avec un morceau de cordon noir, expliqua le commissaire.<br />
Catherine frissonna d’horreur.<br />
— Certes, cela n’a rien de joli à voir… dit le commissaire.<br />
— Nos bandits de la voie ferrée sont peut-être plus brutaux que ceux de votre pays.<br />
— C’est affreux !<br />
— Oui, oui, je sais bien, dit le commissaire, avec des gestes d’excuses et<br />
d’encouragement. Mais vous possédez beaucoup de courage, mademoiselle. Je l’ai deviné à<br />
première vue. Ainsi je vais vous demander de remplir une formalité… très pénible.<br />
Catherine le regarda avec appréhension.<br />
— Je vous en prie, mademoiselle, veuillez avoir la bonté de m’accompagner dans le<br />
compartiment à côté.<br />
— Est-ce utile ? dit tout bas Catherine.<br />
— Il faut identifier la victime, poursuivit le commissaire. Puisque la femme de chambre a<br />
disparu, vous semblez être la personne qui l’ait vue le plus longtemps depuis son arrivée<br />
dans ce <strong>train</strong>.<br />
— Bien. Si c’est indispensable…<br />
Catherine se leva. Poirot lui fit un petit signe d’approbation.<br />
— Voilà une personne raisonnable, monsieur Caux, puis-je vous accompagner ?<br />
— Enchanté, mon cher monsieur Poirot.<br />
Ils passèrent dans le couloir et M. Caux ouvrit la porte du compartiment funèbre. <strong>Le</strong>s<br />
rideaux du fond avaient été levés à demi pour permettre l’accès de la lumière.<br />
La morte, étendue sur sa couchette, semblait plongée dans le sommeil. <strong>Le</strong>s couvertures<br />
remontées sur les épaules et la tête tournée vers le mur ne laissaient voir que la chevelure<br />
bouclée.<br />
Tout doucement, M. Caux posa la main sur l’épaule et tira en arrière. La figure apparut en<br />
pleine clarté. Catherine recula et enfonça ses ongles dans les paumes de ses mains. Un<br />
horrible coup rendait méconnaissable le visage de la morte.<br />
Poirot poussa une exclamation et demanda :<br />
— Quand ce coup a-t-il été frappé ? Avant ou après la mort ?<br />
— <strong>Le</strong> docteur dit que c’est après, répondit M. Caux.<br />
— Ce fait est étrange, déclara Poirot. (Il se tourna vers Catherine.) Mademoiselle, soyez<br />
brave. Regardez-la bien. Reconnaissez-vous la femme avec qui vous avez parlé hier dans le<br />
<strong>train</strong> ?<br />
Douée d’un grand sang-froid, Catherine se raidit et examina longuement le corps étendu<br />
sur la couchette. Puis elle se baissa et souleva la main de la morte.