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Le train bleu - Chri.. - Index of

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plus anciennes d’Angleterre. Peut-être un jour Ruth se mordra-t-elle les doigts en apprenant<br />

qu’une autre femme règne à sa place à <strong>Le</strong>conbury.<br />

— Je parle sérieusement, jeune homme.<br />

— Moi aussi. Pour l’instant, mes finances sont très mal en point et le divorce me jetterait<br />

dans un terrible embarras. Après avoir attendu dix années, pourquoi Ruth n’attendrait-elle<br />

pas encore plus longtemps ? Ma parole d’honneur, le vieux lord ne peut durer plus de dix-huit<br />

mois, et comme je vous le disais tout à l’heure, ce serait dommage que Ruth n’obtînt pas le<br />

titre pour lequel elle m’a épousé.<br />

— Vous prétendez que ma fille vous a épousé pour votre rang social ?<br />

Derek Kettering fit entendre un rire où l’on découvrait autre chose que de l’amusement.<br />

— Vous ne pensez pas que ce fut un mariage d’amour ?<br />

— Vous parliez un langage tout différent il y a dix ans, à Paris, remarqua Van Aldin.<br />

— Vraiment ? Cela se peut. Ruth était très jolie, elle ressemblait à un ange ou à une<br />

sainte descendue d’un vitrail. À cette époque, je prenais moi-même la noble résolution de<br />

changer de conduite et de vivre selon les principes traditionnels de la famille anglaise, auprès<br />

d’une épouse délicieuse. Sans doute n’avez-vous jamais pris ma promesse au sérieux ? dit-il<br />

en éclatant de rire.<br />

— Vous avez épousé ma fille pour son argent, voilà ce qu’il y a de plus clair.<br />

— Et elle m’aurait épousé par amour ? demanda Derek avec ironie.<br />

— Vous osez en douter ?<br />

Derek Kettering observa son beau-père pendant une minute ou deux, puis il hocha la tête<br />

d’un air pensif.<br />

— Ainsi vous le croyez toujours. Moi aussi je l’ai cru. Sachez, mon cher beau-père, que je<br />

n’ai pas gardé longtemps mes illusions.<br />

— Je ne sais pas où vous voulez en venir, dit Van Aldin, et je n’ai pas envie de le savoir.<br />

Vous avez traité Ruth de façon indigne.<br />

— Je l’admets, acquiesça Kettering, mais elle n’est pas commode non plus. Ruth a de qui<br />

tenir. Sous une apparente douceur, elle cache un cœur de pierre. Vous avez la réputation<br />

d’un homme dur, mais votre fille est encore plus cruelle que vous. Vous, tout au moins, vous<br />

aimez quelqu’un plus que vous-même. Ruth ne pense qu’à elle.<br />

— Il suffit. Je voulais simplement vous faire part de mes projets. Ma fille a droit au<br />

bonheur et sachez que je la soutiendrai par tous les moyens.<br />

Derek Kettering se leva et s’appuya contre le marbre de la cheminée. Il jeta sa cigarette<br />

dans le foyer et parla d’une voix très calme.<br />

— En somme, que désirez-vous de moi au juste ?<br />

— Que vous n’essayiez pas de défendre votre cause. Cela vaudra mieux pour vous.<br />

— Oh ! Est-ce une menace ?<br />

— Prenez-le comme il vous plaira.<br />

Kettering approcha une chaise de la table et s’assit en face du millionnaire.<br />

— Et si, par amour de la chicane, je voulais me défendre ?<br />

Van Aldin haussa les épaules.<br />

— Il faudrait pouvoir le faire, jeune fou que vous êtes ! Consultez vos hommes de loi et ils<br />

vous diront tous comme moi. Votre conduite défraie les conversations de tout Londres.<br />

— Ruth vous a sans doute bâti une histoire à propos de Mireille. Ce n’est guère adroit de<br />

sa part. Je ne me mêle pas de ses amis, moi !

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