Le train bleu - Chri.. - Index of
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— Sans doute pour me faire chanter.<br />
Elle ouvrit de grands yeux. Puis elle sourit et hocha la tête.<br />
— Naturellement. Il fallait s’attendre à cela d’un type pareil. J’aurais dû me méfier. Non,<br />
croyez-moi, Derek. Je ne l’ai pas envoyé vers vous.<br />
Il vrilla sur elle des yeux scrutateurs, comme s’il voulait pénétrer sa pensée.<br />
— Je vais tout vous raconter, pour ma plus grande confusion. L’autre jour, j’étais dans une<br />
rage folle… (Elle fit un geste théâtral.) De nature, je ne suis guère patiente. Pour me venger<br />
de votre rupture, j’ai été voir le comte de la Roche et lui ai demandé d’aller au commissariat<br />
de police pour révéler tel et tel fait. Mais ne craignez rien, Derek, je n’avais pas tout à fait<br />
perdu la tête. Moi, seule, je possède la preuve. La police restera impuissante si je me refuse<br />
à parler. Comprenez-vous ? Alors…<br />
Elle fit un pas vers lui en le regardant avec des yeux pleins de tendresse.<br />
Il la repoussa brutalement.<br />
La poitrine haletante, les yeux à demi fermés, elle s’écria :<br />
— Prenez garde, Derek !… réfléchissez. Voyons, vous revenez à moi, n’est-ce pas ?<br />
— Non, tout est fini entre nous… à jamais !<br />
— Ah ! par exemple !<br />
La danseuse avait l’allure d’un félin en colère et ses paupières papillotaient.<br />
— Alors, vous aimez une autre femme ! Celle que vous avez invitée à déjeuner l’autre<br />
jour, n’est-ce pas ?<br />
— J’ai l’intention de l’épouser. Autant vous l’apprendre tout de suite.<br />
— Cette Anglaise mal ficelée ? Et vous croyez que je vais accepter cela ? Certes, non.<br />
Écoutez-moi, Derek. Rappelez-vous notre conversation de l’autre jour à Londres. Vous m’avez<br />
déclaré vous-même que seule la mort de votre femme pouvait vous tirer d’embarras. Vous lui<br />
reprochiez sa santé florissante. Puis l’idée d’un accident, ou quelque chose de plus radical,<br />
vous vint à l’esprit.<br />
— Sans doute est-ce cette conversation que vous avez répétée au comte de la Roche ?<br />
interrogea Derek, d’un air méprisant.<br />
Mireille éclata de rire.<br />
— Me prenez-vous pour une sotte ? Que ferait la police d’une histoire aussi vague ?<br />
Écoutez-moi bien, je vous tends la perche pour la dernière fois. Lâchez cette Anglaise et<br />
revenez à moi. À cette condition, mon chéri, je ne soufflerai mot de…<br />
— De quoi ?<br />
Elle ricana.<br />
— Vous croyez donc que personne ne vous a vu ?<br />
— Qu’insinuez-vous par-là ?<br />
— Tout simplement que moi je vous ai vu, mon cher Derek. Je vous ai vu sortir du<br />
compartiment de madame votre femme un peu avant l’arrêt du <strong>train</strong> à Lyon. Et j’en sais<br />
encore davantage. Je sais que lorsque vous avez quitté son compartiment, elle était morte.<br />
Il la regardait comme un somnambule, d’un air effaré. Il se retourna et sortit d’un pas<br />
chancelant.