Le train bleu - Chri.. - Index of
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significatif. Je laissai entendre à la femme de chambre que l’homme qu’elle avait vu en<br />
compagnie de sa maîtresse n’était pas le comte de la Roche, mais Derek Kettering. Sur le<br />
moment, elle hésita. Cependant, à mon retour à l’hôtel, vous m’appreniez par téléphone<br />
qu’Ada Mason, après réflexion, maintenait que cet homme était Derek Kettering. Je m’y<br />
attendais un peu. Après que j’eus quitté votre hôtel, elle consulta quelqu’un. Qui ? <strong>Le</strong> major<br />
Knighton. Celui-ci donna ses instructions et elle s’y conforma. Autre chose ; au cours d’une<br />
conversation, le major Knighton fit allusion devant moi à un vol de bijoux commis dans une<br />
maison où il demeurait. Était-ce là une simple coïncidence… ou bien un nouvel anneau de la<br />
chaîne ?<br />
— Monsieur Poirot, j’ai sans doute l’esprit obtus, mais j’avoue qu’un détail m’échappe<br />
jusqu’ici. Qui est l’homme qui monta dans le <strong>train</strong> à Paris ? Derek Kettering ou le comte de la<br />
Roche ?<br />
— Voilà où réside l’extrême simplicité de l’affaire, dit Poirot. Cet homme n’a jamais existé.<br />
Ah ! mille tonnerres ! Seule Ada Mason nous parle de ce personnage et nous croyons la<br />
femme de chambre parce que Knighton affirme l’avoir vue à Paris.<br />
— Ruth elle-même a dit au conducteur qu’elle avait laissé sa servante à Paris.<br />
— Attendez, nous y arrivons. Nous croyons avoir l’attestation de Mrs Kettering, c’est fait :<br />
une morte ne saurait fournir un témoignage. Nous possédons seulement la déposition du<br />
conducteur… ce qui est différent.<br />
— Alors, vous croyez que cet homme a menti ?<br />
— Non, non ! Il a répété ce qu’il pensait être la vérité. La femme qui lui dit avoir laissé sa<br />
servante à Paris n’était pas Mrs Kettering.<br />
<strong>Le</strong> millionnaire ouvrit de grands yeux étonnés.<br />
— Monsieur Van Aldin, Ruth Kettering était morte avant l’arrivée du <strong>train</strong> en gare de Lyon.<br />
C’est Ada Mason, vêtue des vêtements élégants de sa maîtresse, qui acheta le panier-dîner<br />
et qui parla au conducteur du <strong>train</strong>.<br />
— Impossible !<br />
— Pas impossible du tout, monsieur Van Aldin. Aujourd’hui toutes les femmes se<br />
ressemblent et on les identifie plutôt par la toilette que par le visage. Ada Mason était de la<br />
même taille que votre fille, vêtue du somptueux manteau de fourrure et du petit chapeau<br />
rouge enfoncé jusqu’aux yeux, avec une mèche de cheveux châtains dépassant sur chaque<br />
oreille. Rien d’étonnant que l’employé s’y soit trompé. Il n’avait point encore parlé à Mrs<br />
Kettering, ne l’oubliez pas. Certes, il avait vu la servante, au moment où celle-ci lui remettait<br />
les billets de chemin de fer, mais il en avait eu tout juste l’impression d’une grande femme<br />
maigre, habillée de noir. Souvenez-vous aussi que Mason, ou Kitty Kidd, était une actrice,<br />
capable de transformer son apparence et de changer le timbre de sa voix. Donc, pas de<br />
danger que l’employé reconnût la servante sous son costume d’emprunt, mais lorsqu’il<br />
découvrirait le corps de Mrs Kettering il pouvait s’apercevoir que ce n’était pas la même<br />
personne qui lui avait parlé la veille : d’où la nécessité de défigurer le visage de la victime.<br />
<strong>Le</strong> principal risque que courait Ada Mason était que miss Grey entrât dans le compartiment<br />
après le départ de Paris. Elle prévint cet ennui en se procurant un panier de victuailles et en<br />
s’enfermant au verrou.<br />
— Mais qui a tué Ruth… et à quel moment ?<br />
— Tout d’abord, ne perdons pas de vue que le crime fut projeté et exécuté par les deux<br />
complices, Knighton et Ada Mason. Knighton se trouvait ce jour-là à Paris pour votre service.