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LA NOTION DE PAUVRETÉ DANS LE TEMPS Liliane AMOUDRUZ

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le faire disparaître. Le projet qu’il élabore sera repris par le Comité des secours publics de<br />

l’Assemblée Législative (1791), puis de la Convention (1792).<br />

[« De la Constitution de 1791, décrétant un établissement général des secours pour élever les<br />

enfants abandonnés et fournir du travail aux pauvres valides, au décret qui établit les bases des secours<br />

publics (mars 1793), à celui sur l’extinction de la mendicité (24 vendémiaire, an II), à l’institution du Grand<br />

Livre de la bienfaisance (22 floréal, an II), à la nationalisation complète des secours (décret du 23 messidor, an II,<br />

sur la mise en vente des biens hospitaliers) prit forme un développement législatif qui devait permettre de réaliser<br />

le plan général rédigé par la Constituante.»]<br />

Misère et pauvreté. Ces trois Comités, héritiers des Lumières, font la différence entre la pauvreté qui leur paraît<br />

nécessaire et la misère, produit d’un mauvais gouvernement. La loi doit inscrire les dépenses de «l’assistance publique» au<br />

budget de la Nation, mais, aussi, distinguer le pauvre utile, désireux de travailler, à qui il faut faciliter l’accès à l’emploi ou à des<br />

secours, du vagabond professionnel, inutile et traité en délinquant.<br />

« Il y aura toujours des riches, il doit donc y avoir des pauvres. Dans les Etats bien gouvernés, ces derniers travaillent et<br />

vivent ; dans les autres, ils se revêtent des haillons de la mendicité et rongent insensiblement l’Etat sous le manteau de la<br />

fainéantise. Ayons des pauvres et jamais de mendiants ; voilà le but où doit tendre une bonne administration.» (J.P.Brissot, 1781,<br />

Théorie des lois criminelles).<br />

Emergence de l’individu. « On a toujours pensé à faire la charité aux pauvres, et jamais à faire valoir les droits de<br />

l’homme pauvre sur la société et ceux de la société sur lui ». Si tous les citoyens ont des droits et des devoirs, les pauvres,<br />

citoyens à part entière, doivent participer par leur travail à la bonne marche de la société. Aux yeux de la pensée libérale, une<br />

politique de la pauvreté est indissociable de la question du travail.<br />

[Si la pensée libérale voit la masse des pauvres comme un stock de main-d’œuvre bon marché et docile, elle y découvre<br />

aussi des consommateurs potentiels. Il faut donc lui garantir un niveau de vie qui lui permette de participer à l’économie de<br />

marché qui se met en place : «qu’on ne diminue pas l’aisance des dernières classes des citoyens ; car elles ne pourront pas<br />

assez contribuer à la consommation des denrées qui ne peuvent être consommées dans le pays, ce qui ferait diminuer la<br />

reproduction et le revenu de la Nation.» (Quesnay, Maximes générales pour un gouvernement plus avantageux au genre humain,<br />

1775 Vingtième Maxime)]<br />

IV - <strong>LA</strong> CONQUÊTE <strong>DE</strong>S DROITS.<br />

4-1- POLITIQUE SOCIA<strong>LE</strong> ET SOLIDARITÉ.<br />

Une société sans lois sociales. Au delà de ces idées neuves, la Révolution a surtout codifié la liberté économique,<br />

c’est-à-dire la liberté d’un individu face à un autre individu, sans lois pour régler les rapports économiques et sociaux. Les plus<br />

pauvres sont donc sans défense face aux puissants.<br />

La grande peur du législateur, dès les premiers tâtonnements de la politique sociale, est d’encourager l’oisiveté en voulant<br />

combattre la pauvreté. Elle est déjà exprimée dans les textes du comité de mendicité de la Constituante : « le législateur,<br />

continuellement placé entre la crainte de ne donner qu’une assistance incomplète et de laisser ainsi des malheureux ou sans<br />

secours, ou sans la masse des secours qui leur est nécessaire, et entre la crainte d’accroître, par une assistance trop entière,<br />

le nombre de ceux qui voudraient être assistés, et, par conséquent, l’oisiveté et la fainéantise, doit éviter soigneusement ces<br />

deux écueils, et ils se touchent de bien près.» (Procès-verbaux et rapports du comité de mendicité de la Constituante 1790-<br />

1791, Paris, Imprimerie nationale, 1911.)<br />

Les droits de l’homme et du citoyen, et les hésitations de la lutte contre la précarité. Les conquêtes<br />

des XIXe et XXe siècles seront d’abord celles du droit des individus à s’organiser pour se défendre à travers les syndicats<br />

ou les partis politiques. Le XXe siècle a vu se mettre en place, au coup par coup, les lois règlementant le travail, la protection<br />

sociale, les congés payés, les salaires.<br />

Ceux qui n’ont ni travail ni ressources restent longtemps dans une grande précarité. Ils trouveront leur place dans la<br />

collectivité par l’instauration progressive, catégorielle, des différents revenus minimums. Trois prestations de revenu minimum<br />

sont instituées pour des personnes qui ne peuvent être tenues pour responsables de leur pauvreté : l’Allocation Parent Isolé<br />

(API), l’Allocation Adulte Handicapé (AAH), le Fonds National de Solidarité (FNS)<br />

Avec la crise qui se développe au cours des années 70, la manière d’aborder le problème de la pauvreté va changer. Au<br />

<strong>LA</strong> <strong>NOTION</strong> <strong>DE</strong> <strong>PAUVRETÉ</strong> <strong>DANS</strong> <strong>LE</strong> <strong>TEMPS</strong> <strong>Liliane</strong> <strong>AMOUDRUZ</strong> — 2e trim. 2009 p 13/27<br />

Espaces Dialogues • La Maison des Associations • 1a, place des Orphelins 67000 STRASBOURG • espaces.dialogues@free.fr<br />

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